L'infirmière Libérale Magazine n° 355 du 01/02/2019

 

LA VIE DES AUTRES

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Laure Martin  

Infirmière de service médical (ISM) à l’Assurance maladie depuis un an, Sabrina Odienne a trouvé cet emploi par le biais d’une petite annonce. Une nouvelle fonction qui l’a éloignée des soins. Mais sa participation à la prise en charge du patient la satisfait complètement.

Diplômée en 2006, Sabrina Odienne intègre le service pédiatrique du centre hospitalier de Montmorency (Val d’Oise) avant de s’orienter deux ans plus tard dans un service de soins infirmiers à domicile (Ssiad). « Cette activité m’a permis de m’autonomiser, mais les soins étaient souvent identiques et j’étais souvent seule », reconnaît-elle. Elle rejoint alors le service d’hématologie de l’hôpital de Pontoise, où elle travaillera pendant sept ans avant d’intégrer le service des grossesses à haut risque. « J’ai fait une grande partie de ma carrière hospitalière de nuit, et après une dizaine d’années, j’ai eu envie de changer pour enrichir mon cursus professionnel et améliorer ma vie de famille, en ayant des horaires “normaux” », explique Sabrina Odienne. C’est en regardant régulièrement des offres d’emploi qu’elle prend connaissance de celle du service médical de l’Assurance maladie. « J’ai postulé sans trop savoir à quoi m’attendre », souligne-t-elle. Après un entretien téléphonique avec la responsable des ressources humaines, elle se rend à Paris pour un autre entretien et intègre en décembre 2017 le service médical, basé à Cergy-Pontoise.

Le contrôle des prestations

Les infirmières de service médical (ISM) ne dispensent pas de soins. Leur activité consiste surtout à préparer les dossiers pour faciliter le travail du médecin-conseil. Pour l’ensemble de leurs travaux, elles s’appuient sur des décrets et des circulaires afin de garantir une équité entre les assurés. Les ISM assurent principalement un contrôle des prestations ; elles examinent les situations d’assurés sociaux en arrêt maladie de moins de 180 jours. « C’est le personnel administratif du service médical qui nous adresse les dossiers des assurés pour lesquels un contrôle est nécessaire, rapporte Sabrina Odienne. Si pour certains, la convocation est évidente, ce n’est pas le cas pour tous. » L’ISM appelle l’assuré ou son médecin prescripteur, analyse la consommation de soins, les rendez-vous chez les médecins spécialistes, etc. En fonction de ces informations, elle oriente le dossier sur la nécessité ou non de recevoir l’assuré afin d’évaluer la justification médicale de l’arrêt. Une évaluation préalable par un entretien avec l’assuré peut également être réalisée par l’infirmière mais il appartient au médecin-conseil de prendre la décision finale. « Lors de ces échanges, nous détectons parfois des situations à risque de désinsertion professionnelle et nous aidons ainsi l’assuré à entreprendre des démarches auprès du service social et de la médecine du travail », explique l’infirmière.

Les ISM reçoivent aussi les assurés atteints de pathologies chroniques à huit mois d’arrêt de travail. « C’est l’occasion de déterminer si la personne pourra reprendre un travail et de l’aider dans ses démarches », indique Sabrina Odienne. Elles participent également au contrôle des affections de longue durée (ALD), afin de savoir si la demande est conforme aux conditions réglementaires.

« Il faut savoir être diplomate car parfois les médecins de ville et les assurés ne comprennent pas les décisions du service médical, notamment les raisons qui nous ont conduit à mettre fin à une ALD, explique l’ISM. Avec ce travail, je participe à la prise en charge globale de l’assuré. Certes, nous contrôlons des prestations, mais nous effectuons aussi un travail d’accompagnement. »

Les échanges avec les professionnels

Les ISM assurent par ailleurs des échanges téléphoniques avec les professionnels de santé. Par exemple, « le pôle « Relations avec les professionnels de santé » du service médical peut nous contacter pour nous informer que tel médecin va pour la première fois recevoir un patient dans le cadre du Prado insuffisance cardiaque/respiratoire, indique Sabrina Odienne. Nous avons alors un échange téléphonique avec ce praticien pour lui expliquer le dispositif et lui envoyer de la documentation. » Les ISM sont aussi amenées à se rendre, en équipe, dans les établissements de santé pour les aider à mettre en place le Prado dans leurs services.

Pour l’instant, elles n’échangent pas avec les infirmières libérales. Néanmoins, lorsque les Idels posent des questions sur la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) à l’Assurance maladie, « nous réceptionnons les mails et nous les recontactons pour répondre à leurs interrogations, en ayant préalablement fait valider notre réponse par le médecin référent », précise Sabrina Odienne. L’un des projets à l’étude serait que les ISM aillent à la rencontre des Idels nouvellement installées, dès 2019, afin de les accompagner dans leurs démarches.

Quelle formation ?

L’ISM est un métier très récent. C’est en décembre 2015 que l’Assurance maladie a commencé à expérimenter cette nouvelle fonction afin « d’optimiser la ressource médicale » et de « renforcer la capacité d’action du service médical », d’abord dans trois régions puis dans toute la France. Lorsqu’une ISM arrive dans le service médical de l’Assurance maladie, elle travaille avec un tuteur - un médecin-conseil -, avec lequel des échanges sont programmés deux fois par semaine pendant environ deux mois. « Nous sommes formées sur toutes nos missions par les médecins-conseils et le personnel administratif, souligne Sabrina Odienne. Les premiers entretiens que nous effectuons avec les assurés sont réalisés en présence de notre tuteur. » Toutes les ISM ayant intégré le service depuis moins de six mois bénéficient également d’une formation nationale de quinze jours. Elles peuvent également demander des formations ponctuelles. « J’en ai demandé une sur les échanges confraternels afin de savoir comment parler mieux avec les praticiens », indique Sabrina Odienne. On compte actuellement 142 ISM sur tout le territoire.

Elle dit de vous !

« J’ai envisagé de devenir infirmière libérale avant de venir au service médical mais je me suis vite rendue compte que ce mode d’exercice ne serait pas compatible avec ma vie de famille tant que mes enfants seraient en bas âge car les horaires sont contraignants. Mais je pourrais l’envisager dans quelques années, en effet. L’autonomie, la rigueur et l’organisation font partie des qualités requises pour être infirmière mais les libéraux doivent en plus acquérir des connaissances en matière de gestion et de comptabilité. Ils doivent effectuer les soins mais aussi gérer le côté administratif, souvent fastidieux, et travailler sur une large amplitude horaire. Que nous soyons infirmiers hospitaliers, libéraux ou du service médical, nous intervenons tous à des moments clés dans le parcours de soins du patient. »