La culture à l'hôpital - L'Infirmière Magazine n° 167 du 01/01/2002 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 167 du 01/01/2002

 

Dossier

- Spectacles, ateliers de création, animations musicales, les initiatives fleurissent dans les établissements de santé.- Où l'épanouissement de l'art fait même l'objet de programmes ministériels - Car, quand l'hôpital devient terre de culture, c'est toujours pour le bien-être du malade.

« Quand il n'y a plus rien face à la mort ou à la souffrance, il ne reste que la culture, fait remarquer la comédienne Jane Birkin. Je ferais une similitude entre l'hôpital et les zones de guerre où je me suis rendue. À Sarajevo, quand j'ai eu peur, je me suis mise à chanter Frère Jacques. Au Kosovo, les soignants de Médecins du monde ont réussi par la peinture et le dessin à entrer en contact avec des enfants traumatisés. »

La Culture à l'hôpital, une préoccupation européenne

Prolixe, vive et chaleureuse, la comédienne sait trouver les mots pour faire partager ses convictions. Pour elle, la culture, c'est un refrain qui vous fait vibrer, les couleurs d'une peinture qui vous font voyager, un spectacle, un livre dont l'émotion vous étreint ou qui vous fait rire à gorge déployée. C'est un plaisir de l'âme... Le malade n'a-t-il pas, plus qu'un autre, besoin de ce petit bonheur pour échapper un instant à sa souffrance ? Souffrance physique mais aussi psychique... Détresse du malade paraplégique qui voit sa vie basculer dans un accident de voiture. Panique de l'enfant qui doit tendre son bras pour une prise de sang. Désolation du patient cancéreux exténué par les séances de chimiothérapie qui n'en finissent pas de se répéter. Humiliation de la personne âgée qui ne peut plus faire sa toilette seule. Tourment du malade souffrant de troubles psychiatriques qui n'a que ses cris pour exprimer son mal-être. « La présence de l'art à l'hôpital offre la possibilité au malade de passer de l'état de personne assistée à celui d'individu et de retrouver ainsi une autonomie masquée par la maladie », déclarait le 5 février 2001 Dominique Gillot, alors secrétaire d'État à la Santé, à l'occasion des premières rencontres européennes de la culture à l'hôpital, organisées par le ministère de la Culture et de la Communication en partenariat avec son homologue anglais (Department for Culture, Media and Sport) et le secrétariat d'État à la Santé. Parrainée par un comité d'honneur composé d'artistes (dont les comédiens Jane Birkin, Howard Buten, la chorégraphe Mathilde Monnier...), de soignants (dont Brigitte Challande, infirmière de secteur psychiatrique et coordinatrice des activités artistiques à l'hôpital de La Colombière de Montpellier) et d'administratifs (dont des directeurs d'hôpitaux et d'agences régionales d'hospitalisation), cette manifestation a permis un tour d'horizon des pratiques artistiques au sein des hôpitaux français. Objectif : tisser un véritable réseau pour développer la culture à l'hôpital.

En ouverture du colloque, Catherine Tasca, ministre de la Culture et de la Communication, a constaté avec satisfaction la présence de quelque 500 artistes et soignants et la représentation de dix-sept nationalités. « Qu'un thème comme la culture à l'hôpital puisse à ce point mobiliser, témoigne au-delà des murs de l'hôpital, d'une demande forte de la part de nos concitoyens qui souhaitent des liens plus étroits entre l'art et la vie... » Puis, elle a salué la collaboration entre artistes et soignants et insisté sur le rôle d'associations comme le Rire médecin, les Musicoliers, Enfance et musique, qui ont précédé l'engagement des gouvernements. « L'hôpital est dans la ville un lieu où l'homme vit dans une autre relation avec le temps et avec lui-même, a-t-elle déclaré. C'est peut-être parce qu'il est dans un moment de fragilité, de rupture avec le rythme ordinaire des actifs, qu'il peut s'ouvrir à des curiosités nouvelles, découvrir sa propre sensibilité et s'ouvrir à des relations parfois durables pour des rencontres esthétiques. »

