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COTATION → Le conflit entre l’Assurance maladie et un groupe d’infirmiers libéraux sur le calcul de l’AIS 3 prend une nouvelle tournure. Dans un jugement rendu début mai, le tribunal de Toulon donne gain de cause aux Idels.
Le débat sur le calcul de l’AIS3 est relancé. Quand, en janvier dernier, un groupe d’infirmiers libéraux a manifesté à Marseille (13) contre la Caisse primaire d’Assurance maladie des Bouches-du-Rhône, l’affaire paraissait soldée.
À l’époque, la CPAM n’en démordait pas : la durée d’un AIS 3 était de 30 minutes, pas une de moins… Elle estimait dénoncer des « activités particulièrement atypiques », en pointant un « écart entre la pratique attestée par l’infirmier lui-même et les sommes facturées à la Sécurité sociale, (ainsi que) le non-respect de la durée des soins fixée par Nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) ». Voici pourquoi des dizaines d’infirmiers libéraux s’étaient vu poursuivre pour indus. Dans sa décision rendue publique le 2 mai, le Tribunal de Toulon relance la bataille.
Certes, concernant la durée effective d’un AIS 3, le juge confirme la position de la CPAM. D’après son interprétation de la NGAP, un AIS 3 doit respecter la durée d’une demi-heure pleine. Cependant, le tribunal contrebalance cette définition en soulevant un autre débat : celui de la qualité des soins. Ainsi, admet-il que l’Idel n’a pas failli à ses missions dans l’affaire jugée, même si elle « consacre aux actes cotés AIS 3 moins de la demi-heure préconisée par la NGAP ». De l’avis de Me Danjard, avocat de l’infirmière, « c’est un renversement de la charge de la preuve ». C’est donc à la CPAM de démontrer que la qualité de soin n’est pas effective. Ce qu’elle n’est d’ailleurs pas parvenue à faire en l’espèce.
À travers ce jugement, la CPAM est d’autant plus renvoyée dans ses cordes par le tribunal de Toulon, que ce dernier évoque – sans la nommer – la Démarche de soin infirmier (DSI). « L’assentiment de la Caisse, qui a les moyens de vérifier le nombre d’AIS effectués par chaque infirmier, vaut probation des actes soumis à demande d’entente », notent les magistrats. Ils ajoutent « que cet accord interdit [à la Caisse] après les avoir acceptés de réclamer le remboursement des AIS 3 ».
Autre mise au point de taille, le tribunal se prononce sur la notion de quotas : « Il n’existe pas de limitation réglementaire ou légale du nombre d’actes que peut réaliser un infirmier par jour. »
Le jugement rendu à Toulon pourrait devenir un cas d’école, vu le nombre de dossiers en attente au parquet varois. Ce qui risque de faire tâche d’huile dans d’autres départements. « Sur toute la France, c’est incalculable le nombre d’infirmiers libéraux touchés par des actions de ce type », prévient en effet André Dahan, co-fondateur du collectif Info-des-Idel (visible sur Facebook) qui suit le sujet depuis la fin 2012 et a dénoncé différents cas dans les Bouches-du-Rhône. À Montpellier aussi, une affaire devrait susciter l’intérêt de la profession, bien qu’elle soit restée sous silence durant des mois… « J’ai perdu en première instance, mais la cour d’appel m’a donné raison en fin d’année dernière, confie Patrick Taillefer, Idel dans l’Hérault. J’étais poursuivi pour escroquerie ! J’ai réussi à montrer que je passais au minimum 15 minutes auprès de mes patients et, donc, que la qualité de soin était bien là. » Une lecture du droit qui ne convient pas à la CPAM qui s’est pourvue en cassation. À croire que ces dernières victoires judiciaires, après une série de défaites, redonne du souffle au collectif Info-des-Idel. En témoigne André Dahan qui annonce : « Nous allons lancer une souscription pour mener une action collective nationale et renégocier la NGAP. » À voir si cela suscitera un début de remise en question générale sur l’évaluation des actes infirmiers…
Les infirmières libérales, poursuivies par l’Assurance maladie pour des raisons de nombre d’AIS3 trop importants, qui ont déjà réglé les indus réclamés par leur Caisse, auraient tort de penser que la bataille est finie. Selon Me Danjard, qui a remporté l’affaire dans le Var, « le recours même après acceptation et après délais est recevable. Les infirmiers qui ont payé peuvent engager une procédure pour tenter de récupérer les indus versés ».