Cahier de formation
Savoir
Avec 900 000 personnes touchées en France, la maladie d’Alzheimer est fréquente chez le sujet âgé, mais touche également des personnes jeunes. Affection neurodégénérative, elle entraîne une détérioration des neurones provoquant la plus commune des démences. En permettant l’instauration d’un traitement précoce, le diagnostic précoce est le seul moyen de ralentir l’évolution de la maladie.
Décrite en 1906 par le psychiatre et neurologue allemand Aloïs Alzheimer (1864-1915), la maladie d’Alzheimer (MA) est caractérisée par une lente dégénérescence neuronale, qui débute au niveau de l’hippocampe (voir la figure ci-dessous) et s’étend dans le cortex cérébral. Elle se manifeste par des troubles de la mémoire puis par d’autres troubles cognitifs (langage, apraxie, agnosie…) et éventuellement par des troubles comportementaux ou de la personnalité. L’évolution se fait sur plusieurs années avec l’apparition d’une dépendance et un retentissement sur les activités de la vie quotidienne (toilette, alimentation, habillage, déplacement) et sur l’entourage.
Le terme “démence” ne signifie pas forcément que le patient présente des troubles du comportement, mais que les troubles cognitifs ont un retentissement sur sa vie quotidienne et qu’il a besoin d’être aidé. Les processus à l’origine d’une démence sont :
→ soit des processus neurodégénératifs comme dans la MA, première étiologie des démences neurodégénératives avec près de 70 % des cas
→ soit des atteintes vasculaires (voir le tableau p. 34) ;
→ soit la coexistence de lésions vasculaires cérébrales et de lésions dégénératives de la MA, particulièrement fréquente chez les personnes âgées. Comme la part respective de chacun des deux processus est difficile à apprécier, on parle donc de “démence mixte”.
D’autres maladies liées à une dégénérescence neuronale sont couramment apparentées à la maladie d’Alzheimer. Il s’agit principalement de la démence à corps de Lewy, la démence compliquant la maladie de Parkinson et la dégénérescence lobaire fronto-temporale (voir le tableau p. 34).
D’après les dernières estimations, environ 1 200 000 personnes seraient touchées en France par la MA et autres démences apparentées (MAAD). 750 000 cas étaient répertoriés en 2014
→ Les chiffres de prévalence et d’incidence spécifiques de la MA en France ne sont pas connus car il n’existe pas de registre permettant un recensement exhaustif. De plus, la maladie est sous-diagnostiquée même à des stades sévères après 70 ans.
→ La MA est la première étiologie de démence des démences neurodégénératives (près de 70 % des cas)
→ Avant 65 ans, la MA est une maladie rare (moins de 2 % des cas) correspondant essentiellement à des formes héréditaires
→ Après 65 ans, la fréquence de la MA est de 2 à 4 % de la population générale. Elle atteint 15 % à 80 ans
→ Plusieurs études conduites dans les pays occidentaux ont indiqué une baisse des nouveaux cas de démences, et donc de MA, au cours des dernières années
La maladie progresse durant une dizaine d’années après l’apparition des premiers symptômes avant d’aboutir au décès du patient. La vitesse de déclin cognitif, les symptômes et leur ordre d’apparition diffèrent d’une personne à l’autre, mais la maladie débute souvent par des troubles de la mémoire. Les classifications courantes différencient quatre stades majeurs sans qu’il y ait de frontière nette entre eux.
Le patient présente un déficit de mémoire des faits récemment acquis et une difficulté à acquérir de nouvelles informations. Par exemple, il oublie une conversation récente. Une apathie peut être observée et reste le symptôme le plus persistant. Consciente de ses difficultés, la personne met en place des stratégies pour y remédier (pense-bête…). Elle reste autonome dans ses activités quotidiennes.
Les troubles de la mémoire s’aggravent avec un retentissement dans le quotidien. Des troubles de l’orientation spatiale et temporelle apparaissent. Certains malades présentent des troubles des fonctions instrumentales (exécution des gestes, troubles du langage, troubles de la reconnaissance des personnes). Des activités complexes comme l’utilisation d’un ordinateur ou d’un téléphone portable sont parfois abandonnées. Des difficultés dans les fonctions exécutives (raisonner, planifier, organiser) peuvent être détectées. Les troubles attentionnels peuvent empêcher la lecture d’un livre. Le malade perd en autonomie. Un état dépressif, des sautes d’humeur peuvent s’installer.