Initiatives ministérielles

Depuis trois ans, les pouvoirs publics se sont intéressés à la nécessité d'une présence culturelle dans l'hôpital. En 1998, la ministre de la Culture de l'époque, Catherine Trautmann, lançait aux côtés de Bernard Kouchner, ministre de la Santé, le programme Culture à l'hôpital, afin de développer des projets artistiques auxquels des grandes entreprises privées ont apporté leur soutien financier. Ainsi, le Cercle des partenaires de la culture à l'hôpital regroupant des entreprises et des fondations (Sanofi, Lego-France, Fondation Air France...) fut créé et quelque 700 jumelages furent conclus. L'année suivante, les deux ministres signaient le 4 mars 1999 une convention relative au développement des activités culturelles dans les hôpitaux afin de conforter le dispositif de jumelages et de mettre en place deux actions majeures : le développement de la lecture à l'hôpital et l'introduction d'une nouvelle fonction, le responsable culturel hospitalier chargé de coordonner la politique culturelle au sein de l'hôpital. Mais ce n'est pas tout : les bibliothèques hospitalières ont aussi pu prétendre à se développer. D'après une étude réalisée en 1992 par les ministères de la Santé avec l'aide de la Fondation de France, sur les 862 hôpitaux ayant répondu à l'enquête, 711 ont une bibliothèque, avec des disparités énormes selon les établissements. Ces bibliothèques occupent des locaux allant de la simple armoire (le plus souvent) à la véritable médiathèque. Elles peuvent être ouvertes à la fois aux malades et aux salariés de l'hôpital et sont gérées par du personnel bénévole et peu formé le plus souvent.

Une bibliothèque dans chaque hôpital

Avec la convention de 1999, les pouvoirs publics encouragent la création d'une bibliothèque dans chaque hôpital. Elle doit faire l'objet d'une convention entre l'établissement de santé, la commune ou le département, la Direction régionale des affaires culturelles (Drac) et éventuellement une association. Cette convention définit les relations entre la bibliothèque de l'hôpital et la bibliothèque municipale (et à défaut départementale) : aide logistique lors de la création, formation du personnel, dépôts de livres, organisation commune d'animations... Les ouvrages doivent être variés, tout comme les supports (livres, revues, cassettes). Un minimum de 3 000 livres est indispensable, avec un renouvellement d'environ 10 % chaque année. Le libre accès aux collections doit être la règle, la bibliothèque se situant dans des locaux adaptés avec une superficie adéquate (140 m2 pour un hôpital de 500 lits par exemple), repérables et accessibles à tous les malades, quelle que soit leur mobilité. En complément, un chariot d'ouvrages permet aux malades immobilisés de choisir eux-mêmes leurs lectures.

La bibliothèque fonctionne avec un bibliothécaire engagé par l'hôpital ou détaché par une bibliothèque publique. D'après les recommandations internationales, on prévoit un bibliothécaire et un aide-bibliothécaire pour un hôpital de moyen et long séjour de 300 lits ou pour un hôpital de moyen et long séjour de 400 à 500 lits. Des bénévoles peuvent renforcer l'équipe ou, en cas d'établissements de petite taille, assurer l'activité bibliothèque à condition de collaborer avec des professionnels des bibliothèques publiques.

L'art pour l'art

Quant à la fonction de responsable culturel hospitalier, elle devrait concerner 100 postes sur cinq ans (1999-2003), attribués à des salariés déjà en place dans l'hôpital ou bien à des personnes bénéficiant du programme « emplois jeunes ». Les responsables culturels hospitaliers ont pour tâche de coordonner les activités culturelles dans leurs établissements, en lien avec le personnel soignant, les équipements culturels situés dans l'environnement de l'hôpital, les associations et les bénévoles. Au total, trois millions de francs auront été consacrés à ce programme en 1999. Concrètement, la place occupée sur le terrain par la culture à l'hôpital épouse des formes variées. Un des premiers domaines investis fut celui de la psychiatrie. À l'hôpital La Colombière (Montpellier), l'association Les murs d'Aurelle, au sein de la maison des expressions, propose des ateliers d'écriture, de danse ou de théâtre à des malades souffrant de troubles psychiatriques. Leur vocation première est artistique et non thérapeutique. « Le principe fondateur de chaque atelier est de créer une oeuvre pour un public, explique Brigitte Challande, coordinatrice. Les patients réalisent des spectacles de théâtre, des publications, des expositions grâce à l'encadrement d'artistes professionnels. » Au sujet d'un spectacle de 1996, Gilgamesh ou les eaux lointaines, réunissant bien portants et autistes, Christine Jouve, danseuse commente : « Il y a une dimension artistique mûre, et c'est là sans doute sa valeur essentielle : quand la question du qui-est-autiste et qui-ne-l'est-pas n'a plus de pertinence. »

