L’activité physique comme recours médical - L'Infirmière Libérale Magazine n° 356 du 01/03/2019 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 356 du 01/03/2019

 

MALADIES CHRONIQUES

ACTUALITÉ

Stéphanie Hasendahl  

Une expertise collective de l’Inserm montre que l’activité physique a un réel impact sur différentes pathologies chroniques comme le diabète et la dépression.

À N’EN PAS DOUTER, selon les conclusions de l’expertise de l’Inserm, le sport sera le « médicament » phare de ces prochaines années pour lutter contre les maladies chroniques. Actuellement, on dénombre déjà un Français sur quatre touché par une maladie chronique. L’expertise, qui a été sollicitée par le ministère des Sports, s’appuie en grande partie sur les dernières données scientifiques du quatrième trimestre 2016. Les principales pathologies qui y sont étudiées sont les pathologies cardiovasculaires, les cancers, le diabète et les pathologies respiratoires chroniques. L’obésité a également été prise en compte, ainsi que certaines maladies mentales (dépression, schizophrénie), les troubles musculosquelettiques (TMS) et la multimorbidité.

Une prescription systématique

Ce n’est pas un hasard si le groupe d’experts parle d’activité physique et non de sport. « Il n’est pas question ici de compétition ou de recherche de performance, mais bien d’une activité physique adaptée en fonction de chaque patient et de sa pathologie », indique Laurent Fleury, responsable du pôle d’expertise collective de l’Inserm. La prescription d’une activité physique doit être systématique et aussi précoce que possible dans le parcours de soins. De manière générale, la fréquence de la pratique de l’activité physique doit représenter un minimum de trois séances par semaine. Des recommandations spécifiques ont été données par pathologie. Les experts proposent même que « l’activité physique soit prescrite avant tout traitement médicamenteux pour la dépression légère à modérée, le diabète de type 2, l’obésité », et l’artérite des jambes… Pour l’obésité, il est conseillé de mettre l’accent sur des programmes d’activité d’endurance. Le diabète de type 2 nécessite de privilégier l’association du renforcement musculaire et des activités d’endurance d’intensité modérée à forte. Les pathologies coronaires demandent la poursuite d’une activité physique régulière d’endurance, tandis que pour l’insuffisance cardiaque, les experts conseillent idéalement trente minutes d’activité modérée cinq fois par semaine dans la dernière phase du programme de réentraînement à l’effort. La réduction de l’impact des séquelles neuromusculaires dans les accidents vasculaires cérébraux et la prévention des récidives sont possibles en améliorant les capacités cardiorespiratoires via une activité physique régulière intégrant la pratique des gestes journaliers. Pour l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs, la marche est le traitement de première intention. Chez les patients qui souffrent de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), la qualité de vie peut être améliorée grâce à une activité physique régulière et variée (endurance, renforcement musculaire, natation, tai-chi). Les activités d’endurance sont également conseillées pour les patients souffrant de dépression, de cancer, d’asthme. La douleur liée aux pathologies ostéoarticulaires peut être réduite grâce à des programmes d’activité physique adaptés et une pratique pérenne.

Accompagner les patients

L’enjeu reste d’adapter la pratique à l’état de santé du patient ainsi qu’à son traitement, ses capacités physiques, ses risques médicaux et ses ressources psychosociales. Les experts préconisent de développer les partenariats avec les organisations de loisirs pour accompagner les patients. Selon Catherine Chenu, coordinatrice de cette expertise, « l’activité physique peut jouer un rôle central dans l’appropriation de sa maladie et la mise en place de changements de comportements. L’enjeu majeur est de motiver les patients et de favoriser l’engagement, l’adhésion et le maintien d’une pratique d’activité physique régulière ». Il faut également former les médecins à la prescription d’activité physique et, en parallèle, former des professionnels de l’activité physique à la connaissance des pathologies et à l’intégration de l’activité physique dans l’intervention médicale. Cette expertise est publiée alors même que plusieurs plans concernant l’activité physique et la santé sont en cours, notamment le projet de Stratégie nationale sport santé. Par ailleurs, la loi Touraine a introduit, depuis 2016, la possibilité, pour les médecins généralistes, de prescrire une activité physique. « C’est une prise de conscience collective qui est à l’œuvre, ainsi qu’un changement de regard sur les patients », se félicite Laurent Fleury.