ORGANISATION DES SOINS
Sur le terrain
Enquête
Quand sonne l’heure des vacances, l’Idel doit prévoir son remplacement, prévenir les patients, adapter le planning avec les consœurs. Une adaptation d’autant plus nécessaire à la mer ou à la montagne, où arrivent en nombre les touristes. Témoignages et conseils.
Qui dit départ en vacances, dit adaptation de la tournée. « Nous sommes trois sur la nôtre, décrit Lucienne Claustres-Bonnet, infirmière libérale à L’Isle-sur-la-Sorgue (Vaucluse) et présidente de l’Union régionale des professionnels de santé (URPS)-infirmiers Provence-Alpes Côte d’Azur. Lorsque nous prévoyons de partir en vacances, nous ne prenons jamais de remplaçante, nous n’en n’avons pas besoin car nous nous relayons. » Même organisation pour Laurence Varela, Idel à Six-Fours-les-Plages (Var).
« Nous sommes deux, avec mon associée, et nous nous arrangeons entre nous, rapporte-t-elle. Nos maris sont dans le commerce, ils ne peuvent pas prendre plus de deux semaines de vacances consécutives, ce qui nous permet, entre nous, de nous remplacer. » Elles travaillent ainsi depuis quinze ans. À leurs débuts, pourtant, elles avaient pris une remplaçante. « L’expérience s’est mal passée, reconnaît Laurence Varela. Ce n’est pas qu’elle faisait mieux ou moins bien que nous, mais elle ne faisait pas pareil, ce qui ne plaisait pas à nos patients. Nous n’avons pas voulu renouveler l’expérience. » Dans certains territoires, il est parfois difficile d’avoir recours à une remplaçante. « Nous ne pouvons pas prendre de remplaçante en zone de montagne, du moins en hiver, car l’exercice est difficile, il faut savoir conduire sur des routes enneigées, explique Maryse Souvy, Idel à Bozel (Savoie). Nous en avions trouvé une, mais elle n’a pas voulu rester, et je ne le souhaitais pas non plus, car elle ne savait pas conduire sur la neige. »
Si remplaçante il y a, il est important de toujours la rappeler quelques semaines puis quelques jours avant le début de sa prise de fonction, afin de s’assurer de sa présence. « J’ai des remontées de terrain d’infirmières qui m’informent que la remplaçante prévue n’est jamais venue », rapporte Lucienne Claustres-Bonnet. Dans ces cas-là, il n’y a pas grand-chose à faire, si ce n’est s’arranger avec ses collègues quand c’est possible. « L’été, nous avons une remplaçante qui vient en support, raconte Claude Bougeard, Idel au Teich (Gironde), dans le bassin d’Arcachon, qui travaille avec deux autres infirmières. Nous la cherchons dès les mois de février-mars pour nous assurer de ses disponibilités. »
Faut-il donner des consignes à la remplaçante ? Non. Il s’agit simplement de l’inviter à s’intégrer et à s’adapter. « Elle doit se rendre chez les patients en respectant les horaires et l’organisation mise en place par les Idels [titulaires], estime Lucienne Claustres-Bonnet. Chaque infirmière a ses manies : les remplaçantes ne doivent pas ajouter les leurs mais adopter les nôtres. » Il est alors impératif de prendre le temps, en amont, de passer en revue la prise en charge des patients avec la remplaçante et de faire, au moins une fois, la tournée avec elle, surtout à la campagne. Pour faciliter le passage de relais, les Idels peuvent envisager d’alléger la tournée. « Mieux vaut réduire le nombre de patients ou, au moins, ne pas forcément trouver de nouveaux patients pour remplacer ceux qui sont partis, afin de gérer sereinement les urgences et les éventuels patients supplémentaires, notamment dans les régions touristiques », conseille Lucienne Claustres-Bonnet.