Sortir du néant

Créer, c'est sortir du néant. « L'activité artistique au centre hospitalier spécialisé de Pierrefeu (Var) s'inscrit dans le cadre général de l'évolution des modes de prise en charge, estime Armand Morazzini, le directeur. Il s'agit pour les patients d'un moyen de s'intégrer à la structure mais aussi d'une démarche privilégiant la réinsertion, en ouvrant l'hôpital sur l'extérieur. » Au départ, l'atelier d'art animé par Carla Van der Werf, sculpteur, a été créé pour fêter le centenaire de l'hôpital en 1987, mais fort de son succès, il s'est poursuivi et s'est renforcé grâce à l'intervention d'autres professionnels d'arts plastiques. Un infirmier, Christian Petit, propose par ailleurs un atelier de sérigraphie et gravure pour concevoir des affiches, reproduire des oeuvres, réaliser et éditer des recueils de poèmes. En définitive, 500 patients s'investissent chaque année dans les différents ateliers. « Par la sculpture, la peinture, les malades retrouvent une certaine forme d'autonomie et prennent davantage conscience de leur identité, explique Carla Van der Werf. Mais ne nous méprenons pas, notre objectif n'est pas thérapeutique. Je ne m'intéresse pas à la pathologie du malade et ne cherche pas à interpréter ses créations. Je donne des conseils, le stimule, propose des matériaux, discute des couleurs. Si je le soutiens, je ne touche jamais à une peinture. »

Une galerie de 400 m2

L'atelier d'art peut s'enorgueillir d'avoir rempli sa mission. Une galerie d'exposition de 400 m2 a été créée en 1992 dans l'enceinte de l'hôpital et a été distinguée en tant que site pilote par le comité européen de coordination du projet L'Art à l'hôpital, projet placé sous l'égide de l'Unesco et qui s'inscrit dans le cadre de la décennie mondiale du développement culturel. De plus, certains patients du CHS de Pierrefeu tels que Patrick Balivet et Thomas Evans ont vu leur travail artistique reconnu et leurs oeuvres ont été exposées à l'extérieur de l'hôpital.

Il ne s'agit pas non plus de découvrir un artiste derrière chaque patient. « Les activités artistiques sont proposées à tous les malades. Ce sont des espaces de liberté dans un quotidien rythmé par les soins, les prises de médicaments, les repas à heures fixes... La culture, c'est du superflu indispensable pour mieux vivre, estime Madeleine Abassade, responsable culturel à l'Institut Marcel-Rivière (Yvelines) qui accueille également des malades souffrant de troubles psychiatriques. Notre établissement a toujours eu la volonté de développer les actions culturelles. Mais il n'est pas toujours facile de trouver des financements et, au fil des années, le risque est de se scléroser dans des habitudes. Le programme national nous a donné un second souffle. Il a officialisé ma mission, moi qui suis à ce poste depuis 17 ans. Puis, il nous a permis de financer et d'organiser des actions grâce à deux jumelages, l'un avec l'association culturelle de Trappes pour le Festival Banlieues'art et l'autre avec le théâtre Le Prisme pour le Festival du polar dans la ville de Saint-Quentin-en-Yvelines. »

Madeleine Abassade gère un programme à l'année avec ateliers artistiques, expositions, débats, sorties, spectacles. « Nous avons la chance d'avoir un théâtre de 300 places au sein même de l'hôpital. Environ 80 personnes se déplacent pour les spectacles, ce qui représente une mobilisation importante en rapport avec les 280 lits que compte l'établissement. Toutefois, nous aimons organiser des spectacles dans des lieux plus insolites. Lors du Festival du polar dans la ville, nous avons transformé la cafétéria en théâtre, ce qui nous a valu un franc succès. En juin, pour les vingt ans de la fête de la musique, nous avons décidé d'organiser des manifestations dans la cafétéria, les services et le parc de l'hôpital. Nous avons été surpris par l'enthousiasme et le bonheur de tous. »

