Soutenir les mesures hygiéno-diététiques - L'Infirmière Libérale Magazine n° 368 du 01/04/2020 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 368 du 01/04/2020

 

CAHIER DE FORMATION

SAVOIR FAIRE

ACCOMPAGNER LES RÈGLES DIÉTÉTIQUES

La restriction calorique est difficile à maintenir sur le long terme. Une restriction modeste et le choix des aliments sont à privilégier. Les régimes excessifs et les objectifs d’une perte de poids rapide sont à bannir. Respecter un équilibre alimentaire ne doit pas exclure la notion de plaisir. Avec un surpoids associé au diabète de type 2 (DT2), obtenir un équilibre glycémique correct uniquement avec des médicaments, y compris l’insuline, est impossible sans régime alimentaire ni exercice physique. En cas de surpoids, la lutte contre l’insulinorésistance passe par une correction des erreurs alimentaires et non par un régime hypocalorique sévère.

Le sucre

→ Une distinction abandonnée

Pendant longtemps, les sucres complexes (amidon) étaient considérés comme des sucres lents et les sucres simples (saccharose, lactose, fructose) comme des sucres rapides. En fait, tous les sucres simples ne sont pas rapides et certains sucres complexes sont digérés rapidement, entraînant une élévation très rapide de la glycémie.

→ Rapidité de la réponse glycémique

Liée à la rapidité du transit gastrique, elle est diminuée par un apport simultané en graisses, protéines et fibres alimentaires. Un sucre simple consommé au cours d’un repas équilibré a un effet hyperglycémiant plus faible et plus lent que s’il est absorbé seul. Ce qui limite le pic hyperglycémique postprandial. La composition de l’aliment a également une influence. L’amidon contenu dans les biscottes ou le pain est absorbé rapidement, alors que les sucres rapides du chocolat, riche en graisse, sont répercutés lentement. Pour les autres paramètres, les aliments solides sont digérés plus lentement que les liquides, et les aliments froids sont absorbés plus lentement que les aliments tièdes.

→ Index glycémique

L’index glycémique, ou le pouvoir hyperglycémiant, mesure l’effet hyperglycémique d’un aliment comparé au glucose. Les aliments conservent leur index glycémique même dans le cadre d’un repas varié. Cet index est augmenté par la cuisson, les traitements mécaniques (purée, marmelade) et certains procédés industriels des aliments déshydratés (purée en flocons, etc.) :

- les pâtes, le riz et les légumes sont à consommer de préférence al dente, c’est-à-dire légèrement croquants et pas trop cuits ;

- les aliments consommés avec leur enveloppe naturelle (lentilles, haricots, etc.), les laitages et les légumineuses (haricots, lentilles, pois, etc.) ont un faible index glycémique.

Les fibres

Elles fournissent des glucides partiellement digérés par le tube digestif qui apportent peu d’énergie. Leur consommation sous la forme de fruits et de légumes frais ou cuits à chaque repas, mais aussi de compotes “maison” peu ou pas sucrées, est recommandée. Elles réduisent l’absorption des sucres alimentaires ajoutés et des graisses. Associés aux féculents, les légumes augmentent le volume du repas sans trop accroître les calories, et modèrent l’élévation glycémique après le repas. Les conserves et surgelés natures (non cuisinés) ont une valeur alimentaire presque aussi bonne que celle des légumes frais. Les pains multicéréales ou complets apportent aussi des fibres (environ 100 g par jour, cinq tranches ou une demi-baguette).

Les édulcorants

Les édulcorants sont désignés comme des additifs compris entre E950 et E967. L’aspartame (E951), l’acésulfame K (E950) et le sucralose (E955) sont les plus fréquents. Ils peuvent être utilisés occasionnellement et aider les personnes qui n’arrivent pas à se passer du goût sucré pour le café ou le yaourt par exemple, une appétence pour le sucre dont il vaut mieux se déshabituer. Car consommés régulièrement, ils peuvent maintenir, voire augmenter l’attrait pour le sucré.

Pas d’interdiction stricte

Le temps de l’interdiction totale des produits sucrés est révolu. Il s’agit aujourd’hui de distinguer les produits naturellement sucrés, comme les fruits, des produits contenant des sucres ajoutés. Les études montrent qu’une suppression totale des produits sucrés entraîne une augmentation de la consommation de lipides, cause de surpoids.

Les matières grasses

→ Effet délétère

Les matières grasses sont le plus souvent retrouvées dans le beurre, la charcuterie, le fromage et les viandes. Elles engendrent une surcharge au niveau abdominal qui entrave l’action de l’insuline. Au-delà de 10 g de lipides, l’équivalent d’une cuillère à soupe d’huile, pour 100 g d’aliment, un produit a une assez forte concentration en matières grasses. Sans les proscrire, la consommation de ces produits doit être contrôlée dans la ration quotidienne.

