Un accord pour passer à la télé - L'Infirmière Libérale Magazine n° 348 du 01/06/2018 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 348 du 01/06/2018

 

ASSURANCE MALADIE

Actualité

Adrien Renaud  

La télémédecine et le reste à charge zéro, deux dossiers brûlants sur le bureau du directeur de l’Assurance maladie. Face à lui, les médecins, les dentistes… et prochainement les Idels.

C’est peu de dire que Nicolas Revel est actuellement au four et au moulin. Le directeur de la Caisse nationale d’Assurance maladie (Cnamts) vient en effet de mettre la dernière main à un accord sur la télémédecine avec les syndicats de médecins libéraux, tout en finalisant un projet de convention avec les dentistes pour concrétiser le “reste à charge zéro” promis par Emmanuel Macron pendant sa campagne électorale*. Les quatre-vingt-dix minutes de discussion qu’il a accordées le 25 mai à l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis) n’étaient donc pas de trop pour déblayer ces sujets brûlants.

Concernant la télémédecine, les négociations qui durent depuis le début de l’année ont abouti à un accord qui était en cours d’examen par les instances des différents syndicats au moment où nous mettions sous presse.

L’enjeu porte sur deux types d’actes : les téléconsultations et la téléexpertise. Les premières devraient dès le mois de septembre être prises en charge par l’Assurance maladie au même tarif qu’une consultation normale. Les téléexpertises, qui sont des avis donnés par un médecin à un autre sur la base d’un dossier médical, devraient quant à elles être facturées 12 euros pour un acte dit “simple”, et 20 euros pour un acte plus complexe.

Rattraper le retard en matière de téléconsultation

Nicolas Revel semble satisfait de ce résultat. « Projetons-nous dans l’hypothèse où le texte sur la télémédecine serait signé : nous n’aurions plus de retard par rapport à ce qui se fait dans les pays voisins en matière de téléconsultation », déclare le patron de l’Assurance maladie aux membres de l’Ajis. Il estime que les progrès sont encore plus significatifs en ce qui concerne la téléexpertise. « À ma connaissance, aucun autre pays n’a inscrit dans le droit commun ce type d’acte », affirme-t-il.

Télémodalités à discuter avec les Idels

Il reconnaît également que l’accord en cours de conclusion sur la télémédecine risque de le contraindre à ajouter un sujet à l’ordre du jour des actuelles négociations conventionnelles avec les infirmières libérales. Le texte mentionne en effet la possibilité qu’un professionnel de santé soit présent aux côtés du patient pendant la durée d’une téléconsultation. « Cette présence ne doit pas être systématique, mais il me semble tout à fait normal que, lorsqu’une infirmière prend le temps d’assister un patient, elle soit évidemment rémunérée », affirme Nicolas Revel. Les modalités et le montant de cette rémunération devront donc être discutés avec les infirmières libérales. Voilà qui ne semble pas de nature à hâter la conclusion de ces négociations (lire en encadré).

Les dentistes obligés de compenser

Concernant le reste à charge zéro, Nicolas Revel estime que les restes à charge élevés que l’on observe actuellement pour les prothèses dentaires s’expliquent par les plafonds trop bas imposés aux actes conservateurs ou aux actes de prévention. Les dentistes sont donc selon lui obligés de compenser cette sous-évaluation en survalorisant les actes à tarif libre comme les prothèses. Le cœur de l’accord, qui devrait être signé en juin, consistera donc à augmenter les tarifs des soins conservateurs pour pouvoir introduire des plafonds sur ceux des prothèses.

« Toute la population pourra choisir d’être soignée sans reste à charge, comme c’est le cas quand vous allez voir un professionnel de santé qui est à tarif opposable, se félicite Nicolas Revel. On est en train de ramener ces professionnels à cette règle qui fonde le modèle de Sécurité sociale à la française. »

Le principal syndicat de dentistes (la Fédération des syndicats dentaires libéraux) a déjà annoncé qu’il quittait la table des négociations. Mais il ne dispose pas d’un pouvoir de blocage à lui tout seul. Les deux autres syndicats représentatifs ont dit vouloir signer le texte.

* Les audioprothésistes et les opticiens, eux aussi concernés par cette promesse, négocient directement avec le ministère de la Santé.

ET LES NÉGOCIATIONS AVEC LES IDELS DANS TOUT ÇA ?

Occupé comme il l’est avec les médecins et les dentistes, Nicolas Revel a moins de temps à consacrer aux négociations conventionnelles avec les Idels, pourtant ouvertes depuis l’été dernier. Le directeur de la Cnamts a reconnu devant les journalistes de l’Ajis que certaines discussions pouvaient prendre du temps, « à plus forte raison quand on négocie avec un grand nombre de professions en même temps ». Ce qui ne l’empêche pas de se montrer optimiste. « Nous avons un travail avec les Idels qui se poursuit avec une échéance fixée fin juin, rappelle Nicolas Revel. Mais si c’est le 15 juillet, ce sera le 15 juillet, et si ça doit être le 20, ce sera le 20. » La télémédecine devrait être ajoutée à l’ordre du jour (lire ci-dessus). Ce nouveau sujet ne semble pas de nature à hâter la conclusion de “négos” déjà peu simples. Illustration avec la question des indemnités kilométriques : pour conserver le principe de la facturation « en étoile », qui permet de comptabiliser un trajet aller-retour cabinet-domicile pour chaque patient au lieu de prendre en compte la distance d’un domicile à l’autre, les syndicats d’Idels ont dû accepter, en mars, un double système de plafonnement du nombre de kilomètres facturables en une journée qui ressemble à une usine à gaz. En l’état actuel des discussions, les Idels parcourant plus de 275 km par jour devraient appliquer, à partir de cette limite, un abattement de 50 % sur les kilomètres. Au-delà de 400 km par jour, l’abattement passerait à 100 %.

info +

Les sages-femmes revalorisées

Un avenant 4 à la Convention nationale des sages-femmes a été signé fin mai, représentant 22,1 millions d’euros de revalorisations. Entre autres avancées, la consultation passera en 2019 de 23 à 25 euros, au même tarif que les médecins donc. À noter, par ailleurs : « La communication entre les sages-femmes libérales et les caisses d’Assurance maladie sera renforcée par la création de comités départementaux », se félicite l’Organisation nationale syndicale des sages-femmes.