Les pertes de mémoire s’accentuent. Les difficultés du langage deviennent évidentes. L’autonomie diminue encore. Les changements comportementaux et neuropsychiatriques deviennent prévalents (errements, labilité émotionnelle, qui conduisent souvent à des pleurs, de l’agressivité, de la résistance aux soins). Des moments de confusion apparaissent notamment au moment du coucher du soleil (la luminosité agissant sur l’humeur). Les patients perdent conscience de leur maladie. Des symptômes délirants peuvent apparaître (de persécution par exemple). L’ensemble des symptômes peut être source de détresse chez les proches. Un accompagnement des patients et de l’entourage devient nécessaire.
Le patient est complètement dépendant. Il ne reconnaît plus son entourage. Il communique de moins en moins, perd en mobilité jusqu’à devenir grabataire. Les fonctions organiques sont progressivement perdues et le patient décède le plus souvent des suites de troubles de la déglutition, ou d’infection.
L’étude des cerveaux des patients atteints de la maladie d’Alzheimer a montré la présence de deux types de lésions qui permettent de confirmer avec certitude le diagnostic : les plaques amyloïdes situées entre les neurones et les dégénérescences neurofibrillaires à l’intérieur même des neurones. Ces deux types de lésions correspondent à un amas d’un composé protéique : le peptide bêta-amyloïde pour les plaques amyloïdes, et la protéine Tau (Tubulin Associated Unit) phosphorylée pour les dégénérescences fibrillaires. Ces amas se forment naturellement lors du processus normal du vieillissement ; cependant, dans la MA, ces protéines s’accumulent en beaucoup plus grande quantité sous l’influence de différents facteurs génétiques et environnementaux encore méconnus. Selon une hypothèse dite de la “cascade amyloïde”, l’accumulation du peptide amyloïde se traduit par l’augmentation de la phosphorylation de la protéine Tau
La mort des neurones se traduit par l’atrophie de certaines zones du cerveau. Aux premiers stades de la MA, l’hippocampe diminue de 25 % en volume
La façon dont ces phénomènes s’enchaînent reste un mystère. A été avancée l’hypothèse d’un processus d’agrégation anormale de la protéine bêta-amyloïde, permettant aux lésions de s’étendre depuis l’hippocampe, siège de la mémoire, à l’ensemble du cerveau. Une certitude : le processus est très lent à s’installer. Il s’établit une quinzaine d’années avant que les premiers symptômes ne surviennent.
→ L’âge est le principal facteur de risque avec une prévalence des démences toutes causes confondues qui double tous les cinq ans à partir de 65 ans avec une explosion de l’incidence à partir de 80 ans.
→ Le sexe est également un facteur de risque : 40 % des malades sont des hommes et 60 % des femmes
Le risque de développer la MA est en moyenne multiplié par 1,5 si un parent du premier degré est concerné
L’hypertension artérielle, l’hypercholestérolémie, le diabète, le tabagisme et l’inactivité physique augmentent les risques de survenue de la MA.
→ La consommation excessive d’alcool triple le risque de démences en général et double celui de développer la maladie d’Alzheimer
→ Les microtraumatismes crâniens observés chez certains sportifs (footballeurs américains et boxeurs) et les anesthésies répétées ont été décrits comme des facteurs de risque
Entre 1,5 % et 2 % des malades présentent une forme héréditaire de la MA. Cette forme purement génétique se distingue par une apparition très précoce des symptômes (avant 60 ans).
Quatre gènes ont été identifiés : le gène codant pour la protéine préséniline 1 (cas le plus fréquent, sur le chromosome 14), le gène APP pour Amyloïde Protein Precursor (chromosome 21), le gène codant pour la préséniline 2 (chromosome 1) et plus récemment le gène SORL1 (chromosome 11). Si une personne porte un gène muté, il transmet ce gène et donc la maladie d’Alzheimer à 50 % de sa descendance (transmission autosomique dominante).
