Certaines pathologies s’éclairant à la lumière des violences sexuelles, les soignants doivent se former, affirme l’association Stop aux violences sexuelles.
« LE CORPS PARLE, ASSURE LA MÉDECIN GÉNÉRALISTE NATHALIE REGENSBERG DE ANDREIS. Quand il a été agressé, il exprime une souffrance physique. Tout soignant doit savoir poser, systématiquement, une question simple : avez-vous été victime de violence physique, morale, sexuelle ? Quand on est à l’aise avec cette question, les patients le sont aussi. » C’est le message adressé à tous les soignants au cours des 6e Assises internationales de l’association Stop aux violences sexuelles (SVS), qui se sont tenues à Paris début janvier. Fondée par trois médecins en 2013, SVS milite notamment pour « le développement de parcours de soins adaptés pour les victimes, comme pour les auteurs », explique sa présidente, la médecin endocrinologue et gynécologue Violaine Guérin. Le chemin à parcourir est long car, déplore-t-elle, « aujourd’hui, les étudiants en santé ont 2 à 3 heures de formation : c’est très insuffisant ».
L’association a donc développé ses propres formations continues*, qui ont lieu partout en France. Elle propose une session de deux jours, gratuite, ouverte à tous publics, dédiée aux bases de la connaissance sur les violences sexuelles. D’autres formations, plus spécialisées et payantes, s’adressent spécifiquement au personnel soignant : prévention en âge scolaire, thérapies psychocorporelles (art thérapie, Emotional Freedom Technique, sophrologie, sexologie), accompagnement d’un enfant victime et de sa famille. Depuis 2018, l’association met l’accent sur la prévention en périnatalité, pour détecter les futurs parents qui ont été victimes de violences sexuelles. « Une grossesse, pour une femme mais aussi pour un homme, est une période de transparence psychique, explique la sage-femme Nicole Andrieu, qui anime ces formations. Les violences sexuelles qui étaient sous le couvercle, parfois en amnésie, ressortent. »
Au cours du colloque, des médecins ont confié à quel point leur prise de conscience de la fréquence des violences sexuelles a éclairé leur pratique et certaines pathologies. La généraliste Nathalie Regensberg de Andreis s’est orientée vers la prise en charge des douleurs chroniques : « J’ai réalisé le nombre important de victimes de violences sexuelles parmi mes patients, en particulier ceux qui souffrent de fibromyalgies. » Le chirurgien digestif belge Ghislain Devroede, qui exerce aujourd’hui au Canada, a lui aussi fait le lien entre les violences sexuelles et les troubles digestifs. « C’était il y a trente-sept ans, et dans mon milieu professionnel, on m’a vu comme un malade psychique », plaisante-t-il. Il a confronté son exercice avec celui de quatre confrères sensibilisés au sujet : sur plus de 400 patients, en moyenne 40 % ont été victimes d’abus sexuels.
* Le programme de formation de l’association SVS : https://www.stopauxviolencessexuelles.com/formations-2/