L'infirmière Libérale Magazine n° 355 du 01/02/2019

 

CAHIER DE FORMATION

Savoir

En fonction des substances responsables et du terrain de chaque patient, les allergies se manifestent par des symptômes de localisation et d’intensité variables. Les prises en charge sont souvent tardives, augmentant les possibilités d’évolution vers une maladie plus sévère. Le rôle des infirmières peut s’inscrire à différents niveaux, essentiels. Il peut s’agir de relayer l’information (précautions à prendre, reconnaissance des symptômes…) mais aussi de savoir réagir face à un tableau clinique évoquant une allergie.

LES DIFFÉRENTS TYPES D’ALLERGIES ET LEURS MÉCANISMES BIOLOGIQUES

L’allergie est une réaction de défense anormale de l’organisme face à une substance qu’il considère à tort comme nuisible. Cette substance, appelée allergène, peut être de natures très diverses (acariens, pollens, poils d’animaux, aliments, métaux, médicaments…) et est totalement inoffensive pour les personnes non-allergiques. Trois temps sont nécessaires pour que l’allergie apparaisse :

→ l’exposition du patient à l’allergène, préalable à toute réaction allergique ;

→ la phase de sensibilisation à l’allergène où aucun signe clinique n’est présent et où la maladie passe encore inaperçue ;

→ la phase de révélation (rupture de tolérance) où les symptômes se déclenchent.

Il existe deux formes d’allergies distinctes, sous-tendues par des mécanismes biologiques différents : les allergies immédiates et les allergies retardées.

Les allergies immédiates

Le système immunitaire « repère » l’antigène et commence à fabriquer (par l’intermédiaire des lymphocytes B effecteurs) des anticorps spécifiques contre lui : les immunoglobulines E (IgE). Ces IgE se fixent sur d’autres cellules du système immunitaire, les basophiles et les mastocytes. Lorsque l’organisme se trouve de nouveau confronté à l’allergène, ce dernier se lie aux IgE et ces cellules « dégranulent », c’est-à-dire qu’elles relarguent leurs granules préformés. Dans une réaction en cascade, elles libèrent de l’histamine et d’autres médiateurs de l’inflammation : les symptômes allergiques font leur apparition. Dans la plupart des cas, ces réactions allergiques ne frappent pas au hasard et sont liées à une prédisposition génétique. Le risque de les développer s’accroît dans les familles d’allergiques, sans que les enfants ne soient forcément réactifs aux mêmes allergènes que leurs parents. On parle de terrain atopique.

L’allergie immédiate prend différentes formes, selon l’allergène.

→ Allergies respiratoires : ce sont les plus fréquentes. En France, elles touchent 20 à 30 % de la population. Elles sont dues en premier lieu aux acariens, mais aussi aux pollens, poils d’animaux, blattes ou encore aux moisissures. Quel que soit l’allergène en cause, les manifestations sont les mêmes et peuvent être invalidantes. La rhinite - la plus courante - se traduit par différents symptômes dus à l’inflammation de la muqueuse nasale. Elle associe au moins deux des signes fonctionnels suivants : des éternuements en salve, un écoulement nasal incolore et très liquide (le « nez qui coule »), une congestion nasale, un prurit nasal. Très fréquemment, la rhinite allergique s’accompagne d’une conjonctivite allergique, qui se manifeste par des larmoiements, ainsi que des picotements et des démangeaisons au niveau des yeux. Les paupières sont souvent rouges, gonflées, parfois collées au réveil. Dans un tiers des cas, la réaction est plus sévère, avec la présence d’un asthme (voir la partie « Savoir faire » p. 42).

