L'Anaes contre la douleur de l'enfant - L'Infirmière Magazine n° 167 du 01/01/2002 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 167 du 01/01/2002

 

PÉDIATRIE

Actualités

À l'occasion des 9es Journées de l'Unesco consacrées à la douleur chez l'enfant, on a pu discuter des dernières recommandations de l'Anaes sur le sujet. Bilan : l'évaluation de la douleur passe par des outils simples d'utilisation, tandis que son traitement est aussi non pharmacologique (distraction, relaxation...).

Dès sa naissance, l'enfant est susceptible de ressentir la douleur. La soulager s'avère pour les personnels soignants une obligation à la fois éthique et légale. « Aujourd'hui, la diffusion de l'information fait défaut. La plainte de l'enfant n'est pas assez reconnue. Parmi les soignants, beaucoup pensent encore que plus l'enfant est petit, plus sa douleur est minime. Faux, l'immaturité de son système nerveux le rend plus sensible que l'adulte », insiste le Dr Daniel Annequin, anesthésiste à l'hôpital Trousseau de Paris.

Des outils simples

Depuis mars 2000, les recommandations élaborées par l'Anaes(1) prônent une approche rationnelle de la souffrance avec des méthodes d'évaluation et des règles précises de prise en charge ambulatoire. Le terme « ambulatoire » recouvrant dans cette étude les soins à domicile, en consultations, en service d'urgences (y compris Smur et Samu) et en hôpital de jour. Dans son rapport, l'Anaes retient la définition de la douleur aiguë adoptée par la circulaire de la Direction générale de la santé du 11 février 1999 : « La douleur aiguë est une sensation vive et cuisante, qui s'inscrit dans un tableau d'évaluation rapide. » Chez l'enfant, les difficultés d'identification et d'évaluation de la douleur compliquent inévitablement sa prise en charge immédiate. L'utilisation d'outils adaptés permet d'établir son existence, d'apprécier son intensité, de déterminer les moyens antalgiques nécessaires, d'évaluer l'efficacité du traitement délivré et de l'adapter si nécessaire.

Simples d'utilisation, y compris par les parents après explication, les outils préconisés par l'Anaes diffèrent selon l'âge de l'enfant. Au-dessus de six ans, l'auto-évaluation réalisée par l'enfant à l'aide de l'ÉVA (Échelle visuelle analogique) s'avère tout à fait fiable, sous réserve d'explications adaptées à sa compréhension. En France, sa présentation verticale, dépourvue d'éléments ludiques, cote la douleur de zéro à dix. Entre quatre et six ans, deux outils d'auto-évaluation s'utilisent conjointement (par exemple l'ÉVA croisée avec la présentation de l'échelle de six visages FPS). Si leurs résultats ne concordent pas, le recours à l'hétéro-évaluation est alors nécessaire.

Comme aucune attitude spécifique de la douleur n'est utilisable comme marqueur, l'hétéro-évaluation se fonde sur une association de comportements évocateurs. Les outils de mesures validés et les plus utilisés sont : l'échelle d'Amiel-Tison pour les enfants de un mois à six ans, l'échelle OPS (Objective Pain Scale) à partir de deux mois, l'échelle Cheops (Children Hospital of Eastern Ontario Pain Scale) de un à six ans ou encore l'échelle DEGR (Douleur enfant-Gustave-Roussy) entre deux et six ans. À ce jour, pour l'Anaes, ces échelles constituent les critères les plus fiables lors du diagnostic de la douleur chez l'enfant et de l'évaluation de son intensité.

Distraire l'enfant

Le traitement antalgique doit s'adapter à l'intensité de la douleur. Dans toute pathologie, son administration s'effectue parallèlement au traitement étiologique. Son premier objectif : obtenir une analgésie rapide, avec une baisse de l'intensité douloureuse au-dessous de 3/10 à l'ÉVA, et/ou un retour aux activités de base de l'enfant. Par la suite, le traitement doit s'adapter en fonction de la douleur résiduelle. Enfin, la prise systématique d'antalgiques prévient la réapparition des douleurs. Pour permettre l'adaptation au traitement ambulatoire à domicile, l'Anaes insiste pour que les personnels médicaux tiennent les parents et l'enfant informés du détail des modalités des soins mais aussi des éventuels effets secondaires des antalgiques. « Les ordonnances sont trop imprécises. Elles doivent être évolutives et comporter un deuxième antalgique plus fort dans le cas où la douleur persiste », observe le Dr Annequin.

Les recommandations rappellent également l'intérêt des moyens non pharmacologiques (distraction, relaxation, hypnose). Par exemple, le simple fait de distraire l'enfant par la lecture permet de diminuer considérablement sa détresse ou sa douleur. Elles insistent également sur la nécessité de la présence des parents lors de prélèvements ou de soins douloureux(2). Et cela, à chaque fois que l'enfant et sa famille en expriment le souhait. En effet, selon l'Anaes, un contact physique ou oral entre les parents et l'enfant garantit la qualité des soins administrés. Le jeune patient doit donc recevoir en temps utile des explications adaptées à son niveau cognitif sur l'origine de ses douleurs ou celles provoquées par un geste éventuel. Par ces recommandations, l'Anaes rappelle avant tout que l'information relative au soin est un droit de l'enfant mais aussi une obligation pour le personnel soignant.

1- Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé.

2- Cf. « Soigner, avec les parents » in « L'Infirmière magazine », n° 166, décembre 2001, pp. 36-40.

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