Le projet de réforme des retraites du gouvernement vise à créer un régime universel qui implique une refontedes 42 régimes de retraite actuels, dont celui des Idels, la Carpimko. Une concertation est en cours entrele haut-commissaire à la réforme des retraites et les partenaires sociaux jusqu’à la fin de l’année. Le point avec la présidente de la Carpimko, Marie-Anne François.
Le Premier ministre s’est exprimé sur le calendrier de la réforme des retraites et semble vouloir prendre un peu plus de temps. Cela vous semble-t-il de bon aloi ?
Marie-Anne-François : Je l’espère, à condition que ce ne soit pas une tentative pour diluer les débats. Il faut que ce soit une concertation qui porte ses fruits. C’est un souhait pour nous, mais certainement pas une certitude.
La Carpimko a-t-elle été reçue par le gouvernement ou par le haut-commissaire aux retraites ?
M.-A. F. : Oui, nous avons été reçus au tout début de la concertation. Puis nous avons renvoyé le haut-commissariat vers les syndicats qui composent le conseil d’administration de la Carpimko, car nous estimons qu’il leur revient d’avoir ce rôle politique. Cela dit, nous leur fournissons des outils techniques. C’est un travail coopératif.
Avez-vous des relations avec les autres caisses autonomes de libéraux ?
M.-A. F. : Nous avons des relations au sein de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL). Il n’y a pas pour le moment d’actions communes car, les problèmes n’étant pas les mêmes pour toutes les professions au regard des principes annoncés par la réforme, nous n’avons pas tous les mêmes points de vue. En ce qui concerne la Carpimko, nous avons surtout des inquiétudes sur les augmentations de cotisations ainsi que sur les prestations futures. Ce n’est pas le cas des médecins libéraux par exemple, qui ont plutôt des inquiétudes sur leurs futures prestations de retraite. Mais, comme eux, nous exigeons la préservation des réserves que nous avons constituées.
En l’absence de réforme, y aurait-il un risque financier pour les retraites des auxiliaires médicaux ?
M.-A. F. : Non, il n’y a pas de risque à ce jour. Nous avons des réserves pour un montant de l’ordre de 3 milliards d’euros, qui font que les pensions de nos affiliés sont garanties jusqu’en 2060. Nous avons un rapport démographique qui est encore favorable et qui nous permet de continuer à engranger des réserves. Ce rapport diminue chaque année, mais on ne saurait dire avec exactitude quand il s’inversera.
Dans le scénario actueldu haut-commissaire aux retraites, les auxiliaires médicaux font-ils partie des perdants de la réforme ?
M.-A. F. : Oui, car la réforme implique un quasi-doublement des cotisations retraites jusqu’au plafond de la Sécurité sociale. Au-delà, c’est plus compliqué à calculer, car certaines cotisations sont forfaitaires. Ce qu’il faut comprendre, c’est que cette modification des calculs de cotisation va avoir un impact plus important sur les professionnels aux petits revenus. Sachant que nous sommes quasiment tous des professions conventionnées, les praticiens ne pourront pas répercuter cette hausse sur leurs honoraires.
La hausse des cotisations peut-elle néanmoins être compensée autrement ?
M.-A. F. : Le projet de réforme prévoit que l’Assurance maladie va continuer à participer aux cotisations des libéraux comme elle le fait aujourd’hui avec l’ASV (allocation supplémentaire vieillesse). Mais nous ne savons pas par quelle tuyauterie cela va passer quand le régime universel sera constitué. Il y a encore beaucoup d’inconnues dans ce dossier, notamment celle de l’assiette sur laquelle les cotisations retraites vont être calculées. Est-ce que ce sera la même qu’aujourd’hui ? Je ne pense pas que ce soit le chiffre d’affaires qui servira de référence, mais le périmètre pourrait néanmoins évoluer, ce que ne désirent pas les syndicats.
Qu’est-ce que cela va changer pour l’âge de départ à la retraite ?
M.-A. F. : Actuellement, l’âge moyen de départ à la retraite de nos affiliés est de 63,9 ans, ce qui est donc très proche de l’âge pivot de 64 ans qui a été évoqué par le haut-commissaire aux retraites. Néanmoins, si cet âge devait évoluer, cela pourrait quand même avoir des conséquences. En effet, à partir de 62 ans, les personnes qui ont la durée de cotisation requise peuvent bénéficier des bonifications dans le régime de base. D’après ce qui est écrit dans le rapport, si l’âge légal de la retraite évolue, les bonifications disparaîtront entre 62 et 64 ans et aboutiront donc à une diminution des pensions.
Quels conseils donneriez-vous aux Idels pour anticiper cette réforme ? Est-ce par exemple le momentde racheter des années d’étude ou de faire des placements Madelin ?
M.-A. F. : Le rachat de trimestres d’études coûte très cher et ce n’est pas toujours judicieux. Si l’on peut, je préconise effectivement d’aller sur du Madelin, car cela permet d’améliorer les pensions. Mais tout dépend des revenus, de l’âge…
Peut-on se faire conseiller par la Carpimko sur ces questions ?
M.-A. F. : La Carpimko peut répondre aux questions des affiliés sur les régimes obligatoires, on peut d’ailleurs téléphoner ou prendre rendez-vous au siège, mais pas sur les régimes facultatifs. J’en profite pour appeler à la vigilance sur le démarchage téléphonique. Certaines personnes se présentent au téléphone en se disant mandatées par la Carpimko. C’est mensonger, nous ne mandatons personne.
La Carpimko va-t-elle disparaître avec la réforme ?
M.-A. F. : A priori, la Carpimko va continuer à exister et elle s’occupera de la liquidation des pensions ainsi que du régime invalidité-décès et de l’action sociale. En revanche, nous risquons de perdre le recouvrement au profit des Urssaf.
Les libéraux auront-ils leur mot à dire dans la gouvernance du futur régime universel ?
M.-A. F. : C’est effectivement la question. Et nous faisons tout pour que les libéraux, dont les auxiliaires médicaux, soient représentés dans le futur régime, mais rien n’est garanti.
La Caisse autonome de retraite et de prévoyance des infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et orthoptistes est l’une des dix sections professionnelles de l’organisation autonome d’assurance vieillesse des professions libérales. Elle collecte les cotisations retraites de ses affiliés et verse les pensions. Elle s’occupe également de la caisse invalidité-décès et dispose d’un budget consacré à l’action sociale. La Carpimko est gérée parun conseil d’administration élu par ses affiliés et composé de vingt-deux membres titulaires et vingt-deux membres suppléants. Il établit, notamment, les statuts et vote les différents budgets.