→ Allergies alimentaires : elles affectent 5 à 6 % des enfants et 2 % des adultes, des chiffres largement sous-évalués car ils ne tiennent pas compte des allergies alimentaires bénignes de type syndrome pomme-bouleau (lire l’encadré sur les allergies croisées, ci-contre). L’allergène peut déclencher des réactions immédiates de type urticaire et œdèmes (gonflement de la bouche, des yeux). Ces manifestations peuvent être accompagnées de troubles digestifs (vomissements, douleurs abdominales) parfois isolés. Des réactions plus sévères sont aussi susceptibles de survenir, comme l’œdème de Quincke. Ce gonflement de la muqueuse laryngée entraîne une détresse respiratoire et une modification de la voix. Et dans les cas les plus graves, c’est le choc anaphylactique : la vasodilatation se généralise à tous les vaisseaux de l’organisme, ce qui provoque un désamorçage de la pompe cardiaque et le décès du patient. Le délai d’apparition des symptômes est le même pour tous : il est souvent rapide, classiquement moins d’une heure.

→ Allergies médicamenteuses : (voir la partie « Savoir faire » p. 40). Les plus fréquentes sont des manifestations cutanées isolées, sans caractères de gravité.

→ Allergies aux venins d’hyménoptères : (abeilles, guêpes et frelons). Ces réactions n’interviennent pas forcément sur un terrain atopique et sont imprévisibles. Les piqûres d’hyménoptères peuvent aussi provoquer des réactions généralisées sévères : œdème de Quincke, gêne respiratoire sifflante évocatrice d’asthme, douleurs digestives avec nausées, vomissements, diarrhées. Dans les cas les plus sévères, un malaise avec éventuellement une chute de tension et une perte de connaissance est possible et un risque vital existe.

Les allergies retardées

Elles n’impliquent pas les immunoglobulines E, mais une activation des cellules de défense du système immunitaire, les lymphocytes T. Ces allergies concernent principalement la peau. On parle d’allergies cutanées de contact. Elles sont dues à l’application répétée d’un produit sur la peau, qui la sensibilise petit à petit, et provoque une réaction inflammatoire. Un eczéma apparaît sur les zones en contact avec les produits concernés qui sont variés. Il peut s’agir de métaux, de colorants, de produits professionnels ou ménagers. Les symptômes apparaissent au minimum 48 heures après le contact avec l’allergène. Ils se manifestent par des rougeurs à bords irréguliers, un prurit associé à une sécheresse cutanée ainsi que des petites cloques.

LE DIAGNOSTIC DES ALLERGIES

En fonction des terrains, les allergies sont plus ou moins sévères. La sévérité d’une allergie est déterminée par les symptômes, mais aussi leur impact sur le quotidien du patient. Elle peut avoir un retentissement sur le sommeil, la vie professionnelle ou encore les activités de loisirs comme le sport. La maladie est évolutive et toute allergie, même légère, est susceptible de s’aggraver. Elle doit faire l’objet d’un bilan chez un spécialiste afin d’établir un diagnostic précis et une prise en charge adaptée. Le diagnostic de l’allergie repose sur un faisceau d’arguments. L’enjeu est d’identifier l’allergène responsable des symptômes.

L’interrogatoire

Il vise à identifier les symptômes, les circonstances déclenchantes, les antécédents du patient et de sa famille, son environnement (condition de vie, exposition aux animaux domestiques, tabagisme passif…) et ses habitudes de vie. Cet entretien est déterminant et permet très souvent au médecin d’identifier quel est l’allergène incriminé. En cas d’allergie respiratoire, la période de l’année où il est gêné, par exemple, est très significative. De la même manière, dans les allergies alimentaires, la sévérité de la réaction et le délai avant l’apparition des symptômes oriente très fortement le diagnostic.

L’examen clinique

Le médecin ausculte les poumons (sifflements) et examine les yeux (conjonctivite, eczéma sur la paupière), le nez (aspect et couleur de la muqueuse, présence de polypes, obstruction) et la peau.