Les formes tardives (après 65 ans), qui correspondent à environ 90 % des cas de MA
Certains facteurs de susceptibilité augmentent le risque de développer la maladie, d’autres sont protecteurs. Ainsi être porteur de l’un ou deux allèles “epsilon 2” du gène de l’APOE réduit le risque de développer la maladie de moitié, alors que porter l’un ou deux allèles “epsilon 4” l’augmente respectivement d’un facteur 2 ou 15.
C’est le plus constant et le plus précoce des symptômes de la MA. L’oubli d’événements récents comme la désorientation dans un lieu familier sont des signes d’alerte. Elle traduit un déficit de la mémoire à long terme.
La mémoire à long terme implique un encodage, où l’information est traitée, et un stockage, où l’information est gardée. Puis il y a la récupération qui permet d’aller rechercher l’information et de la restituer. Selon les informations encodées, on distingue :
→ la mémoire épisodique qui est la mémoire des événements inscrits dans un contexte spatial et temporel précis. Exemple : « J’étais en Corse en juillet 2018. » C’est la mémoire autobiographique. Les premiers troubles qui apparaissent dans la MA sont des troubles mnésiques épisodiques. Ils traduisent une altération des formations hippocampiques indispensables à la mémorisation d’événements vécus par la personne malade ;
→ la mémoire sémantique, qui est la mémoire des concepts, des connaissances acquises. Exemple : Rome est la capitale de l’Italie. Les troubles de la mémoire sémantique apparaissent après les troubles épisodiques ;
→ la mémoire procédurale. C’est une mémoire sensori-motrice, c’est la mémoire des savoir-faire. Par exemple : savoir faire du vélo. Quand les gestes sont “procéduralisés” comme dans cet exemple, on n’a plus besoin d’y prêter attention. Ce système de mémoire est très résistant au vieillissement normal et à la maladie. D’une manière générale, les personnes atteintes de la maladie n’ont pas de troubles de ce type.
Au-delà de la mémoire à long terme, la mémorisation repose aussi sur la mémoire à court terme (ou de travail) qui permet de garder en mémoire des informations pendant un temps très court puis de les perdre. Exemple : on me donne un numéro de téléphone que je garde en mémoire le temps de le noter sur papier ; j’oublie cette information une fois inscrite. Dans la MA, cette mémoire à court terme est altérée, ce qui explique que la personne malade ne peut se rappeler que de quelques informations, voire d’aucune. Dans les stades avancés, elle ne se souvient pas du début d’une phrase qu’elle vient d’entendre. La région concernée par la mémoire à très court terme est située dans le cortex préfrontal.
Ces troubles se manifestent, au début de la maladie, par un manque de mot (aphasie léthologique), comme l’oubli des noms usuels ou très familiers qui oblige la personne malade à utiliser des périphrases explicites. Exemple : la “chose pour boire” au lieu de la bouteille. Elle peut également donner un mot de la même catégorie sémantique, mais qui n’est pas le mot exact. Exemple : le verre au lieu de la carafe. Ou donner un mot qui phonétiquement est très semblable mais qui n’a rien à voir. Exemple : le bateau au lieu du gâteau. Les phrases peuvent devenir de plus en plus courtes, le discours est de moins en moins informatif. Le langage peut devenir incohérent. À terme, la personne malade peut devenir mutique. En parallèle, apparaissent des problèmes de compréhension. La lecture à haute voix est souvent longtemps conservée.
Dès le début de la maladie, les malades ont des difficultés à se concentrer et sont plus sensibles aux stimulations extérieures. D’autre part, ils ont de grandes difficultés à mobiliser leur attention sur deux tâches simultanées. Exemple : prendre son repas en soutenant une conversation. La personne peut être aussi de plus en plus gênée par un trop grand nombre d’informations arrivant en même temps. Comme lors d’une grande manifestation familiale ou en présence de conversations croisées.
La capacité de s’organiser pour atteindre un objectif est de plus en plus difficile. Exemple : la personne ne peut plus cuisiner, car elle ne peut plus organiser les différentes tâches dans un ordre logique.
La logique est altérée. Exemple : si un lavabo déborde, la personne malade ne ferme pas le robinet, mais éponge.
