Silence sous la blouse

Cécile Andrzejewsk

L’Infirmière magazine avait déjà soulevé un coin du voile ⁽¹⁾, mais une année d’enquête était nécessaire, conduite par la journaliste Cécile Andrzejewski, pour décrire l’étendue des violences sexuelles à l’hôpital. Accablants, les témoignages se succèdent, se complètent, se ressemblent : harcèlement sexuel, baisers forcés, caresses non consenties, injures à caractères sexistes. La plupart des auteurs sont des médecins, beaucoup de victimes sont des infirmières. Car l’hôpital a cette particularité, rappelle Cécile Andrzejewski, d’être un « monde majoritairement féminin où le pouvoir, médical et administratif, reste entre les mains des hommes ».

Le plus frappant dans cette enquête fouillée et étayée, c’est la persistance du déni de l’institution hospitalière qui, toujours, protège les agresseurs. Cécile Andrzejewski décrit ainsi cette mécanique, toujours la même : « Une agression, la découverte d’autres victimes, la hiérarchie inerte ou culpabilisante, la situation enlisée, les puissants solidaires, les procédures alambiquées et incompréhensibles, jusqu’à l’échappée » des victimes.

La journaliste reprend le fil de l’histoire de Justine, une infirmière marseillaise, que nous avions commencé à raconter. Embrassée de force par son chef de service, elle a osé porter plainte. Elle a demandé à changer de service, elle a attendu un poste, traversé une dépression. Ses collègues infirmières l’ont d’abord soutenue, puis se sont éloignées : « Elles savent bien - et l’histoire de Justine va le prouver - que si elles se risquent à parler, elles devront partir quand lui ne sera pas inquiété. »

→ Fayard, 2019, 240 pages, 19 €.