Si le cabinet a l’habitude de travailler avec la remplaçante à laquelle il a fait appel, les infirmières peuvent partir en vacances plus sereinement et plus facilement éteindre leur téléphone. S’il s’agit d’une nouvelle remplaçante, mieux vaut laisser son portable allumé pour les appels ou résoudre les problèmes à distance, par exemple rassurer les patients mécontents de ne pas voir leur infirmière habituelle. « Nous avons un téléphone de cabinet mais le mien reste toujours allumé, même pendant mes vacances, témoigne Caroll Boff, Idel à Carry-le-Rouet (Bouches-du-Rhône). Je ne décroche jamais complètement de mon métier, je considère que cela relève de ma responsabilité. » De retour de vacances, forcément, un peu plus de temps devra être consacré aux transmissions, que ce soit avec les collègues ou avec la remplaçante. En effet, en deux à trois semaines de congés, la prise en charge des patients a pu évoluer.
Concernant les patients habituels, les Idels doivent simplement les prévenir de leur absence prochaine. Mais que dire à leurs patients qui partent en vacances et auront besoin, ailleurs, de soins infirmiers ? « De contacter une infirmière sur leur lieu de vacances, plusieurs semaines avant leur départ, et de reconfirmer sa disponibilité quelques jours avant », suggère Caroll Boff. Pour fluidifier la prise en charge et faciliter le travail de sa consœur sur le lieu de vacances, l’Idel peut transmettre, avec l’accord du patient, des informations sur le traitement, le suivi, les protocoles, et laisser ses coordonnées.
Et à l’autre bout de la ligne, pour l’infirmière qui accueille, le temps d’un été, de nouveaux patients en villégiature ? « Si nous n’avons pas d’informations, nous appelons l’infirmière du patient, principalement pour connaître sa cotation, afin d’être dans la continuité », témoigne Caroll Boff, qui exerce dans une station balnéaire non loin de Marseille.
« Pendant les vacances d’été, lorsque des vacanciers nous appellent, nous arrivons toujours à les insérer dans notre planning. En effet, nous n’avons pas une grande tournée, car nous aimons prendre le temps avec nos patients », indique pour sa part Laurence Varela, installée au bord de la Méditerranée. Au Teich, le cabinet de Claude Bougeard a arrêté pendant deux ans de prendre des touristes en soins, « parce que ma collègue avait eu de mauvaises expériences avec des patients qui venaient pour des pansements entièrement recouverts de sable. Mais nous avons recommencé, en raison de la demande, et tout se passe très bien. » Et de préciser : « Lorsque nous recevons leurs appels, généralement pour des pansements ou des injections, nous convenons d’un rendez-vous, souvent en fin de journée. Cela les arrange car ils peuvent profiter de leur journée et nous aussi, car nous sommes sûrs qu’ils seront rentrés, malgré les embouteillages importants pendant l’été » dans le bassin d’Arcachon. C’est un peu plus rare pour ce cabinet de recevoir des appels de patients chroniques « mais, dans tous les cas, nous ne les prenons pas en charge, car nous ne pouvons pas les absorber dans notre tournée, tout comme les soins de “nursing” ».
L’arrivée massive de touristes, les Idels de montagne connaissent bien. « L’hiver, nous avons surtout des accidents de ski, donc beaucoup de traumatologie, avec des appels de dernière minute, ce qui nous oblige à effectuer des allers-retours entre notre cabinet et la station », témoigne Maryse Souvy, en Savoie. En hiver, l’une des infirmières de son cabinet reste à Courchevel, à une dizaine de minutes, pour seconder Patricia, infirmière qui travaille dans la station de ski. « Toute l’année, je prends en charge des “locaux”, raconte cette dernière. Mais, pendant la saison touristique, j’ai un afflux de vacanciers. Ceux-ci représentent environ la moitié de ma tournée, qui devient alors très importante. Quand c’est nécessaire, nous sommes deux, sinon, l’une est en repos quand l’autre travaille. Mais aucune ne s’éloigne pendant ses jours de congé, au cas où l’autre tomberait malade ou aurait un accident. »