→ Des conseils modérés

Les portions des repas sont diminuées progressivement pour ne pas favoriser les prises alimentaires compensatoires en dehors des repas. Certaines consommations doivent être réduites : plats industriels et traiteurs contenant des huiles de palme, de coprah ou du beurre, les charcuteries sauf le jambon sans le gras, les viandes grasses (côtes de porc ou d’agneau, saucisses, plat de côte, etc.).

Le grignotage entre les repas

La prise de trois repas réguliers par jour, en rappelant l’importance du petit-déjeuner, contribue à limiter le grignotage. Préférer un petit-déjeuner normalement glucidique et mixte, avec un yaourt, une portion de fromage ou une tranche de jambon e t éventuellement un fruit. Pour une collation à 16 ou 17 h, privilégier un fruit ou un laitage accompagné d’un café ou d’un thé.

Précautions chez les personnes âgées

Une attention particulière doit être portée aux risques de dénutrition aggravés ou déclenchés par des problèmes dentaires. Une ration inférieure à 1 500 calories par jour est proscrite. Le plaisir des repas doit être respecté, toute frustration à ce sujet est globalement inutile. La prise raisonnable de glucides simples en fin de repas et la consommation éventuel le d’un verre de vin au cours de celui-ci s’inscrivent dans cette démarche.

ENCOURAGER L’ACTIVITÉ PHYSIQUE

Des effets physiopathologiques

→ Régulation de l’équilibre glycémique

C’est au niveau du tissu musculaire que sont consommés et stockés environ 70 % des glucides ingérés. Le transport du glucose dans le muscle squelettique est stimulé par l’insuline et l’exercice physique. Si la stimulation par l’insuline est diminuée dans le DT2, celle induite par l’exercice physique reste normale. En fait, l’exercice physique combine une consommation directe de sucre et une consommation indirecte due à la sensibilité accrue des cellules à l’insuline. Pratiquée régulièrement, elle entraînerait une baisse de la glycémie moyenne jusqu’à 40 %, et permettrait de diminuer de moitié la prise de médicaments.

→ Un effet prolongé

Au cours de l’exercice, la captation musculaire de glucose et la synthèse du glycogène stocké sont augmentées, malgré une insulinémie généralement basse lors de diabète. Après une séance d’exercice, la sensibilité musculaire à l’insuline reste accrue pendant plusieurs heures.

→ Au-delà de l’équilibre glycémique

L’activité physique a des effets bénéfiques sur la santé en général. Elle permet de :

- développer les muscles ;

- diminuer la prise de graisse abdominale ;

- augmenter le bon cholestérol (HDL) ;

- faire baisser la pression artérielle ;

- renforcer l’estime de soi.

Pratiquer en sécurité

→ Choix des activités

L’activité physique est définie par l’Organisation mondiale de la santé comme tout mouvement corporel produit par les muscles squelettiques, entraînant une dépense d’énergie supérieure à celle du repos. Lorsque l’activité est adaptée aux capacités du patient, dans une perspective de progression, les risques sont limités. Parmi les activités les plus accessibles :

- la marche et le vélo, sachant que la marche nordique avec les bâtons fait fonctionner aussi les bras et sollicite plus de muscles. Elle augmente l’intensité de l’activité physique sans être rapide ;

- les activités d’entretien du domicile ;

- les déplacements à pied ou à vélo plutôt qu’en voiture.

D’une manière générale, il faut inciter le patient à utiliser son corps au quotidien.

→ Quelques précautions

La personne diabétique qui part pour une marche ou une balade à vélo doit emporter :

- un “resucrage” d’urgence (trois sucres) ;

- son lecteur de glycémie pour vérifier une éventuelle hypoglycémie ;

- une bouteille d’eau pour s’hydrater sans attendre d’avoir soif (environ un 0,5 l/h) ;

- des aliments légèrement sucrés (pain, fruits frais ou secs) pour une longue randonnée ou un effort prolongé.

Lorsque la glycémie est inférieure à 1,30 g/l avant une activité physique, il est nécessaire de prendre une collation.

→ Protection des pieds

L’activité physique nécessite le respect de soins d’hygiène rigoureux. Pour la marche, le choix de chaussures confortables et de chaussettes suffisamment épaisses en coton doit être rappelé(1).

Critères d’une activité efficace

→ Un podomètre permet de compter les pas effectués et de se fixer facilement des objectifs.

→ Le cardiofréquencemètre sert à mesurer les pulsations cardiaques. Lorsque les battements par minute sont supérieurs de 20 ou 30 par rapport à la fréquence au repos, c’est le signe d’une activité physique qui commence à utiliser de l’énergie.

