L'infirmière Libérale Magazine n° 361 du 01/09/2019

 

NÉGOS IPA LIBÉRALES

ACTUALITÉ

A. R.  

Les trois syndicats représentatifs des Idels et la Caisse nationale d’assurance maladie n’ont encore pas trouvé d’accord sur la rémunération des futures infirmières de pratique avancée libérales… Mais le feuilleton touche à sa fin.

C’EST DEVENU UNE HABITUDE : quand les syndicats d’Idels négocient avec l’Assurance maladie, les choses prennent toujours plus de temps que prévu. Après les discussions à rallonge (20 mois) pour aboutir à l’avenant conventionnel du printemps, ce sont les débats autour de la rémunération des infirmières de pratique avancée (IPA) libérales (entamées en juin) qui traînent en longueur. Nulle fumée blanche n’est en effet sortie le 27 août du siège de la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam), après une séance de négociations sensée être la dernière…

Il y a pourtant urgence à trouver une solution : une petite trentaine d’infirmières s’apprête à sortir des masters de pratique avancée pour exercer en ville dès le mois de septembre. Un chiffre appelé à grossir au fil des promotions. Mais pour l’instant, aucun modèle économique n’est prêt. La Cnam a pourtant fait des efforts : sa proposition initiale, présentée en juin, d’un forfait de 100 euros par patient et par an pour une moyenne de quatre visites a été portée fin août à 160 euros. En face, les syndicats semblent divisés.

Opportunité ou menace pour la profession ?

À la Fédération nationale des infirmiers (FNI), on affiche un optimisme modéré. « On est arrivés au bout de la négociation, on a tiré tout ce qu’on pouvait tirer », affirme Daniel Guillerm, son président. Celui-ci indique que la FNI donnera une réponse définitive d’ici à la mi-septembre après avoir consulté son conseil d’administration et son groupe de travail sur les IPA, mais laisse entendre qu’il ne faudrait pas laisser passer l’occasion que représente cet avenant. « Pour nous, l’important est d’obtenir un statut libéral pour l’IPA, cela doit servir de locomotive au métier socle, détaille-t-il. Fermer cette porte-là, ce serait griller un joker. »

Un avis que ne partagent pas forcément les autres représentants des Idels. « Le montant de 160euros proposé par la Cnam inclut les activités transversales telles que la recherche, et par ailleurs le montant des indemnités de déplacement ne sera pas augmenté, regrette Ghislaine Sicre, présidente de Convergence infirmière. Cela ne donnera pas un revenu suffisant pour des IPA qui ont fait deux ans d’études supplémentaires, et il n’y aura pas grand monde pour faire ce métier. » Et la syndicaliste de trancher : « On ne signera pas ce texte en l’état. »

Qu’est-ce qu’un revenu raisonnable ?

Du côté du Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil), l’analyse est la même, bien que les positions soient moins affirmées. « À ce tarif, nous sommes très réservés quant à la viabilité d’une activité libérale en pratique avancée exclusive, explique Catherine Kirnidis, présidente du syndicat. Il faudrait 365 patients par IPA pour obtenir un revenu raisonnable. » Et la patronne du Sniil de préciser que ce revenu dit « raisonnable » est de toute façon inférieur à ce que gagnent en moyenne les infirmières.

Catherine Kirnidis insiste par ailleurs sur la forte dépendance des IPA libérales à la bonne volonté des médecins, qui sont les seuls à pouvoir leur confier des patients. C’est pourquoi, à l’heure où nous mettons sous presse, elle ne pouvait préjuger de la réponse qui serait donnée par sa structure. « Nous allons lancer une réflexion en interne, notre réponse dépendra en partie de ce qui sera proposé par la Cnam. »

Bientôt la dissipation du brouillard ?

En effet, de nouvelles propositions sont attendues dans le texte définitif que la caisse doit transmettre aux syndicats par écrit, avec notamment un effort financier supplémentaire pour les IPA libérales installées en zone sous-dotée via le forfait structure. Tout va donc se jouer dans les échanges internes que les instances des différents syndicats auront à propos de cette dernière mouture, et dans le poids relatif des trois structures.

Car les règles d’adoption d’un avenant conventionnel permettent à la FNI ou au Sniil de signer seuls, pourvu que les deux autres syndicats se contentent de leur côté de ne pas signer, sans pour autant exercer conjointement leur droit d’opposition. « De mémoire, je n’ai jamais vu le droit d’opposition être exercé lors d’une négociation, mais on n’est à l’abri de rien », estime Daniel Guillerm. Les paris sont donc ouverts, et la réponse définitive devrait être connue avant la mi-septembre.