Les tests cutanés ou prick-tests

Ces tests consistent à mettre la peau du patient en contact avec l’allergène pour observer si une réaction se produit et ainsi confirmer la présence de l’allergie suspectée. L’allergologue dépose des gouttelettes d’extraits allergéniques, le plus souvent sur la face interne de l’avant-bras du patient (parfois dans le dos chez le nourrisson). Il pique ensuite l’épiderme, à l’aide d’aiguilles spéciales, au travers des gouttelettes. L’objectif est de reproduire sur la peau le phénomène qui se produit in vivo. Piquer la peau permet de toucher les mastocytes avec l’allergène. Pour lire correctement le résultat, l’allergologue utilise également une goutte d’une solution témoin négatif (glycérine) et une goutte témoin positif (histamine). En cas de réaction positive à l’allergène, une papule apparaît au bout de 20 minutes environ.

Le dosage sanguin des IgE spécifiques

Cette étape est presque systématiquement réalisée. L’allergologue prescrit une prise de sang pour mesurer les IgE spécifiques circulantes lorsque les tests cutanés sont en contradiction avec les éléments de l’interrogatoire.

Les tests de provocation

Il s’agit d’administrer l’allergène au patient pour provoquer une réaction et ainsi confirmer un diagnostic, en particulier dans les allergies alimentaires. Ces tests sont réalisés dans des conditions très strictes et contrôlées : en milieu hospitalier, dans des structures capables de prendre en charge des réactions allergiques graves, avec un personnel médical et paramédical qualifié. Les tests de provocation servent aussi à suivre l’évolution d’une allergie alimentaire. Les allergies des enfants disparaissent souvent quand ils grandissent. Les allergologues peuvent effectuer des prises de sang pour mesurer le taux d’IgE et si, à un moment donné, il est possible de tenter une réintroduction à l’hôpital. Les tests sont souvent effectués avec l’aliment frais sur le bras, ce qui est le protocole le plus fiable.

TRAITEMENTS DES SYMPTÔMES ALLERGIQUES

Ils sont de nature non-médicamenteuse et médicamenteuse.

Le traitement non-médicamenteux

L’éviction de l’allergène et les mesures pour limiter l’exposition

Supprimer la substance responsable de l’allergie, lorsqu’elle est identifiée, est toujours la première chose à faire, si cela est possible. On parle de mesures d’éviction. En cas d’allergie alimentaire, l’éviction implique l’exclusion totale de l’aliment ou des aliments du régime. Les substances responsables des allergies de contact doivent aussi être complètement écartées.

Dans les allergies respiratoires, l’éviction totale n’est pas possible (sauf dans le cas des animaux de compagnie, mais certains patients ne peuvent se résoudre à s’en séparer). Cependant, il est possible de prendre un certain de nombre de mesures pour limiter l’exposition à l’allergène.

En cas d’allergie aux acariens :

→ envelopper le matelas d’une housse en polyuréthane anti-acarien ;

→ bannir les couettes et oreillers en plumes ;

→ utiliser en complément des bombes anti-acariens ;

→ laver la literie deux fois par mois à 60 °C ;

→ aérer et nettoyer très régulièrement la chambre à coucher ;

→ éviter les descentes de lit et les moquettes, véritables nids à poussière et à acariens.

En cas d’allergie aux poils de chat :

→ éviter au maximum leur présence et leur interdire au moins la chambre.

En cas d’allergie aux pollens :

→ pendant la saison pollinique, aérer plutôt tôt le matin ;

→ éviter les plantes les plus allergisantes (cyprès, thuyas, bouleaux) ;

→ éviter de tondre le gazon ou le faire avec des lunettes et un masque de protection ;

→ jardiner avec des lunettes et un masque de protection ;

→ éviter toute entrée d’air dans la voiture pendant les déplacements.

Dans tous les cas, le lavage des fosses nasales et des yeux avec du sérum physiologique (pour nettoyer les muqueuses) et l’emploi de mouchoir à usage unique sont à recommander.

Le traitement médicamenteux

Il est établi par le médecin allergologue en fonction de l’expression des symptômes et de leur sévérité.

Allergies respiratoires

Traitement symptomatique de la rhinite/conjonctivite allergique : l’objectif du traitement est de calmer les symptômes qui peuvent être très invalidants.