Des malades citoyens

« Ce qui est extrêmement enrichissant, c'est la relation qui se crée entre soignants et soignés lorsqu'ils participent ensemble à une activité culturelle. Les malades se sentent alors grandis, considérés, ils ont à ce moment-là un statut de citoyen et non de malade, estime Fabienne Tisnès, infirmière générale à l'Institut Marcel-Rivière. En plus, l'art peut permettre la réinsertion sociale. Les participants (soignants et soignés) de l'atelier chant ont été invités à chanter lors d'un repas de quartier organisé par la ville de Trappes. »

À Aix-en-Provence, un véritable pont s'est créé entre la ville et l'hôpital psychiatrique. Le bâtiment 3 bis F, composé de cellules désaffectées, a d'abord été transformé en résidence d'artistes puis a été réhabilité en 1992 en centre culturel orienté vers l'art contemporain, la ville d'Aix étant particulièrement sous-équipée dans ce domaine. « Les ateliers de chant, dessin, danse, théâtre sont proposés gratuitement aux personnes hospitalisées et pour un tarif annuel de 150 F aux Aixois », explique Jean-Luc Pruvost, l'un des deux infirmiers qui travaille à temps plein au sein de 3 bis F. Et l'affaire marche. Citons l'atelier chant du lundi qui réunit quinze participants dont six patients ou l'atelier théâtre du mardi qui réunit plus de vingt-cinq personnes dont quinze patients. « Il est vrai que certains patients viennent plus ou moins régulièrement, fait remarquer l'infirmier. Au cours de l'année 2000, 105 patients hospitalisés ont participé aux ateliers et on a compté 1 400 passages au total. »

Pour étoffer son programme, 3 bis F a mis sur pied des jumelages. Les plasticiens Bartholani et Caillol ont coordonné la création d'une oeuvre collective inspirée d'un tableau de Van Gogh en 1999. La même année, Élodie Moirenc a proposé une activité artistique inédite - registre art éphémère - avec l'organisation d'une grande fête : création des décors, cartons d'invitation, buffet, animation musicale... Les patients et l'ensemble des Aixois ont pu inviter leurs familles. Résultat : 300 personnes furent de la fête. En 2000, la photographe Susanne Hetzel a animé un atelier, chaque participant devant réaliser un portrait et des clichés d'objets destinés à le représenter.

« Les artistes d'art contemporain nous bousculent, ils nous poussent à nous interroger sur notre existence, estime Jean-Luc Pruvost. Au 3 bis F, les personnes qui viennent de l'hôpital ne sont pas réduites à leur état de malade, étiquettes névrotique ou psychotique. Comme tout un chacun, elles ont des potentialités créatives qu'elles vont pouvoir exprimer. En cela, notre centre contribue à modifier le regard habituellement négatif que l'on porte sur la psychiatrie. »

Des précurseurs à Montpellier

Depuis déjà plusieurs années, la culture investit également l'hôpital général. « Dès 1996, nous avons créé une commission d'animation, confie Marie-Jeanne Calmès, cadre infirmier en médecine psychologique à l'hôpital Saint-Éloi de Montpellier. Nous étions très sollicités par des artistes et nous avions envie d'avoir une politique culturelle commune et cohérente sur tout le CHU. Nous nous réunissons tous les deux mois et nous privilégions les projets dans lesquels les équipes soignantes s'impliquent. »

Les actions culturelles se sont aujourd'hui largement développées. « Nos premières interventions sur la musique à l'hôpital datent de 1989. Nous intervenons aujourd'hui dans une douzaine d'hôpitaux et il existe désormais une quinzaine d'associations dans ce secteur », explique Philippe Bouteloup, directeur de Musique et santé.

Les artistes qui interviennent sont bien sûr des musiciens confirmés mais aussi des personnes qui ont des compétences psychopédagogiques et une connaissance minimale du milieu hospitalier. En ce sens, la faculté de Strasbourg propose une formation de musiciens destinés à intervenir à l'hôpital. « Sur le plan pédagogique, on ne s'adresse pas de la même manière à un enfant de trois ans et à un adulte, précise-t-il. Quant à l'hôpital, c'est un lieu où il faut respecter des règles d'éthique telles que l'anonymat, l'organisation des soins ou l'hygiène. On ne fait pas souffler plusieurs personnes dans le même harmonica ! »

Tours de pistes

Musique et santé prend part à un jumelage organisé entre l'hôpital de Montereau (Seine-et-Marne) et le festival Confluences de la ville. Ce jumelage est financé en partie par la fondation Mac Donald. L'harmoniciste Jean-Jacques Miltau anime des ateliers dans le service de pédiatrie et prévoit de clore son action en juillet 2002 à l'occasion du festival Confluences par un concert où seront conviés tous les enfants hospitalisés en pédiatrie pendant l'année.

