L'infirmière Libérale Magazine n° 371 du 01/07/2020

 

ESCARRES

ACTUALITÉ

Laure Martin  

La prise en charge des patients qui présentent des escarres peut être mise à mal par un déficit de connaissances et de communication entre les professionnels de santé du parcours de soins. Des solutions existent.

« LA COMMUNICATION ENTRE LES PROFESSIONNELS DE SANTÉ ET LES PATIENTS PEUT PARFOIS MONTRER QUELQUES LIMITES », a indiqué Antoine Perrier, podologue et docteur en biomécanique, lors de la journée des experts de la Société française de l’escarre, qui s’est déroulée en ligne le 17 juin dernier. L’intervenant a pris l’exemple d’un patient en fauteuil roulant qui constate la présence d’une rougeur sur son corps. « Souvent, il se tourne vers son distributeur de matériel médical, qui va alors changer le coussin pour s’adapter au problème, rapporte-t-il. Mais la rougeur peut récidiver et conduire à une escarre. Le patient doit alors consulter son médecin traitant qui va le diriger vers une infirmière pour le traitement de l’escarre. Il peut aussi être orienté vers une clinique du positionnement et de la mobilité. « Il existe plusieurs chemins de prise en charge, se pose alors la question du consensus entre les différents professionnels qui interviennent dans le parcours du patient et de la communication entre eux », a souligné Antoine Perrier. Ont-ils tous la même définition de la posture, du positionnement ? La même connaissance des risques d’escarre en fauteuil ? Ils doivent également s’entendre sur la notion de prévention et sur le stade où se situe le patient. « Toutes ces questions exigent un minimum de connaissances sur la physiopathologie de l’escarre, en lien avec l’utilisation du fauteuil roulant, a estimé le podologue. Ce que ne possèdent pas tous les professionnels de santé. » L’enjeu est pourtant important puisqu’il s’agit d’éviter toute prise de risque pour le patient.

Développer une meilleure communication

Pour permettre une prise en charge optimale, le professionnel de santé doit replacer le parcours du patient au centre de ses échanges avec lui et faire le point régulièrement sur ses connaissances et sa compréhension du risque de développer des escarres, en cas de mauvais positionnement sur son fauteuil. Il ne peut lui faire perdre de chances par méconnaissance des causes, et se doit de développer des outils d’accompagnement en situation écologique, afin de comprendre son quotidien, ainsi que les limites de sa prise en charge. Anticiper via la télémédecine permet de réduire les délais, et d’intervenir en prévention. « Entre professionnels, des modalités de communication peuvent également être instaurées par une connaissance partagée sur la maladie, par une obligation de moyens (connaissance et redirection du patient) ou encore par une organisation coordonnée avec d’autres acteurs de la prise en charge », souligne Antoine Perrier.

Les professionnels peuvent, bien entendu, s’informer et se former via les recommandations des sociétés savantes, en ayant recours aux méthodes d’évaluation qui font consensus (Delphi) ou en consultant les preuves scientifiques en recherche fondamentale et appliquée. Sur la forme, ils peuvent mettre en place un parcours référent au sein duquel chacun doit être associé à un réseau de professionnels et, en cas d’escarre, prévoir la prévention secondaire par les soins adaptés et la prévention tertiaire par une consultation de positionnement obligatoire..

OPTIMISER LES PRATIQUES

« Il existe des facteurs de réussite pour améliorer les pratiques professionnelles de prise en charge des escarres », a soutenu le Dr Emma Bajeux, médecin au service d’épidémiologie et de santé publique du CHU de Rennes, au cours de cette journée des experts. Parmi ces facteurs, citons l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP), facile à organiser en libéral. « L’EPP consiste à analyser les activités des professionnels de santé au regard de recommandations professionnelles disponibles et actualisées suivant une méthode définie », a précisé le Dr Bajeux. La finalité est d’aboutir à une amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins aux patients. Choix d’une thématique, d’une méthode, d’un référentiel, état des lieux de l’existant et analyse des dysfonctionnements sont les différentes étapes pour mener à bien une EPP. « L’identification d’actions d’amélioration est la clé de l’EPP, à condition de cerner celles qui sont prioritaires selon la fréquence et la gravité des points à améliorer », a conseillé le médecin.

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