En octobre prochain, Catherine Leblay prendra part au rallye Cap Fémina, un raid solidaire 100 % feminin au cœur du désert marocain. Une envie qui est née à la suite d’un diagnostic du syndrome de Gougerot-Sjögren posé par son médecin.
« SI VOUS PENSEZ QUE L’AVENTURE EST DANGEREUSE, JE VOUS PROPOSE D’ESSAYER LA ROUTINE… ELLE EST MORTELLE. » Cette citation de Paolo Coelho, Catherine Leblay, infirmière libérale normande de 55 ans, l’a faite sienne. Elle participera d’ailleurs, en octobre prochain, au rallye Cap Fémina Aventure, au Maroc. Une épreuve sans compétition où le chronomètre et le classement importent peu. Seule contrainte : rejoindre deux points de passage obligés en un minimum de kilomètres. « J’ai toujours eu cette envie de courir un rallye, reconnaît Catherine Leblay qui est fan de 4x4 tout-terrain. En trente ans de métier, j’ai dû effectuer trente fois le tour de la Terre sans bouger de mon village ! »
C’est dans ce petit bourg de la Manche (de 1 800 habitants), situé entre Granville et Coutances, que Catherine Leblay a ouvert son cabinet en 1988. Depuis, elle a été rejointe par deux associées. Une vie somme toute “normale” d’infirmière libérale en milieu rural… jusqu’en 2013. Cette année-là, l’Idel ressent une grosse fatigue, des douleurs, ainsi qu’une certaine sécheresse buccale et oculaire. Des symptômes qu’elle associe à son hyperactivité professionnelle. Mais, à la suite d’une consultation médicale, le verdict tombe : il s’agit du syndrome de Gougerot-Sjögren (lire l’encadré en bas de page). « Une maladie invisible pour les autres mais qui se trouve être très invalidante, précise Catherine Leblay. Par exemple, je suis obligée d’utiliser de la salive artificielle pour parler, et j’ai dû adapter ma nourriture car je ne peux manger que des aliments mous. Et je n’ai plus de larmes, ce qui provoque des kératites consécutives à la sécheresse oculaire… »
L’infirmière aurait pu lever le pied mais c’est là une option qu’elle refuse. Au contraire, elle se réfugie entièrement dans le travail au quotidien : « J’ai serré les dents et, pour ne pas trop gamberger, je me suis noyée dans le boulot… C’est d’ailleurs encore le cas aujourd’hui. » C’est la lecture d’un article publié dans la revue éditée par l’Association française du Gougerot-Sjögren (AFGS) qui lui ouvre les portes du désert marocain. « Une patiente atteinte de ce syndrome racontait son expérience au rallye des Gazelles. J’ai commencé à la suivre sur les réseaux sociaux et j’ai fini par la contacter pour lui demander des informations complémentaires et l’interroger sur ces éléments que je croyais hostiles et handicapants en raison de cette maladie : le sable, la chaleur… Elle m’a rassurée », raconte l’infirmière.
Catherine Leblay en parle dès le lendemain à Magali Tasset, l’une de ses associées. « C’est pour 2018 ou jamais », s’empresse-t-elle d’ajouter. Banco ! Ensemble, elles choisissent le rallye Cap Fémina Aventure et son aspect plus solidaire avec les habitants des villages marocains traversés. Avant la pré-inscription, l’infirmière consulte tout de même son médecin traitant. Ce dernier l’encourage et lui répond qu’il était grand temps de penser à autre chose qu’au travail : « Lui qui me voyait toujours surbookée a trouvé l’idée géniale. »
Tout comme le Pr Xavier Mariette, rhumatologue au CHU de Kremlin-Bicêtre, en région parisienne, et spécialiste du syndrome de Gougerot-Sjögren, que Catherine Leblay consulte régulièrement. « Il n’y a aucune contre-indication, m’a t-il précisé. Bien au contraire : cela mettra en veille la maladie. » C’est donc en toute confiance que les deux infirmières libérales se lancent dans la recherche de sponsors. Première étape : créer leur association “Les Fées placebo”
Depuis, des commerçants et des entreprises locales ont participé à la collecte dont l’objectif est de récolter 18 000 euros. Aujourd’hui, 12 000 euros ont été collectés… en partie grâce aux patients : « Chacun nous a offert dix ou vingt euros qui, mis bout à bout, ont permis de rapporter 2 000 euros. » Pour les remercier, elles apposeront sur leur véhicule un calicot en forme de cœur, portant le nom de tous les donateurs. Catherine Leblay a aussi reçu, de son opticien, une paire de lunettes à chambre humide : « Elles protègent du sable et, surtout, maintiennent le peu d’humidité dans mes yeux. Comme on n’en trouve pas encore en France, il a fait appel à l’un de ses amis qui a fait venir les lunettes des États-Unis, et il les adaptera à ma vue. C’est sa manière de participer ! » Au cours de leur campagne de parrainage, Catherine a profité des rencontres sur les marchés pour sensibiliser les gens à cette maladie rare qui reste peu connue du grand public. « Si nous obtenons plus d’argent que nécessaire, on fera un don à l’AFGS », promet l’Idel. Le compte à rebours est lancé: en septembre, Catherine suivra un stage de formation à la conduite sur dunes et d’apprentissage à la lecture du road-book, puisque le GPS est interdit pendant la course. Catherine Leblay va vivre là sa plus belle aventure. Avant de reprendre ses tournées dans la campagne normande. D’ailleurs, sa façon de voir les patients a changé depuis la découverte de sa maladie. « Je suis encore plus à l’écoute de ceux qui ont des pathologies invisibles, parce que je me reconnais en eux », confie-t-elle.
* Site Internet : www.lesfeesplacebo.com / Facebook : Les Fées placebo
Il s’agit d’une maladie auto-immune caractérisée par une atteinte de l’ensemble du système glandulaire exocrine. Sous sa forme primaire (lorsqu’elle n’est pas associée une autre maladie auto-immune), elle est considérée comme une maladie rare. Le SGS se manifeste souvent par un syndrome sec touchant plus particulièrement les glandes salivaires et lacrymales. Les symptômes les plus fréquents : la sécheresse, la fatigue et les douleurs articulaires et/ou musculaires. Si la cause est inconnue, on estime qu’il peut être dû à une interaction entre des facteurs génétiques et environnementaux ou, peut-être, l’exposition à certains virus.
Source : www.afgs-syndromes-secs.org