→ Les antihistaminiques par voie orale : ils agissent en bloquant le récepteur H1 à l’histamine. Ils soulagent les éternuements, les écoulements nasaux ainsi que le prurit des yeux et de la gorge. Leurs effets cessent dès l’arrêt de la prise, car ils ne s’attaquent ni à la cause ni à la chronicité de la maladie allergique. Il existe deux générations d’antihistaminiques à prendre par voie orale. Ceux de première génération, dits anticholinergiques, sont généralement sédatifs. Mais les antihistaminiques non-anticholinergiques, dits de nouvelle génération (cétirizine, loratadine) et moins sédatifs que les antihistaminiques classiques, constituent le traitement de première intention. La cétirizine a une double indication, ORL et cutanée. Elle est parfois associée à un décongestionnant.

→ Les antihistaminiques par voie locale : en pulvérisation nasale, ils ont une action spécifique sur les éternuements et l’écoulement nasal, tandis que ceux sous forme de collyre agissent sur les larmoiements et les démangeaisons au niveau des yeux.

→ Les corticoïdes en pulvérisation nasale : ils sont utilisés pour leur action anti-inflammatoire, quand l’action des antihistaminiques est insuffisante.

→ Les cromones empêchent la libération d’histamine et d’autres substances initiatrices des réactions allergiques. Ils s’utilisent localement, en aérosol nasal.

Traitement de l’asthme : la plupart des asthmatiques suivent un traitement de fond à base de bronchodilatateurs longue durée d’action bêta-2 agonistes et de corticoïdes inhalés. La crise est traitée par un bronchodilatateur de courte durée d’action.

Allergies alimentaires

Des protocoles d’induction de tolérance dans les allergies alimentaires sont disponibles à l’hôpital pour les allergies sévères et au cabinet de certains allergologues pour les allergies plus bénignes. Mais pour de nombreux patients, l’éviction reste encore le traitement de base. Certaines personnes doivent toujours porter sur elles un traitement d’urgence - un stylo auto-injecteur d’adrénaline (épinéphrine) - afin de pouvoir réagir rapidement si un choc anaphylactique survient. L’adrénaline permet une vasoconstriction des vaisseaux et une remontée de la pression artérielle, ce qui enclenche un réamorçage de la pompe cardiaque. La prescription du stylo est décidée par le médecin en fonction du risque.

LA PLACE DE LA DÉSENSIBILISATION (OU IMMUNOTHÉRAPIE ALLERGIQUE)

La question de la désensibilisation peut se poser en fonction du type d’allergie, du traitement symptomatique nécessaire au patient et de son degré de gêne. Quand l’indication est bien posée, la désensibilisation permet une vraie prise en charge de l’allergie : elle améliore et évite l’aggravation des symptômes dans 60 à 70 % des cas, elle permet une diminution des traitements tant de fond que de crise, et prévient l’apparition de nouvelles allergies. Elle a pour objectif de traiter la maladie allergique à la racine qui amène progressivement le système immunitaire à ne plus réagir. Elle ne fonctionne cependant pas pour tous les allergènes. Si la désensibilisation ne donne pas de résultats satisfaisants contre les allergies aux poils d’animaux, son efficacité a été démontrée contre les acariens, les pollens d’arbre et les pollens de graminées. Elle s’adresse aux patients allergiques sévères, dont les symptômes sont mal contrôlés par les traitements symptomatiques. Les personnes qui ont recours à plusieurs traitements simultanés, sur une période assez longue de l’année, sont de bons candidats à la désensibilisation. Avant d’entamer toute désensibilisation, l’asthme doit être stabilisé grâce à un traitement de fond efficace.