La patientèle de Courchevel, station huppée, s’avère souvent très exigeante. Le cabinet infirmier s’en accommode. « Lorsqu’on nous appelle, nous sommes là dès le lendemain, explique Patricia. Les soins que nous dispensons sont généralement standards. Mais les touristes de Courchevel sont aisés et ils sont nombreux à avoir des exigences souvent non fondées, comme de demander un passage quotidien des professionnels de santé pour une jambe dans le plâtre. Nous nous adaptons ! »
À Mandelieu-la-Napoule, station balnéaire des Alpes-Maritimes, la population triple en été. « En 2009, nous nous sommes rendu compte que les patients, notamment les vacanciers, avaient des difficultés à trouver une Idel disponible, malgré notre référencement dans les PagesJaunes, indique Christine Bouchet-Lagrue, Idel installée dans la commune. Nous avons donc créé l’association Lila, pour Les infirmières libérales associées, avec un numéro de téléphone unique payé par nos cotisations. » Le numéro est publié dans le journal de la commune, les médecins et les pharmaciens le connaissent, les vacanciers qui ne trouvent pas d’Idels peuvent l’appeler. Les Idels assurent un tour de garde au téléphone, chacune pendant une semaine. Elles répondent aux appels, orientent les patients vers le cabinet approprié ou envoient un message aux autres membres de l’association (vingt-et-une, réparties dans dix cabinets) pour connaître leurs disponibilités. Si celle qui s’occupe du téléphone n’a pas de retour, elle prend le patient en charge. Ces Idels se sont aperçues que leur solution répondait à une problématique plus large, au-delà des vacances. Selon Christine Bouchet-Lagrue, l’association génère une dynamique de remplacement, facilite l’organisation des cabinets et suscite solidarité et confiance entre les Idels. Par exemple, quand une Idel de l’association a fait une péritonite, les autres ont pris le relais pour sa tournée. En 2009, la majorité des Idels de la commune a adhéré. « Aujourd’hui, les nouvelles installées ne cherchent pas à nous rejoindre mais tout se passe bien entre nous », indique Christine Bouchet-Lagrue, présidente de Lila, en précisant que lorsque personne n’est disponible au sein de l’association, il est fait appel aux autres Idels de la commune.
Les astuces des autorités « pour un été sans souci »
Morsures, piqûres, menaces sur la chaîne du froid, dangers de l’océan et du soleil… Les autorités de santé renouvellent leurs conseils estivaux (lien : bit.ly/2M7UGa6).
Des précautions pour les médicaments à l’étranger
« Emporter les médicaments dans leur boîte avec la notice, se munir de l’ordonnance, préférer une ordonnance rédigée en dénomination commune internationale », tels sont quelques-uns des conseils de l’Agence nationale de sécurité du médicament dans son bulletin Vigilances n° 74 de juillet 2017 (lien : bit.ly/2HK8fdx), en cas de voyage hors des frontières françaises. Mieux vaut aussi éviter d’acheter des médicaments à l’étranger sans avis médical. Et, en cas de maladie chronique, de prévoir des quantités suffisantes. À ce sujet, une procédure permet aux pharmaciens de délivrer, aux patients se rendant à l’étranger, une quantité de médicaments pour une durée supérieure à un mois, sous conditions et sauf exceptions (bit.ly/2Mm1l1H). Enfin, en plus des habituelles contraintes de conservation, le patient devra s’enquérir de la possibilité ou non de transporter à l’étranger ses produits, et sous quelles conditions, au regard de la législation locale, sous peine de risquer la case amende ou prison. Le Foreign and Commonwealth Office, organe officiel outre-Manche, rappelle ainsi que « le diazépam, le tramadol, la codéine et un certain nombre d’autres médicaments couramment prescrits sont des “drogues contrôlées” » dans de nombreux pays, y compris la Grèce, indique The Telegraph du 7 juin (bit.ly/2JTjRjC).
Une boîte à aiguilles format voyage
À partir de mi-juillet, les patients peuvent retirer gratuitement en pharmacie de nouvelles boîtes à aiguilles, « pleinement adapté[es] aux déplacements estivaux », se félicite l’éco-organisme Dastri. En effet, ces boîtes d’une dizaine de centimètres et d’une contenance de 0,5 L (contre 1,5 L ou 2 L habituellement) « prennent peu de place dans la valise ». Et peuvent même se glisser « dans un sac de plage »…