Arrêter son activité libérale - L'Infirmière Libérale Magazine n° 368 du 01/04/2020 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 368 du 01/04/2020

 

FICHE PRATIQUE

Laure Martin  

journaliste, avec la collaboration du service juridique du Conseil national de l’Ordre des infirmiers.

L’arrêt de l’activité libérale ne se décide pas du jour au lendemain. L’Idel doit effectuer plusieurs démarches administratives. Elle préviendra tout d’abord sa caisse de retraite, la Carpimko, 90 jours avant la cessation d’activité, afin de mettre un terme au prélèvement des cotisations. Idem pour l’Urssaf ou encore l’association de gestion agréée (AGA).

Elle fera de même avec sa caisse primaire d’assurance maladie (Cpam) pour être déconventionnée et laisser ainsi la place aux infirmières souhaitant s’installer. À noter que depuis la signature, en mars 2019, de l’avenant n° 6 à la convention nationale des infirmiers libéraux, l’Idel installée en zone surdotée qui arrête son activité doit nommer un successeur. Sinon, la place reste vacante.

Si l’Idel part à la retraite ou se lance dans une autre activité, elle demandera sa radiation au conseil départemental de l’Ordre des infirmiers (CDOI) dont elle dépend, en apportant la preuve de la fin de son activité grâce aux documents remis par la Carpimko, l’Urssaf ou la Cpam. Si l’Idel décide de prendre un poste salarié, elle préviendra son CDOI en raison des modifications de ses conditions d’exercice et de son statut. Cette mesure est prévue par l’article R.4312-89 du Code de déontologie. Le changement de statut a, en outre, un impact sur le montant de la cotisation demandée par l’Ordre à l’infirmier.

Organiser la continuité des soins

Au niveau de l’exercice professionnel, l’Idel a des obligations vis-à-vis de ses collègues. Elle ne peut pas décider, du jour au lendemain, d’arrêter son activité sans avoir pensé par exemple à la reprise de sa patientèle.

De fait, si elle n’exerce pas seule, elle doit s’en tenir aux modalités de résiliation du contrat de collaboration, d’exercice en commun ou de remplacement. Pour rappel, l’article R.4312-73 du Code de la santé publique dispose que « toute association ou société à objet professionnel fait l’objet d’un contrat écrit ». Sans contrat, il est fortement conseillé aux Idels d’envoyer un courrier recommandé avec accusé de réception mentionnant un préavis raisonnable, de trois à six mois, afin de régler l’ensemble des questions susceptibles de se poser au moment de l’arrêt de l’activité. Il est tout à fait possible de décider à l’amiable d’une date précise de départ. Néanmoins, en cas de conflit, sans lettre recommandée et donc sans preuve, le juge pourra acter une rupture abusive de l’activité.

L’Idel a aussi une obligation à remplir vis-à-vis de ses patients (article R.4312-12 du Code de déontologie), celle d’assurer la continuité de leurs soins. Elle doit donc impérativement trouver une infirmière pour reprendre sa patientèle, avant l’arrêt de son activité, en s’adressant d’abord à ses confrères et consœurs au sein du cabinet, au médecin généraliste, ou en se tournant vers d’autres cabinets d’Idels, l’hospitalisation à domicile (HAD) ou les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad). Cette continuité des soins relève de sa responsabilité. Si elle ne s’y astreint pas, une plainte peut être déposée à son encontre pour mise en danger et non-assistance.

Céder son activité

L’arrêt de l’activité entraîne généralement la cession des éléments incorporels de l’Idel, comme la patientèle. Dans la majorité des cas, le contrat prévoit une présentation préférentielle, c’est-à-dire que le rachat de la patientèle est d’abord proposé aux confrères du cabinet. En l’absence de contrat, il est conseillé à l’Idel, selon son devoir de bonne confraternité et de continuité des soins, d’entreprendre la même démarche. Le fait de céder sa patientèle est admis par la Cour de cassation qui, dans un arrêt du 7 novembre 2000, dit que « la cession de patientèle, à l’occasion de la constitution ou de la cession d’un fonds libéral d’exercice de la profession, n’est pas illicite à la condition que soit sauvegardée la liberté de choix du patient ». Le contrat de cession prévoit normalement que le repreneur exerce en collaboration pendant une certaine durée afin de s’adapter à la patientèle et au cabinet.

La cession de patientèle implique la conclusion d’un contrat de cession entre l’Idel cédant et l’acquéreur. Ce contrat doit être transmis au CDOI et à l’administration fiscale, la vente donnant lieu à une imposition. Aucun texte ne régit les modalités financières d’une cession. Le montant du prix de la patientèle est, en pratique, compris entre 20 et 40 % du chiffre d’affaires moyen des trois dernières années. Mais d’autres éléments peuvent avoir une incidence sur sa valeur.

Il est possible pour l’Idel d’effectuer une cession totale à un seul infirmier, mais aussi une cession partielle. Enfin, si l’Idel est propriétaire du local, elle bénéficie d’un droit de propriété absolu. Elle peut le céder, le garder ou même décider de mettre un terme à la location du cabinet. Dans ce dernier cas, il est fortement recommandé de trouver un compromis et de laisser le temps aux confrères de trouver un autre local pour la poursuite de l’activité.