Départ à la retraite ou envie d’arrêter son activité, l’infirmière libérale peut procéder à la vente de sa patientèle. Mais, pour ne pas avoir de problème, cette vente doit être réalisée dans les règles de l’art.
La vente de la patientèle entre dans le cadre de la cession du “fonds libéral” de l’infirmière libérale. Il se rapproche d’un fonds de commerce dans le sens où il est composé à la fois de biens corporels et de bien incorporels. Il comprend la clientèle, le matériel et le local professionnel. En décidant de céder ce fonds libéral, l’Idel transfère la propriété de son cabinet à l’acquéreur. Pour que la cession du fonds libéral soit considérée comme valide, il faut respecter le principe fondamental du libre choix du professionnel de santé par le patient.
Il existe deux types de cessions.
→ Tout d’abord, la cession totale qui concerne celle de l’ensemble des éléments corporels (matériels, mobilier) et incorporels (patientèle, droit au bail) attachés au fonds libéral. Les éléments incorporels comprennent 100 % de la patientèle, le droit au bail ou encore les lignes téléphoniques. Quant aux éléments corporels, c’est-à-dire ceux permettant l’exercice professionnel, ils incluent les instruments, le mobilier ou encore des documents servant à l’exploitation du fonds.
→ La cession partielle ne concerne, quant à elle, que certains éléments attachés au fonds et qu’une partie de la patientèle. Le contrat conclu entre les deux parties doit donc spécifier le pourcentage de patientèle cédé à l’acquéreur. Si jamais le cédant exerce avec d’autres infirmiers, mieux vaut préciser le pourcentage que la patientèle cédée représente au regard de l’ensemble de la patientèle des infirmiers exerçant en commun.
Pour que la cession et l’exercice de la future propriétaire du cabinet se passent au mieux, il est impératif de respecter certaines obligations.
Par exemple, si l’Idel cédant son cabinet travaille déjà avec d’autres infirmiers dans le cadre d’un exercice commun, l’acquéreur doit préalablement s’assurer que le contrat d’exercice ne prévoit pas, pour la reprise, une clause de préférence pour un ou plusieurs des infirmiers. Si ce contrat préexiste à la cession du fonds, obtenir l’accord de toutes les Idels associées pour la cession permet de s’assurer d’une meilleure ambiance de travail pour la suite de l’exercice. Comme le précise l’Ordre national des infirmiers, le contrat d’exercice en commun doit en principe prévoir, en cas de refus des associés, que ces derniers s’engagent à acquérir la patientèle selon les mêmes modalités (notamment financières) ou à trouver un cessionnaire qui le fera. Si le contrat ne prévoit pas la nécessité de solliciter l’agrément par d’autres associés, ces derniers ne peuvent pas s’opposer à la vente.
Par ailleurs, si l’infirmier cédant partiellement son fonds libéral exerce jusqu’à présent seul et si, avec l’acquéreur, ils prévoient d’exercer ensemble auprès d’une même patientèle, un contrat d’exercice en commun doit être conclu entre eux. En effet, le contrat de cession ne régit aucunement les relations de travail entre les infirmiers. Le contrat d’exercice en commun va ainsi établir les modalités de cession, le sort de la patientèle en cas de décès ou de séparation, les conditions d’exercice (établissement du planning…).
La cession de clientèle civile peut se faire sous la forme d’un acte sous seing privé. Il existe des formalités obligatoires de l’enregistrement auprès de l’administration fiscale ainsi que de la transmission de l’acte signé au Conseil départemental de l’Ordre des infirmiers.
La pratique veut que le prix de vente de la patientèle soit calculé sur la base du chiffre d’affaires moyen brut des trois dernières années d’exercice de l’Idel vendeuse. Généralement, l’acheteur débourse entre 30 et 50 % du chiffre d’affaires pour acquérir la patientèle.
Néanmoins, d’autres critères peuvent influencer le prix, comme l’emplacement du cabinet vendu, les possibilités de développement du cabinet, l’ancienneté de la patientèle, la diversité des soins et des cas traités, la situation concurrentielle. À la somme, il faut ajouter le coût du matériel.
Avant de se mettre d’accord sur un prix, l’acquéreur peut demander au vendeur de vérifier certains documents qui permettront de définir le montant le plus juste. Il peut ainsi exiger d’avoir accès à la déclaration 2035 des trois dernières années, au relevé du Système national inter-régime communiqué par la Caisse primaire d’Assurance maladie, qui récapitule les honoraires perçus par l’Idel pour l’année écoulée, et enfin au Relevé individuel des activités précisant la nature des actes effectués (AMI, AIS, DI), les prescriptions, les patients et le coût total de l’activité. Dans tous les cas, le prix de la cession relève de la liberté contractuelle.
Une fois d’accord, le cédant et le cessionnaire doivent conclure une promesse de cession. Cette dernière doit indiquer :
→ l’identité des deux parties impliquées ;
→ le prix de la patientèle incluant celui du matériel ;
→ la date de la signature définitive de la cession ;
→ les modalités de règlement ;
→ le montant de l’indemnité en cas de désistement de l’une des deux parties.
Obligatoire, le contrat de présentation régit la cession de la patientèle. Il doit reprendre les éléments de la promesse de cession, c’est-à-dire pour le vendeur :
→ informer sa patientèle de la passation et présenter son successeur ;
→ remettre son fichier patientèle en totalité ;
→ présenter son successeur à son réseau professionnel : médecins, pharmaciens, réseaux de soins, prestataires de service ;
→ remettre le droit au bail ;
→ céder le matériel du cabinet ;
→ respecter la clause de non-concurrence : clause de non-réinstallation dans un secteur géographique donné sur une période de deux à cinq ans ;
→ faire paraître une ou deux annonces dans la presse locale pour prévenir de son départ et de la cession.
Pour le successeur :
→ verser le montant prévu par le contrat ;
→ régler les droits d’enregistrement de l’acte de cession auprès des impôts ;
→ régler les frais de rédaction d’actes.
Les contrats ayant pour objet l’exercice de la profession doivent être transmis au CDOI.
Pour gérer les questions délicates liées à la cession du cabinet, par exemple estimer la valeur de la patientèle, rédiger le contrat de présentation ou encore transmettre les contrats, il peut être opportun de faire appel à un professionnel du droit. Il ne s’agit en aucun cas d’une obligation, mais il peut veiller à éviter les litiges futurs, notamment en faisant en sorte que le contrat signé corresponde aux attentes de chacune des parties.
Plus d’informations sur le site de l’Ordre infirmier, via le lien bit.ly/2D9pgkc