« Le compte épargne temps est très attendu... » - L'Infirmière Magazine n° 168 du 01/02/2002 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 168 du 01/02/2002

 

Emmanuelle Quillet

Questions à

Emmanuelle Quillet est responsable du dossier des ressources humaines à la Fédération hospitalière de France (FHF). Elle a fait partie de la délégation FHF qui a rencontré le 30 janvier dernier Élisabeth Guigou au sujet de la mise en place des 35 heures. Mise au point.

Au mois de janvier, la FHF souhaitait un report pour la signature des accords locaux, mais plus maintenant. Pourquoi ?

Oui, nous ne demandons plus de report. La date du 28 février est la date limite pour les établissements. Nous avons pris en compte l'évolution de la situation et la récente montée en charge des accords dans le secteur sanitaire. Nous continuons de penser que le délai était très court. L'accord national a été signé en novembre, les décrets sont parus en décembre et en janvier... Nous avons peut-être demandé ce moratoire un peu tard, car les établissements sanitaires se sont très vite lancés dans les négociations, alors autant conclure avant le 28 février...

Combien y a-t-il d'accords aujourd'hui ?

Plus de 200 accords ont été signés (à la date du 8 février).

Mais il existe plus de 1 000 établissements sanitaires en France...

Les accords signés concernent une majorité de gros établissements, voire d'ensembles d'établissements, comme l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Ces accords concernent une majorité des agents de la fonction publique hospitalière.

Et pour le secteur médicosocial ?

Pour ce secteur, la situation est plus alarmante. Nous avons précisé à Élisabeth Guigou qu'un report demeurait nécessaire pour les établissements du secteur social et médicosocial. Pour ces établissements, le financement de l'application des 35 heures est beaucoup plus compliqué car ils ont une double source de financement : des enveloppes des conseils généraux, et le prix de l'hébergement réglé par les familles. En fait, les situations de ces établissements sont très variables selon les départements. Dans beaucoup de cas, le conseil général n'a pas encore pris de dispositions de financement pour la mise en place des 35 heures. À ce jour, nous avons comptabilisé 37 départements dans ce cas.

La FHF a demandé l'abaissement, voire la suppression de la taxe sur les salaires pour financer les 35 heures dans ces établissements. Que vous a répondu Élisabeth Guigou ?

La FHF a en effet proposé la suppression de la taxe sur les salaires, qui pourrait être assortie de l'assujettissement à un taux faible de TVA. Nous pensons que cette mesure est la seule qui permette de ne pas accroître la charge financière des résidents et de leurs familles dans le secteur social et médicosocial. Cependant, le ministère de l'Emploi et de la Solidarité nous a donné une réponse négative. Il craint une contagion avec le secteur bancaire.

Beaucoup s'interrogent sur le fonctionnement du compte épargne temps. Avez-vous eu des précisions à ce sujet ?

Le compte épargne temps est très attendu dans les établissements, tant du point de vue des agents que de la direction. C'est une innovation qui doit nous permettre d'ajuster la différence entre la diminution du temps de travail par agent et le nombre de postes alloués par les ARH. À ce sujet, la FHF a demandé la création de 50 000 postes, mais le ministère ne veut plus revenir sur ce point... Donc, le CET sera la seule variable d'ajustement. Le ministère nous a promis que le projet de décret passerait en Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière à la mi-février. Pour l'instant, nous n'avons pas encore de précisions à ce sujet, car les projets sont souvent remaniés. Ce que nous avons demandé au ministère, c'est la création et l'abondement d'un fonds de gestion du CET qui pourrait être confié à la Caisse des dépôts et consignation, à l'instar du fonds pour l'emploi hospitalier. À ce sujet, Élisabeth Guigou nous a répondu que le financement du CET serait fait en 2003, sous la forme de la création d'un fonds mutualisé alimenté par une cotisation des établissements.

Autre sujet d'inquiétude, les astreintes et les permanences sur place ?

Pour les astreintes, tout a été réglementé, le décret est paru. Et cela ne nous paraît pas poser de problèmes. En ce qui concerne les permanences à l'établissement, les choses sont beaucoup plus compliquées. Je sais qu'il y a une étude, en ce moment, qui est menée par le ministère. Mais je ne peux pas vous en dire plus, je n'ai pas connaissance des éléments.

Avec toutes ces attentes, la tension sociale dans les établissements ne risque pas de s'atténuer...

La situation générale n'est pas très agréable, mais il ne faut pas mettre de l'huile sur le feu. Cependant, il faut dire que la dégradation du climat social dans les établissements a pris dans certains cas des formes inacceptables : agressions envers les équipes de direction, dégradations, consignes de désobéissance compromettant le fonctionnement normal de l'établissement. Nous l'avons signalé à Élisabeth Guigou. Elle a déclaré qu'elle comptait sur les efforts de tous pour maintenir le dialogue, mais que de telles actions devraient être sanctionnées et qu'elle prendrait des dispositions claires.

Et du côté des médecins hospitaliers, comment s'organise la réduction du temps de travail ?

Nous avons précisé à la ministre que nous ne sommes pas d'accord avec le dispositif proposé. Car les mesures prévues pour l'accompagner sont notoirement insuffisantes au regard de la pénurie de médecins dans certaines disciplines (l'anesthésie par exemple). Ainsi, faute de mesures d'accompagnement énergiques, nous avons signalé au ministère que le dispositif demeurerait inapplicable, ou aurait des conséquences graves sur l'offre de soins dans les régions qui présentent déjà un déficit d'attractivité.

Dans vos propositions sur l'avenir de l'hospitalisation publique, vous préconisez la création d'un observatoire des emplois et des métiers à l'hôpital. Cette proposition a-t-elle été retenue ?

Oui. Cet observatoire des emplois et des métiers à l'hôpital est en cours d'élaboration, il regroupe le secteur privé et public. La composition est actuellement menée par la Direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS). Mais, pour l'instant, nous n'avons pas encore de date de réunion.