La personne malade a des difficultés à réaliser des gestes nécessitant une certaine coordination et de la dextérité, comme ouvrir une porte en utilisant un digicode. Ce sont des gestes acquis qui sont peu à peu oubliés. À un stade avancé, la personne peut être incapable de réaliser les gestes les plus simples : utiliser des couverts, s’habiller…
C’est la plus fréquente : ce que la personne voit n’est pas reconnu. En plus de la difficulté à identifier ce qui l’entoure, la personne peut être dérangée par différentes manifestations comme une sensation de vision brouillée, une mauvaise évaluation des reliefs. Par ailleurs, l’agnosie visuelle peut s’accompagner d’un rétrécissement du champ visuel et parfois de l’apparition d’une héminégligence visuelle. La personne malade a des difficultés pour détecter, identifier et donc s’orienter vers des stimuli qui sont dans la moitié de l’espace, du côté opposé à l’hémisphère cérébral lésé. Exemple : les personnes qui ne mangent systématiquement que la moitié de leur assiette. L’ensemble de ces troubles, qui peuvent être précoces dans la maladie, pose un problème majeur pour la conduite automobile.
Cela signifie que la personne ne sait pas identifier ce qu’elle touche. Si elle s’accompagne d’une agnosie visuelle, la personne dispose de peu de moyens pour comprendre son environnement.
Dans ce cas, les odeurs ne sont pas reconnues. Chez le malade, ce trouble peut réduire son envie de s’alimenter.
Il s’agit de est l’incapacité de reconnaître les bruits (musique, parole, sonnerie…) que le malade déclare pourtant entendre.
La maladie se caractérise par des troubles progressifs de l’humeur, du sommeil, voire des troubles délirants (voir le tableau p. 36).
En pratique, le diagnostic repose sur une évaluation neuropsychologique, une IRM cérébrale et un bilan biologique plasmatique.
En permettant l’instauration d’un traitement précoce, le diagnostic précoce est le seul moyen aujourd’hui de ralentir l’évolution de la maladie. En cas de troubles de la mémoire, une démarche diagnostique doit être proposée :
→ aux personnes se plaignant de ressentir une modification récente de leur cognition (langage, mémoire, raisonnement, reconnaissances…) ou de leur état psychique (dépression, anxiété, phobies…) ;
→ aux personnes dont l’entourage a remarqué l’apparition ou l’aggravation de troubles cognitifs ou un changement psychocomportemental non expliqué par une maladie psychiatrique ;
→ aux patients venus consulter ou hospitalisés pour chute, syndrome confusionnel, accident vasculaire cérébral, etc. ;
→ à l’entrée et en cours de séjour en structure.
Conduite par le médecin traitant, elle repose sur deux types d’évaluation :
→ une évaluation fonctionnelle afin d’apprécier le retentissement des troubles cognitifs à l’aide de l’échelle simplifiée des activités instrumentales de la vie quotidienne (IADL pour Instrumental Activities of Daily Living). Ce test évalue les activités suivantes : utilisation du téléphone, utilisation des transports, prise de médicaments, gestion des finances. En cas de troubles cognitifs repérés à au moins un des quatre items, une aide pour le patient doit être mise en place ;
→ une évaluation cognitive globale. L’outil de référence est le MMSE (Mini-Mental State Examination), qui ne préjuge d’aucune étiologie. D’autres tests brefs de repérage peuvent être utilisés : test des cinq mots (contrôle de l’encodage, dissociation de la récupération et du déficit mnésique), test de l’horloge (fonctions exécutives), test de fluence verbale (aphasie sémantique, phonétique), etc.
Si les troubles cognitifs sont avérés, une imagerie morphologique systématique doit être réalisée afin de ne pas méconnaître l’existence de lésions vasculaires. Des examens biologiques (TSH, hémogramme, CRP, calcémie, natrémie, albuminémie, bilan rénal) sont également préconisés afin de dépister des pathologies pouvant entraîner des troubles cognitifs rapidement réversibles avec la mise en place d’un traitement adapté. Un dosage de vitamines B12, B9, un bilan hépatique, une sérologie syphillitique, VIH ou de la maladie de Lyme, peuvent être prescrits en fonction du contexte.
