Les Idels défendent leur régime - L'Infirmière Libérale Magazine n° 363 du 01/11/2019 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 363 du 01/11/2019

 

RÉFORME DES RETRAITES

ACTUALITÉ

Hélène Colau  

Les inquiétudes liées à la réforme prévue en 2020 ont animé le colloque organisé pour les 70 ans de la caisse des infirmières libérales, la Carpimko, le 1er octobre.

« Nous voulons alerter sur l’impact économique du système universel de retraite tel qu’il nous est présenté. Le projet de réforme préconise pour nos professions un taux de cotisation de 28 %, contre 15 % actuellement : pour les travailleurs aux plus faibles revenus, cela signifie une hausse des dépenses de 1 300 euros par an et une baisse des pensions de 2 700 euros ! » Marie-Anne François, la présidente de la Caisse autonome de retraite et de prévoyance des infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et orthoptistes (Carpimko) a donné le ton dès son discours d’ouverture du colloque organisé à l’occasion du 70e anniversaire de l’organisation, à Paris. L’inquiétude était perceptible dans l’assistance, alimentée par l’étude publiée en septembre par le cabinet Asterès. Selon cette simulation, si la réforme améliorera bien le taux de remplacement - la part de son ancien revenu que l’on continue à toucher une fois à la retraite -, elle dégradera significativement le revenu disponible moyen à l’échelle d’une vie entière. Très concrètement, la perte de pouvoir d’achat serait de l’ordre de 6 % pour l’ensemble des auxiliaires médicaux. « Une telle variation de revenus risque d’entraîner une baisse de l’offre de travail, a prévenu l’économiste Nicolas Bouzou, le directeur d’Asterès. Car les auxiliaires médicaux ont peu de possibilités de compenser en travaillant plus, étant donné leur rythme déjà élevé. » La perte d’offre de travail estimée par Asterès est d’environ 10 000 équivalents temps plein, dont 6 000 infirmières.

Doublement des cotisations

La perspective d’un quasi-doublement des cotisations fait en effet grincer bien des dents. « Si elles atteignent 28 % dans vingt ans sans que nos rémunérations aient progressé en conséquence, cela va devenir difficile, a lancé un kinésithérapeute dans l’assistance. Nos cabinets risquent de fermer. » Laurent Pietraszewski, député (LREM) du Nord et coordinateur des « ambassadeurs retraite » de la majorité, a tenté de calmer les esprits, indiquant que le rôle des parlementaires était justement d’aller à la rencontre des citoyens bien en amont du dépôt du projet de loi, prévu d’ici à l’été 2020, afin d’entendre leurs attentes. « On ne peut pas lier l’avenir de sa retraite uniquement à celui de sa profession, a-t-il pointé. Nos métiers changent très rapidement, il faut donc réfléchir maintenant à l’avenir de la solidarité. » En effet, plusieurs intervenants ont noté que si le ratio actuel entre cotisants et retraités (respectivement 223 303 et 68 431, dont plus de la moitié d’infirmières) était excellent, rien ne garantissait qu’il en soit de même dans quelques décennies… Le Haut-Commissaire aux retraites, Jean-Paul Delevoye, a par ailleurs mis en garde sur la pérennité de l’ensemble du système de retraite. « Beaucoup de jeunes pensent qu’ils n’auront pas de retraite et préféreraient se tourner vers des fonds de pension, a-t-il déploré. La grande question qui nous anime aujourd’hui est : comment retrouver la confiance dans le système par répartition ? » Il a cependant jugé légitimes les inquiétudes liées à la hausse des cotisations… tout en expliquant qu’elle ne serait pas aussi élevée que l’on pouvait le croire.

Négociations à venir

En effet, afin d’aligner le sort des indépendants sur celui des salariés, s’il est prévu de faire passer les cotisations de 17,1 % à 28,12 %, l’assiette sur laquelle elles seront calculées baisserait en même temps de quelque 33 %, ce qui gommerait mécaniquement plus de la moitié des 11 points d’augmentation. Selon le Haut-Commissariat, la baisse de revenus strictement induite par la réforme serait donc largement inférieure aux 6 % avancés par l’étude d’Asterès, plutôt de l’ordre de 1 %. « Dans les mois à venir, nous allons tâcher de voir si cela est acceptable pour vous », a promis Jean-Paul Delevoye. De nombreuses rencontres catégorielles sont d’ores et déjà programmées ; les représentants des infirmières devraient être reçus avant la fin décembre. Et une fois le projet de loi déposé, les discussions ne seront pas terminées : le cadre général du régime universel sera certes fixé, mais des décrets pourront encore en préciser les modalités. « S’il faut prendre le temps, on le prendra », promet le Haut-Commissariat.