Autre action en cours, soutenue par la fondation Bayer santé : des musiciens de l'orchestre national symphonique d'Île-de-France font découvrir la musique classique à des enfants hospitalisés à l'hôpital Robert-Debré (Paris) qui seront ensuite conviés à une répétition puis à un concert. À quoi sert la musique ? « À rien, répond Philippe Bouteloup... et c'est pour cela qu'elle est indispensable... On chante au bébé qui vient de naître, les amis partagent un moment de bonheur en grattant ensemble la guitare... Pourquoi être privé de la musique à l'hôpital alors que l'hospitalisation est ponctuée d'attentes et de multiples temps morts ? En outre, nos expériences semblent démontrer que la musique contribue à humaniser l'hôpital... »

Au CHU de Brest, depuis 1998, tout un service de chirurgie pédiatrique s'est mobilisé autour de la musique... « La moitié de l'équipe, soit 16 personnes, a suivi une formation musicale de trois jours minimum et un étudiant du centre de formation musicale de Rennes est venu en stage tous les jeudis matin de décembre à juin dernier. Enfin, nous avons une aide-soignante, Yveline Trébouta qui s'est prise au jeu et apprend la guitare depuis un an », explique Marie-Aline Le Bourhis, cadre infirmier.

Bâton de pluie et maracas

« Nous faisons des petites prestations à l'occasion de Halloween, de Noël, du mardi gras, accompagnés par les instruments que nous avons achetés pour le service, le balafon, le piano à pouce, le bâton de pluie ou des maracas. Mais tout peut être prétexte à chanter, seul ou à deux ou trois, de façon spontanée dans une chambre », raconte Yveline... en chantant ! La toilette : « Trois petits ours à la rivière s'en allaient se débarbouiller. Ils se posaient sur leurs derrières et se frottaient le bout du nez. Et plouf, plouf. Et floc, floc. » Les soins : « Les petits chardons don don, ça fait des boutons ton ton, ça pique le doigt, ça pique le bras. »

Au début, ce n'était pas facile de chanter devant les collègues : « Nous chantions tout doucement dans notre coin... Mais maintenant nous avons pris de l'assurance, estime Yveline. Nous continuons même à chanter quand les médecins entrent dans une chambre. »

« Les pratiques artistiques peuvent nous aider à communiquer avec les malades. Ces dernières années, les soignants sont devenus des techniciens capables de prouesses thérapeutiques mais souvent maladroits dans leurs relations avec le malade, estime Jean-Jacques Romatet, directeur du CHU de Nice. Les acteurs culturels peuvent même aider à redorer l'image d'un hôpital. Sur le site de l'hôpital de l'Archet où nous avons subi une crise en raison d'émanations toxiques, nous envisageons de mener des projets artistiques qui pourraient contribuer à ce que le personnel se réconcilie avec son hôpital. D'une manière générale, je viens de recruter un emploi jeune pour occuper la fonction de responsable culturel. »

Vers les journées de l'art à l'hôpital

Si les activités culturelles se développent de façon considérable, les disparités peuvent être énormes d'un établissement à un autre. Rien n'oblige un directeur d'hôpital à engager un responsable culturel ou à soutenir la création de jumelages. Mais les pouvoirs publics semblent fermes. « Il faut qu'aujourd'hui nous puissions poursuivre l'action, l'amplifier, pour rendre habituelle et familière la présence de l'art à l'hôpital », a conclu Catherine Tasca. Dans le prolongement des rencontres de Strasbourg, la ministre a proposé d'organiser chaque année au printemps des journées de l'art à l'hôpital.