En cas de suspicion de MAAD, il convient d’adresser la personne à une consultation spécialisée : centre mémoire ou libéral où seront réalisés différents tests et examens permettant de poser le diagnostic étiologique, dont dépend la prise en charge :
→ une évaluation fonctionnelle afin d’apprécier le retentissement des troubles sur les activités de la vie (échelle IADL, etc.) ;
→ une évaluation psychique et comportementale (recherche de dépression, troubles affectifs, troubles du sommeil, etc.) ;
→ une évaluation neuropsychologique permettant de déterminer chacun des troubles cognitifs du patient : la mémoire épisodique, la mémoire sémantique, les fonctions exécutives, l’attention, les fonctions instrumentales (langage, praxie, gnosie, calcul)… Ces tests permettent de distinguer des patients atteints de la maladie d’Alzheimer, même à un stade très précoce, des personnes saines ;
→ une imagerie morphologique si elle n’a pas été faite. En cas de démence atypique ou s’il existe un doute sur une dégénérescence fronto-temporale ou autre atrophie focale, une imagerie par tomographie de positons (TEP) peut être proposée ;
→ une analyse du liquide céphalorachidien est recommandée en cas de doute diagnostique et en particulier chez les patients jeunes, afin de doser notamment des protéines (Tau) totales et phosphoryles et la protéine amyloïde (peptide 42). Dès le début de la maladie, des anomalies de concentration de ces deux protéines sont observées. La concentration en peptide bêta-amyloïde est diminuée alors que celle de la protéine Tau est augmentée.
En l’absence de traitement curatif, la prise en charge vise à maintenir l’autonomie et à améliorer la qualité de vie du malade ainsi que de l’entourage. Un traitement médicamenteux peut être proposé afin d’essayer de retarder l’évolution de la maladie, de stabiliser transitoirement les fonctions cognitives et de contrôler les troubles du comportement. La prise en charge humaine, psychologique et sociale des patients et de leur entourage est essentielle.
Les traitements sont institués à dose minimale et la posologie est éventuellement augmentée progressivement jusqu’à la dose maximale préconisée et tolérée.
Indications
Ils empêchent l’action de l’acétylcholinestérase, qui détruit l’acéthylcholine, molécule jouant un rôle clé dans la mémorisation (transmission de l’information entre neurones). Ils ont une action modeste, mais supérieure à un placebo - ils seront d’ailleurs déremboursés en août (lire page suivante). Ils sont indiqués dans les formes légères à modérément sévères. Les inhibiteurs de l’acétylcholinestérase regroupent trois molécules : le donépézil (Aricept et génériques), la galantamine (Reminyl
→ Gastro-intestinaux : diarrhée et nausées (vomissement, dyspepsies, douleurs abdominales avec Exelon).
→ Cardiovasculaires : bradycardie, hypertension avec Reminyl.
→ Neuropsychiatriques : céphalées, hallucinations, agitation, agressivité, vertiges, insomnie, syncope, tremblements, somnolence, léthargie, hallucinations, dépression…
→ Cutanés : rash, prurit (hypersudation avec Reminyl).
→ Un surdosage (par erreur ou en croyant augmenter l’effet du médicament) peut entraîner une crise cholinergique : nausées sévères, vomissement, salivation, transpiration, bradycardie, hypotension, dépression respiratoire, collapsus et convulsion.
Le glutamate est un neurotransmetteur qui jouerait un rôle dans les fonctions d’apprentissage et de mémorisation. Mais, à trop haute dose, il peut entraîner la mort des neurones.
La seule molécule proposée, la mémantine (Ebixa et génériques), bientôt déremboursée (lire ci-contre), est indiquée dans les formes modérées et sévères. La primoprescription est réservée à des médecins spécialistes. Un électrocardiogramme est recommandé avant la prescription d’un inhibiteur de la cholinestérase chez des patients ayant des antécédents cardiaques, bradycardes ou sous traitements bradycardants (bêta-bloquants, etc.)
→ Gastro-intestinaux (constipation).
→ Cardiovasculaires (hypertension).
→ Neuropsychiatriques (somnolence, sensation vertigineuse, céphalée).