La désensibilisation consiste à présenter la protéine allergisante à l’organisme, mais par une voie détournée qui ne provoque pas de réaction allergique. Depuis une dizaine d’années, la voie sublinguale, plus pratique et mieux tolérée, a remplacé la voie sous-cutanée (dont l’administration se faisait toutes les semaines, puis tous les mois, et nécessitait une surveillance du patient) dans la désensibilisation des allergies respiratoires. Le patient prend des gouttes qu’il garde deux minutes sous la langue avant de les recracher. Sous la langue se trouvent des cellules qu’on appelle présentatrices de l’antigène. Leur rôle est de présenter au système immunitaire des substances et de lui faire comprendre que ce sont des substances « amies ». La prise, quotidienne, va amener le système immunitaire à s’habituer à la présence de cette protéine et induire une tolérance. La thérapie se concentre sur l’allergène le plus problématique pour le patient. Le système immunitaire est stimulé tous les jours pendant plusieurs mois ou années. En réaction, il commence à produire des lymphocytes T régulateurs, qui viennent empêcher les lymphocytes B effecteurs de produire les anticorps dirigés contre l’antigène.

LES PRINCIPAUX ALLERGÈNES

Les substances capables de provoquer des allergies sont de natures très diverses. Pour les scientifiques, leur pouvoir de nuisance, qui s’intensifie, est lié à des modifications de l’environnement.

Les allergènes responsables d’allergies immédiates

Il s’agit de peptides. Dans l’organisme, il existe de très nombreux peptides : hormones, neurotransmetteurs, etc.

Les pneumallergènes (ou aéro-allergènes)

En suspension dans l’air, ils pénètrent dans l’organisme par voie aérienne et respiratoire et sont responsables des symptômes des allergies respiratoires. Parmi eux, on trouve principalement les acariens, les pollens, les phanères d’animaux et les moisissures.

Les acariens : ce sont les pneumallergènes les plus fréquents. Ils sont présents dans l’environnement intérieur des patients. Les acariens, microscopiques, vivent principalement dans les poussières de la literie mais aussi dans les peluches, les tissus d’ameublement et les moquettes. Leur développement est favorisé par l’humidité de l’air et les températures élevées (plus de 20 °C).

Les pollens : tous les pollens (qui assurent la fécondation des fleurs) ne sont pas allergisants. Les plus problématiques sont ceux des plantes anémophiles (comme l’ambroisie, à la fin de l’été), disséminés par le vent. Les plus gênants sont les pollens d’arbres (bouleau, noisetier, olivier, cyprès, frêne, etc.), au printemps, suivis de ceux des graminées (herbes, foin…), en juillet. Les patients ne sont pas allergiques à tous les pollens, mais à un ou plusieurs d’entre eux.

Les phanères d’animaux : le chat, le chien, mais aussi les nouveaux animaux de compagnie (NAC : lapins, cochons d’Inde, perroquets…) ou encore les chevaux peuvent entraîner des réactions allergiques. Le chat est le plus allergisant de tous. Les allergènes qu’il produit sont volatiles et ultra résistants : ils peuvent demeurer dans l’air ambiant de la maison jusqu’à six mois après le départ de l’animal.

Les moisissures : on les retrouve à l’extérieur et dans les intérieurs humides et mal aérés. Il est très difficile de s’en débarrasser.

Les trophallergènes

Ce sont les allergènes alimentaires, ils pénètrent dans l’organisme en étant ingérés. En théorie, tous les aliments peuvent provoquer une réaction allergique. Chez les enfants, ce sont le plus souvent les protéines du lait de vache et celles des œufs qui sont impliquées. À noter que dans leur grande majorité, les allergies à ces aliments cèdent à l’âge adulte. Chez l’adulte, on retrouve les fruits à coque (noix, amandes, noisettes, châtaignes, pistaches…) ou encore les fruits et légumes comme les rosacées (pommes, pêches, poires, abricots, cerises…) et les ombellifères (céleri, carottes…).

Les allergènes responsables d’allergies retardées

Ces allergènes ne sont pas des peptides, mais des molécules chimiques de bas poids moléculaire ou des métaux.

Les allergènes de contact : lorqu’ils sont mis au contact de la peau, ils provoquent des dermatites de contact. Il s’agit le plus souvent de métaux comme le nickel ou le chrome (bijoux fantaisie, bouton de jeans, fermeture éclair). De nombreux produits chimiques présents dans les cosmétiques (conservateurs, colorants, etc.) ou les produits ménagers peuvent aussi poser problème.

