L'infirmière Libérale Magazine n° 368 du 01/04/2020

 

Santé publique

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Marie Fuks  

Après les cinq fruits et légumes par jour, le Pr Serge Hercberg poursuit son combat pour améliorer la qualité nutritionnelle de notre alimentation avec le Nutri-Score. Encore peu utilisé par les consommateurs, cet affichage simple est une véritable aide pédagogique pour l’éducation nutritionnelle.

Des couleurs et des lettres

Conçu par Santé publique France à la demande de la Direction générale de la santé, le Nutri-Score est un logo nutritionnel dont le principe repose sur les travaux du Pr Serge Hercberg, médecin et directeur de l’Équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (Eren), qui œuvre pour une meilleure alimentation depuis une quarantaine d’années. « Notre objectif était de proposer un système d’étiquetage qui permette à n’importe quel consommateur, y compris les enfants, d’apprécier d’un seul regard la qualité nutritionnelle globale des produits transformés et des boissons non alcoolisées, explique le professeur, également ancien président du Programme national nutrition santé (PNNS). Ceci sans avoir à décrypter les valeurs nutritionnelles des ingrédients, dont la liste figure à l’arrière de tous les emballages, conformément à la réglementation européenne. » Un objectif atteint avec le Nutri-Score, qui repose sur un code simple composé de cinq couleurs, du vert foncé au rouge, associées à cinq lettres, de A à E. La couleur verte, associée à la lettre A, est attribuée aux produits qui offrent la meilleure qualité nutritionnelle, la couleur rouge et la lettre E à ceux dont il convient de limiter la consommation.

Bons et mauvais points

La note attribuée par le Nutri-Score prend en compte l’ensemble des valeurs nutritionnelles pour 100 g de produit alimentaire. Elle est obtenue à partir :

- des points positifs attribués au produit pour ses éléments bénéfiques pour la santé (protéines, fibres, fruits et légumes, légumineuses, fruits secs à coque non salés, huile d’olive, etc.) ;

- des points négatifs pour ses teneurs en graisses saturées, en sucre, sel et calories, néfastes pour la santé lors de consommation excessive ;

- d’algorithmes complexes appliqués aux point positifs et négatifs pour établir le score global de chaque produit.

« Le calcul du Nutri-Score est fait par les industriels qui adhèrent au dispositif(1) et fournissent les données de composition à l’Observatoire de la qualité de l’alimentation, précise le Pr Serge Hercberg. Il est réalisé à partir de données publiques et vérifiables par tous via un tableur disponible sur le site de Santé publique France, ce qui en garantit la validité. »

À conseiller aux patients

Alors que seulement 14 % des Français disent prêter attention au Nutri-Score (voir le graphique ci-contre), ce logo constitue un outil d’éducation nutritionnelle très intéressant pour orienter simplement les patients vers une alimentation plus saine. « Les infirmières libérales, de par leur proximité et la relation d’écoute et de confiance qu’elles développent auprès des patients, sont des relais de santé publique majeurs en matière d’information, d’éducation et de prévention, estime le Pr Hercberg. Elles peuvent expliquer le principe et l’intérêt du Nutri-Score et s’assurer que les patients comprennent comment s’en servir pour améliorer la qualité nutritionnelle de leur alimentation. »

Cela concerne en priorité toutes les personnes atteintes d’affections liées à des facteurs nutritionnels (diabète, maladies cardiovasculaires, obésité, etc.), mais également tout un chacun dans le cadre de la prévention de ces maladies.

Faire les bons choix

Au sein d’une même gamme de produits (pizzas, céréales pour le petit déjeuner, plats cuisinés, gâteaux apéritif, etc.), le Nutri-Score permet de privilégier ceux qui présentent les meilleures qualités nutritionnelles. Les différences, qui peuvent être importantes d’une marque à l’autre, sont faciles à distinguer. Le logo oriente rapidement le choix en permettant d’identifier d’un seul coup d’œil les produits qu’il est préférable de limiter et ceux qui sont à privilégier.

« Pour autant, il est important de ne pas tenir un discours trop arbitraire, en indiquant que les produits étiquetés D ou E peuvent faire partie d’une alimentation équilibrée à condition d’en limiter la consommation, soit en quantité, soit en fréquence, souligne le Pr Hercberg. L’essentiel, c’est que les personnes prennent conscience qu’en améliorant leurs choix alimentaires, en consommant des produits mieux classés dans le Nutri-Score, c’est-à-dire moins gras, moins sucrés, moins salés et plus riches en fruits et légumes ou en fibres, ils vont améliorer leur état nutritionnel et réduire le risque de développer de nombreuses maladies chroniques. »

Le Nutri-Score bientôt imposé ?

Pour rendre obligatoire l’apposition du logo Nutri-Score sur les produits alimentaires, une initiative citoyenne européenne a été lancée en 2019, sur le site de la Commission européenne(2), par des associations de consommateurs soutenues par les scientifiques et professionnels de santé. Actuellement, 230 marques l’appliquent volontairement. Elles ont été récemment rejointes par Nestlé, première entreprise agroalimentaire au monde, Carrefour et Super U. « Selon nos estimations, lorsque toutes ces marques auront déployé le Nutri-Score sur leurs produits, 35 % du marché alimentaire actuel sera couvert par ce moyen d’identifier les aliments bons et “moins bons” pour la santé, conclut le Pr Hercberg. C’est insuffisant, mais encourageant, car le Nutri-Score introduit une compétition entre les marques, qui les incite à améliorer la qualité nutritionnelle de leurs produits. Mais pour forcer la main aux entreprises qui ne jouent pas le jeu de la transparence, il doit devenir obligatoire ! »

(1) « Les produits A et B gagnent des parts d’estomac », octobre 2019, https://www.nielsen.com/fr/fr/insights/article/2019/les-produits-a-et-b-gagnent-des-parts-destomac/

(2) Pour participer, se connecter sur https://eci.ec.europa.eu/009/public/#/initiative

L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt.

Nutri-Score : un jeune indicateur prometteur

À quel(s) label(s) de qualité/composition produit faites-vous attention lorsque vous achetez de la nourriture ?