→ Un surdosage peut entraîner faiblesse, fatigue, diarrhée, confusion, sensation ébrieuse, somnolence, vertige, agitation, agressivité, hallucination, troubles de la marche…
Ils ne devraient être prescrits qu’après échec des autres mesures non médicamenteuses en présence de troubles perturbateurs (cris, agitation, agressivité, déambulation, hallucinations, perturbation du rythme veille/sommeil…). Or une « prescription par excès des neuroleptiques » existe dans tous les pays, rappelle le programme AMI Alzheimer de la Haute Autorité de santé en 2010. En France, 18 % des malades Alzheimer prenaient des neuroleptiques en 2010 et jusqu’à 27 % des résidants en Ehpad
Il n’est pas toujours évident d’attribuer certains symptômes à une dépression plutôt qu’à la MA. Les antidépresseurs sont prescrits en cas de dépression, de comportements d’agitation, de désinhibition, d’anxiété et d’instabilité. Les posologies sont adaptées à l’âge du patient et non à la maladie d’Alzheimer elle-même.
Les benzodiazépines sont utilisées avec précaution en raison du risque de majoration de l’état confusionnel. Les molécules à demi-vie courte (moins de vingt heures) sont privilégiées (clotiazépam, oxazépam, lorazépam, alprazolam…) en cure courte pour des cas d’agitation aiguë.
En cas de troubles du sommeil isolés, l’intérêt du recours aux hypnotiques à durée d’action courte (zolpidem, zopiclone, témazépam…) doit être régulièrement réévalué.
Il s’adresse au patient et/ou à l’entourage. Ce soutien psychologique peut être instauré dès l’annonce du diagnostic ou tout au long de la maladie dans le cadre des consultations mémoire, en hospitalisation ou en accueil de jour, en Ehpad, en Centre médico-psychologique, en Centre local d’information et de coordination ou en cabinet libéral, par le biais d’associations (association France Alzheimer), etc.
Elle a pour objectifs :
→ le maintien de la communication avec le patient pour prévenir l’apparition de troubles du comportement réactionnels ;
→ la prise en charge des troubles de la déglutition ;
→ le maintien et l’adaptation des fonctions de communication du patient (comme le langage ou la parole) ;
→ l’aide à la famille et aux soignants dans le but d’adapter leur comportement aux difficultés du malade.
Elle peut être proposée à tous les stades de la maladie. Sous forme de mises en situation ou des simulations de situations vécues (trajet dans le quartier, toilette, téléphone, etc.), la stimulation cognitive est adaptée aux troubles du patient et vise à ralentir la perte d’autonomie.
Une kinésithérapie préventive est recommandée dès l’apparition des difficultés d’équilibre et de marche avec un effet bénéfique, non seulement sur la prévention du risque de chute, mais aussi sur certaines aptitudes fonctionnelles et certains aspects du comportement.
Toute dégradation de l’état physique (douleur, anxiété…) comme les facteurs psychosociaux et environnementaux doit être rapidement identifiée et traitée car cela peut générer ou aggraver les comportements à risque.
(1) Santé publique France, “La maladie d’Alzheimer et les autres démences”, dossier publié en 2016 (lien raccourci : bit.ly/2GnaItz).
(2) Site Internet : www.frcneurodon.org
(3) Site Internet : inserm.fr
(4) Santé publique France, “Maladie d’Alzheimer et démences apparentées”, Bulletin épidémiologique hebdomadaire, n° 28-29, 20 septembre 2016 (via le lien raccourci bit.ly/2LsGuJy).
(5) Carol Brayne et al., “Dementia in Western Europe : epidemiological evidence and implications for policy making”, The Lancet Neurology, janvier 2016, vol. 15, n° 1, pp. 116-24 (via le lien bit.ly/2GLYYkF).
(6) Fondation pour la recherche sur Alzheimer : alzheimer-recherche.org
(7) Inserm, via le lien bit.ly/2s5SdFM
(8) France Alzheimer, via le lien bit.ly/2s7H7jx
(9) Inserm, via le lien bit.ly/2GRdxmS
(10) Haute Autorité de santé, “Réévaluation des médicaments indiqués dans le traitement symptomatique de la maladie d’Alzheimer”, Commission de la Transparence, Rapport d’évaluation, 2011 (via le lien bit.ly/2kpbeyE).
(11) Fin avril, le laboratoire Janssen- Cilag a annoncé qu’il arrêterait de commercialiser le Reminyl à compter du 30 novembre 2018.