Et les allergies croisées ?

Certains patients vont présenter des réactions allergiques à une substance donnée, alors qu’ils sont sensibilisés à une substance apparentée. Le lien entre ces substances n’est pas toujours évident, mais il existe. Le système immunitaire reconnaît et réagit à des allergènes ayant une importante homologie de séquence protéique commune, qui leur donne la même antigénicité. Il est possible de rencontrer, par exemple, des allergies croisées entre pollens, entre latex et aliments ou entre pollens et aliments. Le cas le plus typique est celui du syndrome pomme-bouleau : on connaît désormais la protéine exacte dans le pollen de bouleau qui rend allergique. Elle a été séquencée et il a été démontré qu’elle présentait une homologie de séquence à 80 % avec la protéine de la pomme. Les allergies croisées ne sont pas présentes de manière systématique et ne sont pas un facteur de gravité pour le patient. Elles sont cependant invalidantes, car elles multiplient les situations potentiellement gênantes.

Question de patient

« Naît-on avec une allergie ou est-il possible d’en développer ? »

Il est possible de développer des allergies. L’organisme est en contact permanent avec les molécules de l’environnement, qu’il reconnaît et contre lesquelles il est immunisé, mais qu’il tolère en général parfaitement. Des cellules spécifiques (les lymphocytes T régulateurs) empêchent le système immunitaire de développer des réponses effectrices à leur encontre. De multiples facteurs (physiques, chimiques, psychologiques…) peuvent venir bloquer ces fonctions régulatrices : c’est la rupture de tolérance. Dans la plupart des cas, et pour des raisons encore mal connues, la maladie allergique ne dure pas toute la vie.

Vrai ou faux ? Une allergie peut se transmettre par un baiser

→ VRAI ! Quelques secondes ou minutes après avoir embrassé quelqu’un (sur la bouche ou la joue), des signes de réaction allergique peuvent surgir. C’est ce que les allergologues appellent le syndrome d’allergie induite par le baiser (SAIB). Les symptômes du syndrome sont légers dans 70 % des cas (picotements des lèvres et de la langue…) mais peuvent aussi être beaucoup plus sérieux (angio-œdème, bronchospasme, voire détresse respiratoire aiguë). Il s’agit en fait d’une allergie alimentaire par procuration, provoquée par les traces d’allergènes alimentaires présentes dans la bouche de la personne embrassée. Tous les aliments peuvent être en cause, en particulier les fruits comme la pomme et le kiwi, les fruits secs à coque (arachides, amandes, noisettes…), le poisson, les fruits de mer, les œufs, le lait de vache. Le SAIB est retrouvé chez les personnes touchées par les allergies à certains pollens (notamment au pollen de bouleau), en raison des allergies croisées. Le temps entre la consommation de l’allergène et le baiser est très variable, de quelques minutes à plus de deux heures.

Focus : le cas de l’allergie au latex

Certains produits, lorsqu’ils entrent en contact avec la peau, déclenchent une réaction allergique. Dans la plupart des cas, il s’agit d’une réaction retardée. Les protéines du latex sont, elles, capables de provoquer une réaction immédiate, qui peut se généraliser à tout l’organisme (jusqu’au choc anaphylactique). D’origine végétale, le latex se retrouve dans la composition de nombreux produits de la vie courante (gants, préservatifs, jouets…). Dans un tiers des cas, les personnes allergiques au latex présentent des allergies croisées à des protéines végétales alimentaires. La fréquence des allergies immédiates au latex est plus répandue chez les professionnels de santé, qui y sont plus exposés que la population générale (port de gants) : elle atteint, chez eux, 14 %. Le contact direct du latex sur la peau peut entraîner de l’urticaire et des gonflements. En l’absence de contact direct, la moitié environ des personnes concernées réagissent par des symptômes des voies respiratoires ou des yeux rouges et irrités. Les réactions les plus sévères concernent cependant les patients allergiques opérés par un chirurgien qui porte des gants en latex. Les patients multi-opérés sont particulièrement à risque. Le contact de l’allergène avec les organes du malade provoque sa mise en circulation dans le sang, et une réaction généralisée et soudaine qui peut aller jusqu’au choc anaphylactique. Les accidents dus aux protéines de latex ont cependant beaucoup diminué grâce à des mesures de prévention. Aujourd’hui, de nombreuses fibres synthétiques sont à même de le remplacer et de réduire le risque d’allergie. Les fabricants conçoivent par ailleurs des gants en latex avec beaucoup moins de protéines allergisantes.

