L’acceptation d’un don - L'Infirmière Libérale Magazine n° 357 du 01/04/2019 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 357 du 01/04/2019

 

LA VIE DES AUTRES

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Laure Martin  

Longtemps sceptique face à ses capacités, Sébastien Deveaux a finalement accepté l’évidence il y a quelques années. Il pratique désormais le magnétisme en parallèle de son métier d’Idel.

Lorsqu’on pratique le magnétisme, on reçoit souvent des personnespour lesquelles la médecine conventionnelle n’agit pas ou plus », explique Sébastien. Leurs motifsde consultation sont variés : herpès, brûlures, problème de dos, céphalées. S’il accepte aujourd’hui ce don de magnétiseur, Sébastiena dû parcourir un long chemin avant de se lancer. « En terminale scientifique, j’ai appris que mon oncle, infirmier, était un grand magnétiseurdu nord de la France », se souvient-il. Le jeune étudiant le rencontre mais s’interroge. Absorbé par ses études en soins infirmiers, il préfèrese dire qu’à chaque problème existe une solution rationnelle. Il commence l’exercice de son métier, mais se sent vite frustré lorsqu’il ne parvientpas à soulager certains patients, « jusqu’àce que certains d’entre eux, en chirurgie orthopédique et traumatologique notamment, me disent percevoir un soulagement lorsque j’appose mes mains à des endroits douloureux de leur corps ». Il n’a alors que 25 ans et demeure en quête de preuves.

Approche alternative

Sébastien part ensuite exercer au service des grands brûlés de l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille. À l’époque, il n’est pas rare que l’un des médecins du service fasse venir un coupeur de feu. « Je vois cette personne passer ses mains au-dessus de personnes brûlées. Cela me paraît surprenant. » Son oncle lui assure qu’il pourrait facilement développer cette pratique. Maisune fois de plus, Sébastien choisit la médecine conventionnelle. Après cinq ans d’exercice comme cadre de santé, le contact avec les patients et le soin commencent toutefois à lui manquer. Sébastien s’installe alors en libéralet constate à nouveau qu’il peut soulagerdes patients quand il appose ses mains surdes zones douloureuses. C’est lorsqu’il prenden charge une patiente atteinte d’un Alzheimer profond avec une luxation de l’épaule que Sébastien accepte finalement ses capacitésen magnétisme car, malgré la luxation, il parvient à la magnétiser, à lui faire bougerle bras et à l’habiller. « Ce fût un grand chocpour moi. J’ai eu quelques difficultés à admettre l’impact de mon action. »

Une formation en Belgique

Un livre de Thierry Janssen, La solutionintérieure -?Vers une nouvelle médecine du corps et de l’esprit, le conforte dans cette nouvelle approche. « Cet ancien chirurgien, devenu psychothérapeute, y explique que chacun possède en lui des capacités de préventionet de guérison », rapporte Sébastien. « J’ai eu l’impression qu’il parlait de magnétisme sans pour autant le nommer. » Il lui écrit pour luien faire part. « Il m’a répondu deux jours plus tard, m’expliquant que peu de personnes avaient effectivement compris qu’il en parlait. »

Sébastien lui confie son désarroi face à ce don. L’auteur l’encourage à rejoindre, en Belgique, son École de la présence thérapeutique (EDLPT) ouverte aux soignants qui souhaitent intégrer une approche alternative dans la dispensation des soins. « L’enseignement m’a beaucoup aidéà travailler mon manque de confiance en moiet à intégrer le magnétisme dans ma pratique. »

Débloquer et soulager

Sébastien commence à recevoir des personnes chez lui pour pratiquer le magnétisme quand il est en congé de son exercice libéral. Tout d’abordsa famille, puis le bouche-à-oreille lui permet d’étendre son réseau. Grâce à une anamnèse, il arrive à repérer les blessures internes. « Au sein de l’EDLPT, on est amené à étudier les blessures que chacun peut avoir en lui, en lien avec son enfance notamment, et qui sont latentes », explique Sébastien. Il reçoit des personnes pour des troubles psychiques ou psychosomatiques, et accompagne des patients en chimiothérapie afin d’éviter les effets secondaires.

« Mon but est de les débloquer physiquementet psychologiquement, de les soulager avec mes mains sans pour autant les toucher. Je n’ai pas la prétention de les guérir. J’effectue 50 % du travail, et eux l’autre moitié. » Et de conclure : « Certains patients me testent, mais je ne leur en veux pas, car j’ai moi-même longtemps été à la recherche de preuves. Aujourd’hui, je ne cherche plusà comprendre le pourquoi du comment. Je constate seulement qu’il y a des résultats. »

Qu’en pense l’Ordre national des infirmiers ?

L’Ordre n’a pas de position officielle par rapport à l’usage du magnétisme dans le cadre de la pratique infirmière. Néanmoins, il appelle « à la plus grande vigilance » du fait notamment de l’absence de formation. Il fait référenceà l’article R. 4312-10 du Code de déontologie des infirmiers : « L’infirmier agit en toutes circonstances dans l’intérêtdu patient. Ses soins doivent être consciencieux, attentifset fondés sur les données acquises de la science. Il doity consacrer le temps nécessaire en s’aidant (…) des méthodes scientifiques et professionnelles les mieux adaptées. Il sollicite, s’il y a lieu, les concours appropriés. Il ne doit pas (…) entreprendre ou poursuivre des soins dans des domaines qui dépassent ses connaissances, son expérience, ses compétences ou les moyens dont il dispose. L’infirmier ne peut pas conseiller et proposer au patientou à son entourage, comme salutaire ou sans danger, un remède ou un procédé illusoire ou insuffisamment éprouvé. Toute pratique de charlatanisme est interdite. »

Il dit de vous !

« Lorsque j’ai fait mes études d’infirmier, j’avais une vision idéalisée du métier. Je pensais qu’on avait le temps de s’occuper du patient, alors qu’en réalité, on est contraint par les horaires, par la rentabilité des services.J’ai souhaité devenir cadrepour avoir une action sur l’organisation et faire en sorte que les infirmiers puissent passer plus de temps avecles patients. Mais j’avais quand même un poids hiérarchique.J’ai donc décidé de m’installer en libéral et je m’y suis totalement retrouvé. Certes, on a une pression financière, mais j’ai changé mes habitudes de vieet, aujourd’hui, je peux vraiment prendre le temps nécessaire.Je voulais cette qualité de travail et j’en suis satisfait. J’ai trouvé mon équilibre. »