(12) HAS, via le lien raccourci bit.ly/2J7aPic
L’exposition à l’aluminium et aux solvants organiques peut-elle induire une maladie d’Alzheimer ?
La littérature en fait état mais rien n’a été prouvé.
Existe-t-il des facteurs protecteurs ?
Oui. Un niveau d’étude élevé, une vie sociale bien remplie, des activités intellectuelles régulières seraient des facteurs protecteurs, tout comme l’activité physique.
« Dès les premiers signes »
Dans son guide paru fin mai 2018 sur le parcours de soins des patients souffrant d’Alzheimer (lire Savoir plus p. 48), la Haute Autorité de santé met l’accent « sur les actions à visée diagnostique dès les premiers signes de la maladie et sur les soins et aides compensant le handicap notamment grâce aux thérapies psycho-comportementales et “réadaptatives” (traitements non médicamenteux) ». À noter : selon la HAS, « les professionnels de santé libéraux et les intervenants du domicile ont un rôle sentinelle dans le repérage des premiers signes de la maladie ou de [ses] signes d’aggravation ».
Dr Julien Delrieu, neurologue au centre de Casselardit, CHU de Toulouse (Haute-Garonne)
« Aujourd’hui, en moyenne, une personne atteinte de la MA est diagnostiquée avec un score MMSE (lire ci-dessous) de 19/30, c’est-à-dire globalement à un stade démentiel modéré, alors que les essais thérapeutiques en cours s’adressent à des patients avec des troubles cognitifs légers devant avoir un score MMSE supérieur à 24/30. Plusieurs raisons expliquent ce diagnostic tardif : des raisons culturelles d’abord, la MA étant une maladie de la mémoire banalisée, considérée comme due à l’âge ; ensuite, beaucoup de patients sont agnosiques et ne consultent pas ; enfin, l’efficacité modeste des traitements actuels n’incite pas les acteurs de soins primaires à adresser les patients pour une évaluation cognitive. Pourtant, le diagnostic précoce est essentiel, pour anticiper les complications de la maladie, en particulier les problématiques de la vie de tous les jours, par exemple la conduite automobile, et/ou pour anticiper la mise en place d’un réseau d’aide à domicile. Il permet en outre de proposer aux patients une prise en charge cognitive et de s’inscrire dans des programmes de recherche. Car les essais actuels sont réalisés sur des personnes ayant des troubles légers voire asymptomatiques. »
Exelon dispositif transdermique (rivastigmine) est indiqué dans le traitement des formes légères à modérément sévères de la maladie d’Alzheimer.
→ Mise en garde
Des cas d’erreurs médicamenteuses et d’usage inadapté des dispositifs transdermiques, ou patchs, d’Exelon ont été rapportés, dont certains ont entraîné des surdosages en rivastigmine. Ces erreurs sont le fait des professionnels de santé, des personnes aidantes et des patients eux-mêmes. Les causes les plus fréquentes sont l’oubli de retrait du patch, l’application de plus d’un dispositif à la fois, viennent ensuite l’application sur des zones cutanées non recommandées ou sur une même zone cutanée pendant plusieurs semaines, le découpage du dispositif transdermique, et les erreurs de dose lors de la prescription ou la délivrance.
→ Précautions d’emploi
Il est important que les professionnels de santé informent les patients et les aidants de la bonne utilisation des dispositifs transdermiques, en particulier :
- n’appliquer qu’un seul patch par jour sur une peau saine et sur une des zones corporelles recommandées : le haut ou le bas du dos, le haut des bras ou la poitrine ;
- remplacer le dispositif par un nouveau après 24 heures, en retirant le patch en place avant l’application d’un nouveau sur une zone cutanée différente ;
- éviter l’application sur la même zone cutanée pendant quatorze jours afin de limiter le risque d’irritation cutanée ;
- ne pas découper le dispositif transdermique.
Les médicamentsanti-Alzheimer déremboursés
La rivastigmine, le donépézil, la galantamine, la mémantine et leurs génériques (250 références) ne seront plus du tout remboursés à partir du 1er août, selon le Journal officiel du 1er juin. En 2011, leur prise en charge avait déjà baissé de 65 à 15 %, en restant à 100 % en ALD (l’ALD concernant moins de la moitié des malades).
