L'infirmière Libérale Magazine n° 351 du 01/10/2018

 

LA VIE DES AUTRES

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Sandrine Lana  

Après une carrière dans la représentation médicale, la Nîmoise Sandra Fontalba se lance comme franchisée dans un nouveau défi professionnel : elle devient directrice d’un centre de diététique « pas comme les autres ».

Sandra Fontalba nous accueille dans son centre de diététique, petit cocon aux couleurs violettes et rosées, situé à proximité du CHU de Nîmes (Gard). Dans la salle d’attente est posé un livre d’or noirci par les petits mots des anciennes patientes (80 % de femmes) qui ne tarissent pas d’éloges pour l’aide reçue afin de leur faire perdre du poids ou de rétablir une alimentation saine. C’est en juillet 2012, après une reconversion professionnelle forcée mais salvatrice, que tout commence pour Sandra Fontalba. « J’ai été visiteuse médicale durant huit ans. Je rencontrais les médecins pour leur proposer des produits en lien avec les maladies ORL, l’allergologie et la dermatologie, à la ville et à l’hôpital. C’estun plan social qui m’a obligée à me réorienter. » Elle recherche alors une nouvelle activité en lien avec son parcours, « où [elle] pourrai[t] continuer à être en contact avec le monde médical ». Elle entend parler du groupe Éthique et Santé qui recherche des franchisés pour ouvrir des centres de rééducation nutritionnelle psycho-comportementale (RNPC). Ces centres privés de diététique accueillent des personnes en surcharge pondérale sur prescription par leur médecin. L’accompagnement dure en moyenne six mois. « On est dans le soin via l’alimentation et toutse base sur la science. Quand on sait que 85 % des diabètes pourraient être éradiqués s’ils étaient pris en charge, et que trois Français sur quatre sont en surpoids, on se dit qu’il y a du boulot. »

Rapidement convaincue par le sérieux du franchiseur Éthique et Santé, l’ancienne salariée passe le cap de l’entrepreneuriat et ses contraintes. Elle se lance corps et âme dans l’activité indépendante en 2012, mère et enceinte d’un second enfant. « On peut être mère de famille et chef d’entreprise, il faut juste une grande organisation. »

« J’ai une marge de manœuvre »

La franchise peut aussi rassurer lorsqu’on se lance dans une telle aventure. « J’ai été formée et suis en lien avec le franchiseur qui développe le programme régulièrement, explique-t-elle en soulignant l’indépendance qu’elle a gardée. En tant que franchisée, j’ai une marge de manœuvre dans le fonctionnement de mon centre. Je m’adapte pour faire avancer mon entreprise. » Sandra s’est entourée de Marie-Laure et Marine, toutes deux détentrices d’un DE en diététique, pour prendre en charge les patients. « J’ai décidé de m’entourer de femmes par affinité, d’autant que notre clientèle est à 80 % féminine. J’ai remarqué que les femmes étaient plus à l’aise face à une autre femme pour aborder leur situation. Mais, dans d’autres centres RNPC, il y a aussi des hommes. » Les diététiciennes reçoivent les patients pendant leur programme de perte de poids environ toutes les deux semaines et, par la suite, elles font un suivi régulier de ceux qui le souhaitent. Pendant ce temps, Sandra, forte de sa formation de visiteuse médicale, peut revenir sur des cas cliniques problématiques et rédiger des rapports réguliers aux médecins qui lui envoient des patients.

Lors de réunions régulières avec son équipe, Sandra transmet les informations utiles au bon déroulement du programme. « Je traite surtout des pathologies liées à la surcharge pondérale ou bien à une nouvelle formulation d’un médicament qui pourrait influencer le comportement d’un patient. Cela a notamment été le cas lors du changement de formulation du Lévothyrox où l’instabilité thyroïdienne d’un patient ne devait pas être confondue avec une possible lassitude au programme diététique qu’il suivait. » La directrice passe également beaucoup de temps hors du centre, entre les visites des médecins et les tâches inhérentes à son rôle de chef d’entreprise. « Je n’ai pas de journée type. Mais je vais régulièrement sur le terrain rencontrer les médecins car, s’ils ne vous connaissent pas, ils ne vous enverront pas de patients. Je leur apporte des informations sur l’adipocyte, notamment. Le but de la visite est de les former sur la question et sur les traitements possibles, dont celui du centre.La directrice fait un boulot direct qui favorise le travail de prévention. Comme les médecins ne se basent que sur des preuves scientifiques, je dois me tenir au courant des nouveautés, des dernières publications. »

Après six ans d’activité indépendante, Sandra est fière du travail accompli, notamment d’avoir pu créer deux emplois salariés. Mais elle ne cache pas que le lancement a été rude et qu’elle n’a pas compté ses heures pour faire tourner son entreprise. Cependant, « quand on est dans un secteur d’activité qui nous plaît, on n’a pas l’impression de travailler », relativise-t-elle. ?

En toute franchise…

Le franchiseur est un indépendant à l’origine de la création d’un concept ; le franchisé est désireux de réitérer et d’exploiter le concept du premier. En 2017, il y avait 74 102 franchisés sur le territoire, dont 76 % sont d’anciens salariés, qui ont créé leur entreprise. C’est donc un véritable levier de reconversion professionnelle. Ces entreprises feraient mieux face à la concurrence des grands groupes, grâce à l’appui d’un réseau d’autres franchisés et d’une maison-mère. Ainsi, 90 % des enseignes franchisées passent le cap des cinq ans d’activité. Dans le secteur de l’aide à la personne, les franchises représentent 11 % du marché. D’après une étude de la Fédération française de la franchise, le franchisé type est un homme ancien salarié (57 % des cas) de 47 ans qui a minimum un bac + 2 en poche et dont la rémunération est de 2 825 euros nets mensuels. Trois textes régissent la franchise : le Code de déontologieeuropéen de la franchise, l’article L 330-3 du Code de commerce (dit Loi Doubin) et le règlement d’exemption concernant les restrictions verticales n° 330/2010.

Sources et infos : www.franchise-fff.com

Elle dit de vous !

« Je reçois des Idels parmi mes patients du centre. Elles arrivent souvent en surcharge pondérale, ayant peu vu grandir leurs enfants, exténuées. Je crois qu’il y a des similitudes entre les Idels et nous, indépendantes. Mais même si, au début, les horaires sont très contraignants lors de l’ouverture du centre, ensuite, on ne reçoit pas de patients à 5 heures du matin comme elles. Être à notre compte nous permet d’avoir beaucoup d’autonomie et un contact, une approche du patient différents. Les médecins sont reconnaissants de notre travail. Une Idel pourrait selon moi parfaitement devenir directrice d’un centre. En France, le DE est très important pour acquérir de la légitimité auprès des médecins, et elles l’ont. De plus, elles sont des professionnelles du soin. Leurs gestes techniques seraient, en diététique, transformés en gestes verbaux, en conseils. Cela me paraît une reconversion possible. »