Protection contre les irritations - L'Infirmière Libérale Magazine n° 373 du 01/09/2020 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 373 du 01/09/2020

 

Hygiène des mains

CAHIER DE FORMATION

POINT SUR

Thierry Pennable  

L’épidémie à Covid-19 a mis en lumière l’importance des mesures barrière, notamment une bonne hygiène des mains. Quelques précautions simples permettent de protéger la peau des agressions liées aux lavages avec un savon ou aux frictions hydroalcooliques.

Deux procédures applicables

Recommandations préalables

Le lavage des mains à l’eau et au savon et leur désinfection à l’aide d’un produit hydroalcoolique (PHA) sont deux procédures applicables pour l’hygiène des mains, selon l’Afssaps (2). La transmission de microorganismes ayant été démontrée en cas de port de bijoux, d’ongles longs, de vernis, de résine et de faux ongles, il est par conséquent recommandé, en préalable à tout protocole d’hygiène des mains dans un contexte de soins (3) :

- d’avoir les avant-bras dégagés ;

- d’opter pour des ongles courts, sans vernis, ni faux ongles ou résine ;

- de ne porter aucun bijou (bracelet, bague, alliance, montre).

Friction avec un produit hydroalcoolique

La SF2H présente la désinfection par friction avec un PHA comme la technique de référence (3) car elle est :

- plus efficace et plus rapide pour inactiver les microorganismes ;

- mieux tolérée par la peau que le lavage à l’eau et au savon.

Le volume de PHA doit être suffisant pour couvrir la totalité des mains (entre 1,5 et 3 ml, soit un creux de main) et permettre une activité complète et un temps de contact validés par les normes en vigueur, généralement de trente secondes (suivant la notice du produit).

Lavage à l’eau et au savon

Le lavage simple des mains avec de l’eau et du savon doux demeure toutefois recommandé :

- en cas de contact accidentel avec un produit biologique d’origine humaine ;

- lors de mains visiblement souillées (poudre de gants ou autre salissure visible).

Le temps de lavage minimal est de trente secondes, suivi d’un rinçage d’au moins une minute et d’un séchage complet des mains par tamponnage et sans frotter pour éviter les irritations, avec le papier à usage unique le moins irritant possible. Les essuie-mains à usage multiple sont à éviter en raison du risque de recontamination des mains après le lavage (4).

Irritations liées à l’hygiène des mains

Les savons et syndets

L’utilisation répétée de savons entraîne un dessèchement puis une irritation des mains dus aux détergents qu’ils contiennent et qui altèrent le film hydrolipidique de la peau. Les savons sont alcalins et assèchent les mains, c’est une réaction normale du savon nage. Au contact de l’eau, les savons relarguent une partie de leur base alcaline, ce qui conduit à des taux d’acidité (pH) voisins de 11. Cet effet alcalinisant s’estompe en trois heures et le film hydrolipidique (FHL) qui recouvre la surface de l’épiderme se reformera d’autant plus tard que les lavages sont répétés. Sachant qu’un FHL en bon état est une condition indispensable pour avoir une peau correctement hydratée. En temps normal, mieux vaudrait utiliser un syndet, “pain dermatologique” ou “savon sans savon”, plus respectueux de la peau. Leur pH en solution est en général de 6 à 6,5 et ils ne modifient pas celui de la peau qui est de 5. En revanche, en période d’épidémie virale, les produits utilisés doivent être extrêmement détergents. C’est le cas des savons qui éliminent les saletés et agissent au niveau de la membrane lipidique de certains virus, alors que l’action des syndets sur les virus n’a pas été testée.

Les produits hydroalcooliques

L’alcool contenu dans les PHA peut être responsable d’un dessèchement de la peau, mais l’association systématique d’un agent hydratant ou de glycérine dans ces produits limite le risque d’irritation. Des précautions d’emploi existent néanmoins :

- les personnes ayant un antécédent allergique à certains parfums doivent privilégier des PHA exempts de ces parfums ;

- l’application de PHA sur une peau humide augmenterait le risque d’irritation. Il est donc déconseillé de pratiquer successivement un lavage des mains suivi d’une friction avec un PHA, car cela entraînerait une humidité résiduelle persistante dans la couche cornée de la peau estimée à dix minutes ;

- l’application de PHA sur une peau abîmée n’est pas recommandée. La sensation de brûlure qui en résulte est due à la détérioration du film hydrolipidique cutané qui pourrait être aggravée par l’alcool contenu dans les PHA. Il est donc conseillé de restaurer la barrière cutanée par l’utilisation de crèmes hydratantes pour les mains, et de n’utiliser les PHA qu’une fois la peau apaisée.

Une crème pour les mains

Le dessèchement et l’irritation causés par une hygiène des mains répétée peuvent être prévenus par l’application en couche épaisse d’une crème pour les mains, une fois par jour, le soir au coucher (lire l’encadré). « Les crèmes pour les mains sont des émulsions formulées à l’aide de substances lipophiles qui sont des dérivés de la chimie des pétroles ou des corps gras d’origine végétale », expliquent sur leur blog Laurence Coiffard et Céline Couteau du Laboratoire de pharmacie industrielle et cosmétologie de Nantes (5). Ces substances lipophiles forment un film à la surface de la peau qui peut être altéré par les gestes barrière répétés. « Plus l’émulsion en contient, plus elle sera protectrice », ajoutent les spécialistes. Dans la composition des ces crèmes, la paraffine liquide et le beurre de karité sont les plus fréquemment retrouvés, à côté des huiles, celle d’onagre par exemple. Des alcools et acides gras, comme l’alcool cétylique et l’acide stéarique, apportent des propriétés émollientes, et sont associés à des actifs hydratants tels que la glycérine ou l’urée.

(1) « Les bactéries résistantes aux antibiotiques », L’Infirmière magazine, n° 404, mai 2019.

(2) « Rapport de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé relatif à l’innocuité des produits hydroalcooliques (PHA) à base d’éthanol », Afssaps, mars 2011.

(3) « Actualisation des précautions standard », Société française d’hygiène hospitalière (SF2H), juin 2017.

(4) « Hygiène des mains et soins : du choix du produit à son utilisation et à sa promotion », SF2H, mars 2018.

(5) Créatrices du site internet « Regard sur les cosmétiques ».

L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt.

Exemples de crèmes pour les mains

→ Exomega Control (A-Derma), baume émollient grâce au triglycéride d’acides caprylique et caprique et à l’huile d’onagre, hydratant par la glycérine et le niacinamide (ou niconitamide ou vitamine B3) qu’il contient ;

→ Moisturising Hand Cream (Sanex) dont la formule simple intègre de la vaseline (pétrolatum) aux propriétés émolliente et hydratante ;

→ Atoderm Mains & Ongles (Bioderma), mélange émollient composé d’un ester gras (isonanoate d’isononyle), de beurre de karité et d’acides gras (acides palmitique et stéarique) ;

→ Soin des mains Surgras (Mixa), concentré à 30 % en glycérine et lait d’avoine, il associe émollients (alcools stéarylique et cétylique, beurre de karité, diméthicone) et allantoïne pour l’effet apaisant.

Source : regard-sur-les-cosmetiques.fr