Association Tournesol

Tournesol propose depuis 1990 aux services d'animation des hôpitaux (court, moyen et long séjour) des artistes professionnels et coordonne leurs actions avec les malades et le personnel, en relation avec la direction hospitalière, les surveillantes des services et les médecins. Ils interviennent dans une vingtaine d'établissements et proposent un large choix d'activités : concerts, contes, théâtre, danse, ateliers d'art et d'expression, exposition de photos et de peintures.

Hôpital Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris. Tél. : 01 42 40 23 26.

Enfance et musique

Cette association entend promouvoir l'éveil musical du tout-petit grâce à des interventions en crèches, à l'hôpital, en service de protection maternelle et infantile. L'association produit des disques adaptés aux jeunes enfants et édite également des ouvrages pour les parents ou les professionnels de l'enfance. Enfin, elle propose aux professionnels de la petite enfance (infirmières, éducateurs de jeunes enfants...) des stages de formation continue pour chanter, jouer avec des instruments de musique et redécouvrir la poésie des gestes quotidiens.

17, rue Étienne-Marcel, 93500 Pantin. Tél. : 01 48 10 30 00 http://www.enfancemusique.asso.fr

Comment jumeler hôpitaux et équipements culturels ?

Un hôpital ou le service d'un hôpital peut établir un jumelage avec un équipement culturel : musée, théâtre, bibliothèque, conservatoire... Sur une initiative de l'hôpital, ce jumelage se construit en lien avec la Direction régionale des affaires culturelles (Drac). Il doit respecter quatre critères : élaborer avec l'équipement un programme artistique précis (expositions, débats, découvertes d'auteurs et de livres, spectacles ou lectures, concerts, films...), permettre l'implication des artistes de la région, se dérouler sur une période minimale d'une année et enfin faire l'objet d'un financement de la Drac ou de l'équipement culturel. Les autres sources de financement sont le ministère de la Culture et de la Communication, les collectivités territoriales, les hôpitaux concernés, les institutions sociales locales et enfin des entreprises (Institut électricité santé, Laboratoire Glaxo Wellcome, Lego France, Sanofi) et des fondations (Air France, Banques CIC pour le Livre, Bayer santé, Hachette, France télécom, Ronald Mc Donald, Suez-Lyonnaise des Eaux).

Une nouvelle fonction à l'hôpital : le responsable culturel

C'est une chose de vouloir introduire les pratiques artistiques à l'hôpital, encore faut-il qu'une personne s'en occupe. Depuis la signature de la convention nationale du 4 mai 1999 entre les ministères de la Culture et de la Santé, la notion de responsable culturel a vu le jour. Pour exercer cette nouvelle fonction, on peut faire appel à une personne déjà en poste (à qui ce rôle est dévolu) ou à une personne engagée spécialement, diplômée d'une formation culturelle et/ou ayant une expérience du monde culturel et associatif. Sous l'égide du directeur de l'hôpital, le responsable culturel orchestre la politique culturelle de l'établissement, propose et met en oeuvre un ou des jumelages, organise les événements culturels de la vie hospitalière (expositions, spectacles, concerts...), coordonne la bibliothèque, participe à la définition de la politique des arts plastiques à l'hôpital et négocie les commandes publiques. Enfin, il recherche les budgets annexes pour financer les projets.

Musique et santé

D'abord liée à Enfance et musique, Musique et santé est aujourd'hui une association autonome qui développe des projets musicaux et artistiques dans le secteur de la santé et du handicap, dans des services de pédiatrie, néonatologie, pédopsychiatrie et gériatrie. Elle poursuit également une activité de formation et de recherche avec les équipes soignantes, entend promouvoir une démocratisation de la culture et améliorer les conditions d'accueil des personnes hospitalisées.

9, passage Saint-Bernard, 75011 Paris. Tél. : 01 55 28 81 00 http://www.musique-sante.com

Le Rire médecin

Association créée en 1991, Le Rire médecin emploie une trentaine de clowns professionnels qui interviennent deux fois par semaine, onze mois sur douze, dans les services pédiatriques d'une dizaine d'hôpitaux français. Ces comédiens entendent apporter un peu de fantaisie, de rêve et d'humour aux petits malades. Ils reçoivent une formation initiale de plusieurs mois pour adapter leur jeu à l'univers hospitalier, puis un temps de formation complémentaire une fois par mois afin de renouveler l'inspiration et la création.

18, rue Geoffroy-l'Asnier, 75004 Paris.

Tél. : 01 42 72 41 31