L'infirmière Libérale Magazine n° 360 du 01/07/2019

 

VOTRE CABINET

FICHE PRATIQUE

Muriel Caronne  

Infirmière libérale

Vous passez pour l’administration de ses médicaments chez un de vos patients atteint de la maladie d’Alzheimer, très désorienté, et il n’est pas chez lui… L’INR* d’une autre patiente est à 4,05 et le médecin prescripteur n’est pas joignable… Fatiguée, vous avez injecté 2U d’insuline rapide en trop à cette patiente de 90 ans insulinotraitée… Vous êtes face à un EIGS, un événement indésirable grave associé aux soins !

Prenons l’exemple(1) d’une patiente suivie à domicile pour des troubles psychiatriques par l’hôpital et en parallèle par un Idel qui passait quotidiennement. Ce dernier l’a trouvée décédée lors de son passage du midi  : EIGS !

Définition

Selon la Haute Autorité de santé (HAS), « il s’agit d’un événement inattendu au regard de l’état de santé et de la pathologie de la personne et dont les conséquences sont le décès, la mise en jeu du pronostic vital, la survenue probable d’un déficit fonctionnel permanent, y compris une anomalie ou une malformation congénitale ».

La loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé et le décret du 25 novembre 2016 précisent qu’il concerne tout professionnel exerçant en structure ou en ville(2).

Comment déclarer un EIGS ?

La déclaration d’un EIGS, obligatoire pour tout professionnel, se fait en deux temps sur le portail de signalement des événements sanitaires indésirables (signalement-sante-gouv.fr) :

→ le professionnel remplit le premier volet qui est transmis « sans délai » à l’ARS ;

→ en lien avec les professionnels impliqués dans la prise en charge du patient, le déclarant dispose de trois mois pour livrer une analyse plus poussée de l’EIGS et identifier un plan d’actions correctrices qu’il enverra à l’ARS (cette dernière anonymise les données et les transmet à la Haute Autorité de santé qui a pour mission de publier un rapport annuel et des recommandations).

Pourquoi déclarer un EIGS ?

L’objectif est d’améliorer la qualité des soins et la sécurité des patients. Analyser les causes, comprendre l’enchaînement des faits permettent également d’apporter une réponse à l’événement. Reprenons dans le tableau ci-dessous l’exemple de la patiente retrouvée décédée à son domicile. Une analyse de causes possibles a été faite avec forte présomption de suicide, sachant que l’Idel l’avait vue vivante la veille.

Quel rôle pour l’Idel ?

Nous récupérons souvent des « pré-incidents » stoppés avant qu’ils ne deviennent conséquents. Ainsi, pour reprendre l’exemple de l’erreur d’administration de l’insuline, il est nécessaire de savoir réagir  : resucrage, glucagon ou glucosé hypertonique, ou encore agir sur la capacité d’un patient ou de l’entourage à gérer une situation anormale, englobant information et éducation du patient et de l’entourage.

Pour cela, nous devons nousmêmes mettre des « garanties » à notre exercice :

→ s’informer  : les références de bonne pratique sont une démarche de qualité et justifient les techniques de soins mises en œuvre, que l’on travaille en structure ou à domicile ;

→ se former : au regard de l’évolution des technologies, poursuivre une formation continue durant notre carrière est impératif ;

→ adopter des mesures quotidiennes de prévention : protocoles d’administration, double contrôle ainsi qu’une traçabilité.

* International normalised ratio.

(1) Exemple issu de Pasqual, structure d’appui à la qualité des soins et la sécurité des patients de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (consulter le lien bit.ly/Exemple-Pasqual).

(2) Art. R. 1413-68.

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