→ La durée de l’activité a une incidence. Entre 20 et 45 minutes, l’activité permet de brûler le sucre et d’obtenir une adaptation physiologique à cette consommation de glucose. Elle est à pratiquer tous les deux jours ou trois fois par semaine. Classiquement, une durée de 30 minutes de marche par jour permet une diminution du risque vasculaire de 30 %.

→ L’essoufflement marque une limite. Au début de l’essoufflement, la personne qui ne peut plus parler pendant l’activité doit ralentir.

Activité physique et alimentation

→ Absorption de glucides après l’effort

L’ingestion de glucides après un exercice provoque une reconstitution plus rapide des concentrations de glycogène musculaire et accélère le retour à une insulinosensibilité proche des valeurs avant l’exercice. Tandis qu’une restriction en glucides ralentit le retour à la faible sensibilité musculaire à l’insuline constatée avant l’exercice.

→ Avant et après le repas

Pratiquée en fin de matinée, l’activité physique a un effet anorexigène et contribue à limiter les apports caloriques. Après une activité prolongée, le foie et les muscles ont puisé dans les réserves de glycogène. Le repas suivant doit contenir assez de glucides pour les reconstituer. Une réhydratation suffisante est à maintenir après l’effort. Pratiqué après le repas, l’exercice permet d’équilibrer facilement la glycémie, en consommant le sucre absorbé. Les féculents apportent des sucres qui sont disponibles plus longtemps.

Activités en groupe

Le soutien social est très important pour se motiver. L’activité en groupe peut apporter un plaisir supplémentaire qui aide à accepter l’aspect rébarbatif de l’exercice. Impliquer le conjoint est aussi une source de motivation.

Précautions liées à l’âge

Chez le diabétique âgé, l’activité physique doit également tenir compte de l’état clinique et du risque de chute. La marche régulière doit être encouragée, ainsi qu’un entraînement en endurance et en résistance lorsque cela est possible. Un rythme de trois séances par semaine est idéal si l’exploration cardiovasculaire l’autorise. Enfin, la kinésithérapie permet, chez les sujets fragiles, de maintenir leur masse musculaire.

(1) Pour la prévention du pied diabétique, voir L’Infirmière libérale magazine n° 366, février 2020.

Cas clinique 2

Depuis que le médecin a dit à M. P qu’il devait contrôler son alimentation, son épouse lui interdit strictement toute consommation de sucrerie. Cette situation ne peut plus durer.

Vous pouvez rapidement rassurer M. P en lui disant que les mesures diététiques pour prévenir les complications du diabète visent davantage un équilibre général de l’alimentation qu’un régime strict. En fait, elles se rapprochent d’un mode alimentaire souhaitable pour tout un chacun.

Question de patient

Qu’est-ce que l’index glycémique ?

C’est un critère de classement des aliments contenant des glucides selon leurs effets sur le taux de glucose dans le sang pendant les deux heures suivant leur ingestion. Plus l’index glycémique est élevé, plus l’hyperglycémie induite par le glucide est forte. Avant sa découverte en 1981, l’idée que tous les glucides avaient la même incidence sur la glycémie faisait recommander aux diabétiques de ne plus en consommer.

Question de patient

Est-ce que je peux consommer des produits allégés ?

S’ils permettent de réduire la ration de graisses, ils ne sont allégés que d’environ 25 %. Aussi, leur consommation sans modération peut conduire à une ration plus importante en graisses que l’utilisation limitée de produits non allégés.

Je cote à la nomenclature

Titre XVI de la NGAP, Chapitre II - Soins spécialisés, Article 5 Bis - Prise en charge à domicile d’un patient insulino-traité :

→ Surveillance et observation d’un patient dont l’état nécessite une adaptation régulière des doses d’insuline en fonction des indications de la prescription médicale et du résultat du contrôle extemporané, y compris la tenue d’une fiche de surveillance, par séance : AMI 1.

→ Injection sous-cutanée d’insuline : AMI 1.

→ Séance hebdomadaire de surveillance clinique et de prévention, d’une durée d’une demi-heure, pour un patient insulino-traité de plus de 75 ans (éducation du patient et/ou de son entourage, vérification de l’observance des traitements et du régime alimentaire, etc.) : AMI 4.

Calculez votre risque de diabète (1)

Proposer au patient présentant des risques de développer un diabète de type 2 de faire le test accessible dès la page d’accueil sur le site de la Fédération Française des Diabétiques (2). Ce test qui permet de calculer en 8 questions et 30 secondes ses prédispositions au diabète de type 2 peut aider à une prise de conscience.

(1) contrelediabete.federationdesdiabetiques.org

(2) A recommander aux patients diabétiques de type 1 et 2.