La connaissance de l’insuffisance cardiaque par les patients, le grand public et les soignants mérite d’être approfondie pour combattre cette pathologie. Le Groupe d’insuffisance cardiaque et cardiomyopathies (Gicc) de la Société française de cardiologie alerte et mise sur un réseau ville-hôpital pour améliorer la prise en charge.
« L’insuffisance cardiaque est une pathologie peu connue des Français mais il s’agit d’un problème de société pourtant majeur », a souligné le Dr Thibaud Damy, président du Gicc, lors d’une conférence organisée le 5 septembre. 70 000 morts, 120 000 nouveaux cas et 165 000 hospitalisations par an : ce sont 1,5 million de Français qui sont concernés. Deux études réalisées par le Gicc révèlent que les premiers symptômes de l’insuffisance cardiaque ne sont pas reconnus, ni par les Français, ni par les médecins, comme étant en rapport avec cette maladie cardiaque, ce qui contribue à un retard de prise en charge.
Quatre symptômes doivent alerter et nécessitent l’avis d’un cardiologue s’ils sont réunis : essoufflement, prise de poids, œdèmes et fatigue sans raison, résumés par l’acronyme EFOP. Par ailleurs, l’insuffisance cardiaque semble être un diagnostic peu formulé de manière claire par les professionnels de santé. Selon l’enquête du Gicc, une fois hospitalisés, seuls 43 % des patients concernés déclarent avoir été informés par l’équipe médicale être atteints d’insuffisance cardiaque.
À cette méconnaissance de la maladie s’ajoute un parcours de soins non structuré en ville comme à l’hôpital. La prise en charge des patients est majoritairement réalisée dans l’urgence pour 43 % d’entre eux. Seuls 22 % sont pris en charge par des unités spécialisées en soins intensifs de cardiologie ou de réanimation. Pour améliorer la visibilité de la filière, le Gicc recense, sur son site www.giccardio.fr et son application “Mon cœur”, les structures y participant. « Nous voulons également trouver des relais en ville auprès des cardiologues libéraux et travailler avec des Idels pour optimiser la prise en charge », explique le Dr Damy. Le Gicc et l’Agence pour la formation continue des professionnels infirmiers libéraux (Afcopil) ont lancé un programme de développement professionnel continu afin « que les Idels sachent gérer au mieux les patients en soin cardiaque, précise le médecin. Les Idels sont indispensables pour permettre un retour à domicile des patients. Elles y participent déjà dans le cadre du Prado, mais leur formation doit être approfondie. » Le Gicc souhaiterait que les Idels formées – une trentaine par région actuellement – soient identifiées afin de créer un réseau ville-hôpital.
Il est également impératif, d’après le Gicc, qu’au sein des unités spécialisées des structures hospitalières, des compétences soient transférées des médecins aux infirmiers. « À la vue de la prévalence, il n’est pas possible pour le cardiologue hospitalier de recevoir son patient tous les quinze jours pour adapter son traitement, rapporte le Dr Damy. Le transfert de compétences permettrait aux infirmiers de le faire. » Ces infirmiers “spécialisés” pourraient également surveiller les données de santé des patients, transmises par des outils connectés, comme la balance qui permet de prévenir les récidives. Cette pratique existe déjà depuis un an à l’hôpital Henri-Mondor (Val-de-Marne) pour le télémonitoring et les traitements, mais sous surveillance médicale. La demande de transfert de compétences est en cours de validation à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, avant d’être envoyée à l’Agence régionale de santé puis à la Haute Autorité de santé.