L'infirmière Libérale Magazine n° 368 du 01/04/2020

 

LES FRANÇAIS ET L’AUDITION

ACTUALITÉ

Laure Martin  

L’association Journée nationale de l’audition (JNA) a mené une enquête avec l’Ifop, en février dernier, pour faire le point sur la place de l’audition dans la vie des Français. Des actions de prévention et d’information sont nécessaires pour parvenir à généraliser le suivi de l’audition dans le parcours de santé de chacun.

L’UN DES CHIFFRES CLÉS DE L’ENQUÊTE (1) RÉVÈLE QU’ENVIRON 20 MILLIONS DE FRANÇAIS RESSENTENT DES ACOUPHÈNES, dont 6 millions « souvent ». Le taux de personnes concernées par les acouphènes est passé de 31 % en 2017 à 39 % en 2020. L’écoute de musique via des écouteurs constitue l’une des principales causes des troubles auditifs : 75 % des utilisateurs déclarent opter pour un volume sonore modéré, mais 25 % préfèrent un son élevé. La surdité et les acouphènes sont au deuxième rang des préoccupations de santé des Français, qui sont 37 % à affirmer être inquiets concernant leur audition. Il s’agit du second niveau d’inquiétude le plus conséquent derrière l’accident vasculaire cérébral (52 %). Mais d’après l’enquête, la majorité des Français (58 %) s’estiment mal informés sur ce problème.

L’impact sur la santé

Pour 91 % des personnes interrogées, avoir une bonne audition a une influence importante sur leur santé en général. D’ailleurs, un Français sur deux, quel que soit son âge, indique rencontrer des difficultés à suivre les conversations dans les différents lieux de vie. Plus des trois quarts des Français de 15 ans ou plus affirment que les bruits et autres nuisances sonores ont des répercussions négatives sur plusieurs domaines de leur santé. Les conséquences les plus répandues de cette gêne portent sur la perte de concentration, qui affecte plus de la moitié des sondés (51 %), ainsi que la fatigue, la lassitude et l’irritabilité dans la vie quotidienne (49 %). Pour 39 % des répondants, le bruit et les nuisances sonores engendrent des maux de tête, des troubles du sommeil (36 %) et, à un degré moindre, de l’hypertension artérielle (23 %). La santé psychologique est aussi impactée, notamment par le stress (44 %), la nervosité et l’agressivité (43 %). De façon moins prononcée, mais concernant des souffrances plus profondes, la perte de moral (26 %) et la souffrance psychologique (24 %) sont également mentionnées.

Les professionnels de santé : un vecteur clé

Malgré ces résultats, seules 21 % des personnes interviewées ont cherché des informations ou des avis concernant leur audition au cours des douze derniers mois. C’est en priorité auprès des professionnels de santé qu’elles demandent conseil, avant de faire des recherches sur Internet. Ainsi, 56 % des personnes concernées ont consulté un professionnel de santé (médecin généraliste ou spécialiste), mais seulement une sur deux affirme s’être déjà rendue chez un médecin ORL pour faire un bilan complet de son audition. Quant aux moyens permettant de favoriser un suivi de l’audition, la réalisation d’une campagne de sensibilisation par les pouvoirs publics est citée en premier par 33 % des sondés, suivie par la diffusion d’informations via une application dédiée avec la possibilité de faire un test auditif (29 %), la téléconsultation d’un médecin spécialiste (23 %) ou encore des informations pratiques et régulières sur un site web dédié au sujet (22 %).

(1) L’enquête a été menée auprès d’un échantillon représentatif de la population française de 1 003 personnes âgées de 15 ans et plus, via un questionnaire auto-administré en ligne (computer assisted Web interviewing, Cawi), du 31 janvier au 3 février 2020.

Pr Jean-Luc Puel, président de l’association Journée nationale de l’audition (JNA)

« Les Idels ont un rôle à jouer dans le domaine de l’audition »

« Les Idels peuvent intervenir à de nombreux niveaux dans la prise en charge des troubles de l’audition. D’abord, elles peuvent faire de l’information et de la prévention auprès de toutes les personnes qu’elles côtoient, en conseillant par exemple un rendez-vous chez l’ORL en cas de problème. Lorsqu’elles prennent en charge une personne âgée équipée d’appareils auditifs, elles peuvent vérifier les piles, s’assurer qu’ils ne sont pas bouchés. C’est d’autant plus important pour les patients atteints de maladies chroniques, qui ont des difficultés à sortir. Mais je pense qu’un rôle encore plus actif pourrait être imaginé. Aujourd’hui, dans les maternités, tous les nouveau-nés bénéficient d’un dépistage de l’audition, assuré majoritairement par des infirmières. Pourquoi alors ne pas concevoir du dépistage en libéral ? L’enjeu est important, car les Idels prennent majoritairement en charge des personnes âgées, qui peuvent rapidement s’isoler si elles ont des problèmes d’audition et ne sont pas appareillées. Il a aussi été démontré que le port d’appareils auditifs stimule le cerveau et diffère la démence. Cette capacité de dépistage me semble être une idée intéressante à développer pour mieux orienter les patients. Bien entendu, cela suppose un financement. »