La Haute Autorité de santé avait, en 2016, jugé insuffisant leur service médical rendu, avec « des effets indésirables potentiellement graves ». L’argent ainsi économisé devrait être consacré àl’accompagnement des patients. Avant que cette décision ne soit officialisée, cinq fédérations professionnelles et sociétés savantes avaient appelé à réexaminer les données de la science, et France Alzheimer évoqué « un effet [de ces produits] sur les symptômes » de la maladie, ajoutant : « La prescription des médicaments participait grandement à maintenir un lien thérapeutique entre le médecin et le patient. »
Dr Julien Delrieu, neurologue au centre de Casselardit, CHU de Toulouse (Haute-Garonne)
Plusieurs essais thérapeutiques ont été menés ces dernières années dans la maladie d’Alzheimer. Sans succès. Pourquoi ces échecs ?
D’abord, parce que ces essais ont inclus des personnes qui n’avaient certainement pas toutes la maladie, le diagnostic étant réalisé sur des données exclusivement cliniques : bilan cognitif, IRM… Or ces données ne sont pas assez précises. On sait que le diagnostic est erroné dans 30 % des cas. Ensuite, on intervenait trop tardivement, chez des patients qui avaient des troubles cognitifs importants, suffisants pour impacter leur autonomie. Sachant que des dégénerescences neurofibrillaires et des plaques amyloïdes se développent quinze à vingt ans avant l’apparition des premiers signes cliniques, la perte neuronale est à ce stade trop importante pour obtenir une efficacité thérapeutique.
Est-ce à dire que les essais en cours sont réalisés chez des personnes ayant des symptômes cognitifs légers ?
Absolument. On peut distinguer deux catégories d’études, celles qui s’adressent à des personnes présentant des troubles cognitifs légers et celles qui s’adressent à des personnes asymptomatiques et paucisymptomatiques. En l’absence de troubles cognitifs, les personnes volontaires sont retenues dans l’essai parce qu’elles présentent des biomarqueurs de la MA positifs : peptide 42, Tau et Tau phosphorylée. On peut également utiliser l’imagerie moléculaire, afin d’identifier les plaques amyloïdes. Ces marqueurs sont anormaux avant même que les patients développent les symptômes. Plusieurs essais thérapeutiques chez des patients avec des troubles cognitifs légers sont en cours, dont EPAD (European Prevention of Alzheimer’s Dementia), auquel nous participons, et deux autres études, Emerge et Engage, actuellement en phase 3, qui ont montré des résultats très intéressants avec une stabilisation des troubles cognitifs en phase précoce. Les résultats sont attendus pour 2020.
Quelles sont les molécules testées ?
Dans EPAD, Emerge et Engage, comme dans près de 50 % des essais, les molécules testées agissent sur la plaque amyloïde. Il s’agit soit d’anticorps monoclonaux anti-amyloïde en injection, soit de molécules administrées par voie orale, susceptibles de limiter la production des plaques. Parmi les autres cibles thérapeutiques, la protéine T au fait l’objet de nombreux développements.
Un autre champ de recherche concerne les interventions non médicamenteuses. De quoi s’agit-il ?
Il s’agit d’études évaluant une prise en charge nutritionnelle, une activité physique et une stimulation cognitive en prévention des troubles cognitifs. Deux études se dégagent : l’une, Finger, chez des personnes à haut risque de démence (MA ou une autre origine), et une autre étude, finlandaise, qui a montré chez des personnes non démentes avec des facteurs de risques cardiovasculaires un impact positif d’une intervention associant une activité physique intensive, une stimulation cognitive et des conseils nutritionnels. À noter que, dans l’étude MAPT (Multidomain Alzheimer Preventive Trial) menée en 2010 à Toulouse, nous avions observé le bénéfice d’une intervention multidomaine associée à une supplémentation en oméga 3 sur trois ans auprès d’un groupe de personnes qui avaient un déficit en oméga 3 (décelé par dosage érythrocytaire) et d’un autre groupe qui présentait des plaques amyloïdes à l’imagerie moléculaire. Ces interventions non médicamenteuses sont donc des alternatives intéressantes aux médicaments.