L’avis du spécialiste

« Des applis dédiées aux allergies, simples à l’usage »

David Sainati, fondateur de Medappcare, organisme certificateur des applications santé

« Pour les patients qui souffrent d’allergies respiratoires, des applications qui informent simplement sur la qualité de l’air et les taux de pollution (exemple : Plume Air Report) sont disponibles. D’autres signalent aussi la présence de pollens dans l’air. Certains laboratoires pharmaceutiques spécialisés se sont positionnés, comme le laboratoire ALK avec son application AllergiK. Celle-ci propose au patient de renseigner ses informations personnelles et ses allergies et d’obtenir ainsi une carte d’allergique, d’enregistrer ses crises allergiques, ou de connaître son risque allergique en fonction de son profil et sa localisation. D’autres applis permettent de scanner des produits alimentaires et d’alerter le consommateur du risque d’allergie. Certaines sont intéressantes, mais attention : elles sont loin d’être infaillibles et ne doivent pas se substituer au bon sens. »

Pourquoi la susceptibilité des patients aux allergènes a-t-elle augmenté ?

Une des explications données par les scientifiques est la théorie hygiéniste : les progrès de la médecine et de l’hygiène ont entraîné une forte réduction de la mortalité dans les pays développés, mais ont aussi engendré l’expansion de certaines pathologies liées à un déséquilibre du système immunitaire, comme les allergies. Un excès de propreté et de désinfection empêcherait le système immunitaire de se régler correctement, particulièrement au cours de l’enfance, et l’amènerait, à défaut de se battre contre des micro-organismes, à s’en prendre à d’autres substances. Cette fragilisation a aussi des explications environnementales. La potentialisation des pneumallergènes par la pollution atmosphérique est désormais bien comprise et bien documentée. C’est ce qui est appelé l’effet cocktail, à la source d’une explosion de leur pouvoir de nuisance.

Témoignage

« Mes symptômes respiratoires se sont aggravés »

Hélène, 41 ans

« Pendant des années, j’ai souffert de rhinites allergiques saisonnières (aux pollens de graminées) et d’une allergie aux poils de chat. Je vis avec un chat, porteur d’une forte charge affective, dont je ne peux pas me séparer. Je prenais des antihistaminiques pour maîtriser mes symptômes. Ceux-ci se sont aggravés et j’ai commencé à faire des crises d’asthme. Mon allergologue m’a conseillé une double désensibilisation, il y a deux ans. Ça m’a changé la vie : mes symptômes et mes prises d’antihistaminiques ont régulièrement régressé. »

Quid de la prise en charge de la désensibilisation ?

Début 2018, la Haute Autorité de santé (HAS) a émis un rapport qui recommandait de diminuer le taux de remboursement de certaines immunothérapies allergiques, voire de les dérembourser. La HAS évoquait « une efficacité mal démontrée ». La menace sur le remboursement avait provoqué une montée au créneau des allergologues. Le décret paru au Journal officiel en juin dernier modifie les conditions de remboursement des allergènes préparés spécialement pour un seul individu (APSI) : la prise en charge des APSI sous forme de gouttes sublinguales, passe de 65 % à 30 %. En revanche, les traitements de désensibilisation par voie injectable, moins utilisés en France, sont désormais totalement déremboursés.