Nous travaillons de nuit dans un service de réanimation. Nous avons récemment rencontré un problème de fonctionnement avec un scope dit « trois pistes » (pouls, pression artérielle ou brassard et saturation en oxygène). Le 28 janvier dernier, nous avons signalé à notre cadre infirmier que le brassard ne fonctionnait pas et « monsieur bio-médical » est alors venu le vérifier. Le lendemain, le brassard ne fonctionnait toujours pas. Le malade en question était hypertendu et nous devions donc surveiller sa pression artérielle avec un tensiomètre manuel. Nous avons répété à notre cadre que le brassard du scope ne fonctionnait pas. Sa réponse a été la suivante : « Le brassard fonctionne très bien sur le personnel, il y a un problème avec le malade. » Le 4 février, nouveau problème : cette fois-ci, le malade vient en réanimation pour une surveillance postopératoire. Nous décidons d'utiliser le scope de transport afin de pouvoir le surveiller correctement. Le lendemain, il a rencontré des difficultés hémodynamiques. Le réanimateur a alors prescrit des drogues de type dopamine et noradrénaline. Heureusement, nous avions le scope de transport pour le surveiller. Au vu des problèmes rencontrés, le réanimateur a décidé de poser un cathéter artériel afin d'avoir une grande précision dans notre surveillance. Le cadre infirmier était évidemment au courant de la situation. Finalement, le 7 février, un technicien a changé la pompe du brassard qui ne fonctionnait plus. S'il y avait eu un problème majeur, qu'encourions-nous aux yeux de la loi et qui était responsable ? Car nous sommes toujours, mes collègues et moi, révoltés. - L'Infirmière Magazine n° 172 du 01/06/2002 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 172 du 01/06/2002

 

Notre expert vous répond...

Juridique

• Il est clair que la responsabilité du cadre infirmier dans ce cas précis apparaît comme pleine et entière. En effet, le cadre ne participe pas, en principe, directement aux soins, mais a pour fonction d'encadrer l'équipe infirmière. En cela, il est tenu de veiller à la bonne application du décret de compétence par son équipe. En l'espèce, l'attitude du cadre est fautive puisqu'il n'a pas reconnu le caractère défectueux de l'appareil et n'a donc dressé aucun rapport d'incident à la direction. Sa négligence est alors fautive et aurait engagé sa seule responsabilité. Néanmoins, il convient de rappeler, dans de telles circonstances, l'importance du dossier de soins infirmiers. S'il y avait eu un accident et qu'aucune trace écrite de vos diverses réclamations auprès du cadre n'avait pu être produite, comment être sûr que le cadre aurait reconnu sa faute ? Le risque que le cadre nie l'existence de toute réclamation de votre part n'est pas négligeable. D'où l'importance primordiale pour l'équipe infirmière de nuit d'avoir consigné par écrit dans le dossier de soins ses interrogations quant au fonctionnement du scope et les réponses fournies par le cadre infirmier. Le dossier de soins, en cas de litige, constitue une véritable pièce à conviction. S'il est couvert par la règle du secret professionnel tout comme le dossier médical, le secret peut être levé au profit des juges d'instruction agissant dans le cadre des pouvoirs qui leur sont conférés. Consigner par écrit dans le dossier de soins ce type d'incident, au vu de la valeur juridique incontestable sur le plan de la preuve, ne peut donc être que vivement recommandé. En outre, pour lui donner encore plus de valeur, l'infirmière ne manquera pas de respecter quelques règles élémentaires dans la rédaction du dossier de soins :

- nécessité de la plus grande précision possible dans la rédaction du dossier ;

- nécessité de dater et d'horodater chaque nouvel incident de ce type ;

- nécessité de signer de manière lisible chaque intervention afin que son auteur soit clairement identifiable. Les abréviations telles que AS ou IDE sont à proscrire.