Le Centre national des professions libérales de santé (CNPS), qui rassemble une douzaine de syndicats de libéraux, a fêté le 14 novembre ses cinquante ans.
Cet anniversaire a été en particulier l’occasion d’aborder un demi-siècle d’évolutions en santé et la nouvelle organisation territoriale qui se met en place. « Les acteurs de la santé ont toujours eu l’habitude de travailler ensemble, a rappelé le Dr Philippe Vermesch, président du Syndicat des médecins libéraux (SML). Téléphone, fax… La coordination sur le papier n’existait pas vraiment. L’avenant 6 à la convention nationale des médecins libéraux a l’avantage de fixer les règles avec les CPTS, qui ont le mérite d’exister et d’être financées. » Le syndicaliste pointe néanmoins quelques inquiétudes : « pour le moment, il n’est juridiquement pas possible pour une CPTS de financer les soins, mais le jour où ce sera possible, nous craignons que les financiers entrent dans la boucle. » « Il n’a jamais été question de faire des CPTS des chevaux de Troie pour modifier les règles de l’exercice libéral, a voulu rassurer Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale de l’Assurance maladie (Cnam). Qu’on dise que demain, les CPTS vont être un moyen de salarier les professionnels de santé, je l’entends mais c’est un fantasme, une peur. Les retours d’expériences montrent que de nombreux acteurs du territoire ne se connaissent pas et leur en donner les moyens, c’est bien ! »
Les CPTS ont vocation à créer une meilleure coordination des soins dans les territoires. Une partie de l’organisation a été pensée « d’en haut », notamment pour la définition des missions des CPTS - l’accès aux soins, l’organisation des parcours de santé et la prévention. « Mais pour éviter un cadrage public et administré, il relève ensuite de chaque territoire d’élaborer ses propres réponses en fonction du diagnostic que les acteurs souhaitent porter », a précisé Nicolas Revel. Des éléments de base sont néanmoins nécessaires avant de se lancer : la pertinence du territoire, la capacité des porteurs de la CPTS à fédérer et la sincérité du projet de santé pour une construction dans la durée.
Autre regret manifesté cette fois-ci par le député de la Sarthe, Jean-Carles Grelier (apparenté Les Républicains) : avoir laissé les élus sur le banc de touche. « Pendant dix ans, l’Etat s’est défaussé sur les élus territoriaux pour gérer les problèmes médicaux. Aujourd’hui, ils peuvent être des facilitateurs de coordination et pourtant, ils n’ont pas été associés à la démarche des CPTS. Peut-être que le jour où les financements de l’Assurance maladie ne seront plus suffisants, on saura se rappeler des élus… ». « Il est vrai que la place des élus locaux n’a pas été pensée dans l’accord conventionnel car il s’agissait pour nous d’un élément de complexité, a reconnu Nicolas Revel. Néanmoins, je constate de la part des Agences régionales de santé et de l’Assurance maladie, la création d’instances de dialogue et de concertation. » L’édile aurait aussi souhaité l’institutionnalisation de la place des patients au sein des CPTS « faites pour eux ». « J’ai vu des CPTS signées qui ont intégré les patients dans la gouvernance », a assuré le directeur de la Cnam.
Ces dernières années, les problématiques sanitaires se centralisent également autour de la question de l’intelligence artificielle et de la protection des données de santé. Ces nouveaux usages questionnent et inquiètent parfois. « Pour les médecins, l’enjeu est majeur d’avoir une réflexion éthique sur l’intelligence artificielle », a soutenu le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération des syndicaux médicaux français (CSMF). « Nous avons les mêmes préoccupations sur l’utilisation des données personnelles, a poursuivi Alexis Vervialle, chargé de mission Offre de soins à France Assos Santé. Le numérique réinterroge le droit des patients notamment avec les mouvements de plate-formisation et l’apparition de grandes entreprises digitales qui s’insèrent dans les relations de soins. Nous devons nous assurer que les droits fondamentaux des patients sont respectés. » Judith Mehl, cofondatrice d’Ethik-IA, une initiative citoyenne et académique, a rappelé qu’il ne serait pas éthique de ne pas s’ouvrir à l’IA. Néanmoins, des garde-fous doivent être mis en place pour se prémunir des risques de délégation de la décision à l’IA par le médecin et de délégation du consentement des patients.