L'infirmière Libérale Magazine n° 349 du 01/07/2018

 

SOINS PALLIATIFS

Actualité

Laure de Montalembert  

Face à un patient atteint d’une pathologie grave, voire en fin de vie, les infirmières libérales se sentent trop souvent seules et démunies. Les axes principaux d’amélioration de leur exercice passent par un dialogue plus fluide entre les différents intervenants du soin.

Pour parler de la réalité de l’exercice des infirmières libérales sur le terrain dans les situations de fin de vie, rien ne vaut un exemple concret. C’est à cet exercice que s’est attelée Fanny Fresa-Fert, Idel dans les Hautes-Alpes, lors de son exposé au dernier congrès de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) à Marseille (Bouches-du-Rhône), en juin. Il s’agit d’un homme de 44 ans, pris en charge pour un cancer ORL. Durant des mois de soins jusqu’au décès de celui-ci, les infirmières du cabinet se trouvent confrontées à « un manque criant de communication et de coordination avec les autres acteurs de santé, la non-prise en compte des symptômes d’inconfort du patient, l’absence de relais local et de prescriptions anticipées, la mauvaise gestion de l’urgence, déplore l’oratrice. La solitude des infirmières face à des situations palliatives complexes est trop fréquente, entraînant une souffrance, un épuisement, voire un renoncement. La fin de vie peut-être parfois très violente pour le patient, la famille et les soignants ».

Multiplication de bilans inutiles

Dans cette histoire, la famille a reproché aux infirmières libérales, devenant les contacts de proximité, de ne pas l’avoir assez bien informée. Mais comment relayer des informations alors que le dossier infirmier et les fiches de liaison fournies aux autres acteurs du soin ne sont jamais remplis, lus ni complétés ? Multiplication des bilans sanguins qui sont parfois faits en double, manque de communication avec le médecin traitant, absence de référent clairement défini sont quelques-uns des éléments qui n’ont pas permis une prise en charge satisfaisante. Un triste constat que ne démentira pas Karine Dormois, Idel en Provence. Pour elle, anticiper et coordonner sont deux maîtres-mots pour améliorer la situation. Anticiper en ayant les molécules à disposition en cas d’évolution prévisible, par exemple. Des molécules qui ne sont pas toujours disponibles en pharmacie. Mais aussi soutenir les proches en leur faisant connaître les aides financières et humaines dont ils peuvent bénéficier.

Simplifier les échanges

Développer les équipes mobiles et les réseaux de soins palliatifs permettrait également aux patients d’être pris en charge plus précocement et de manière plus efficace. Systématiser la fiche de liaison entre les professionnels impliqués serait un bon début pour cette Idel qui espère vivement que l’essor attendu du dossier médical partagé simplifiera les échanges entre les acteurs de santé.

Enfin, exercer comme infirmier de soins palliatifs demande un savoir-faire. Karine Dormois plaide ainsi pour une facilitation de la formation des libéraux : « Nous avons besoin d’être conseillées et soutenues. » Mais où en est la France dans sa gestion des soins palliatifs ? Pour répondre, Marie-Claude Daydé, infirmière libérale et membre de l’équipe du réseau Relience à Toulouse* (Haute-Garonne), commence par un bilan des axes du plan national 2015-2018 : soutenir les professionnels de santé, développer les soins palliatifs en établissements et les conforter en hospitalisation à domicile, faciliter les coopérations. L’intervention conjointe Ssiad et HAD va d’ailleurs devenir possible, dans le but affiché d’éviter les passages du patient de l’un à l’autre selon son parcours (lire pp.8-9).

Un numéro de téléphone unique

Côté coordination, les choses devraient bouger aussi. Les projets territoriaux comme les maisons de santé pluriprofessionnelles sont ainsi encouragés. Des plateformes territoriales d’appui, dont les réseaux locaux de soins palliatifs seront des acteurs importants, doivent également se multiplier (lire notre numéro de février). Leur rôle : « faciliter, pour les équipes de soins primaires, le recours aux expertises et aux coordinations », mais aussi « faciliter la mobilisation des prestations médicales, médico-sociales et sociales utiles au patient et à ses aidants ». Avec ces structures, le médecin traitant pourrait également bénéficier d’un numéro de téléphone unique en cas de besoin d’informations ou de conseils. Celui-ci pourrait alors s’occuper de cette coordination tant attendue.

* Par ailleurs membre de notre comité scientifique. Réseau Relience Toulouse : www.relience.fr.

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