L'infirmière Libérale Magazine n° 360 du 01/07/2019

 

LIBÉRAL

ACTUALITÉ

Sandrine Lana  

Le travail indépendant est-il la solution miracle pour mieux jongler entre vie privée et vie pro ? Pas vraiment si l’on en croit les résultats d’une étude sociologique.

JULIE LANDOUR*, CHERCHEUSE AU CENTRE D’ÉTUDES DE L’EMPLOI ET DU TRAVAIL (CEET), a étudié les données disponibles en matière de satisfaction et de temps de travail auprès de salariés et d’indépendants (35 % de femmes en 2017) pour en tirer de grandes tendances sur la conciliation travail/famille. Il en ressort que les salariés (femmes et hommes) sont davantage satisfaits de cette articulation que les indépendants, qui peinent à y arriver en raison de temps de travail plus longs, d’horaires atypiques et plus imprévisibles. La conciliation favorisée par le non-salariat relève donc du « mythe » pour la chercheuse.

Autre mythe, celui d’une organisation du travail plus autonome des indépendants : « En 2016, [les indépendants] sont en effet 78 % à déclarer pouvoir organiser leur travail de la manière qui leur convient le mieux, contre 83 % des salariés », écrit-elle. Et cette autonomie aurait baissé de 10 % entre 2012 et 2016. Des inégalités de genre existent également. En cas d’imprévu familial, les hommes, salariés ou non, indiquent pouvoir s’absenter plus facilement que les femmes. Et les hommes indépendants sont également plus satisfaits de la flexibilité laissée par leur statut. Une impression induite par la charge mentale plus forte pesant sur les femmes : « Les inégalités hommes/femmes en matière de travail domestique se maintiennent. 45 % des hommes indépendants déclarent ainsi un temps de travail domestique inférieur à 2 heures par semaine, contre seulement 4 % des femmes. À l’inverse, elles sont 25 % à déclarer un temps de travail domestique supérieur à 12 heures, contre seulement 4 % des hommes. Cet écart est très nettement supérieur à celui - déjà important - observé chez les salariés », peut-on encore lire dans l’étude.

Cette charge domestique tend à augmenter une fois que la femme est en couple ou dès qu’elle a des enfants. Par conséquent, « cette allocation différenciée des temps sociaux, favorisant un temps professionnel accru pour les hommes alors que les femmes voient leur investissement professionnel limité par leur assignation au travail domestique, a des effets sur les revenus des indépendants. Soulignons ainsi que le revenu d’activité mensuel moyen des hommes indépendants s’établit en 2016 à 2 531 euros contre 1942 euros chez les femmes. »

* Julie Landour, « L’indépendance favorise-t-elle l’articulation travail/famille ? », Connaissance de l’emploi n° 147, avril 2019 (consulter le lien bit.ly/Cnam-Ceet).