Encore trop peu de donneurs - L'Infirmière Magazine n° 173 du 01/07/2002 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 173 du 01/07/2002

 

GREFFES

Actualités

Grâce à la mise en place d'un arsenal juridique et de structures adéquates, le prélèvement d'organes s'est considérablement amélioré en France durant ces dix dernières années. Malheureusement, la demande, estimée à 10 020 personnes en 2000, demeure trois fois supérieure à l'offre...

D'un point de vue législatif, l'article 2 de la loi Caillavet du 22 décembre 1976 instaurait que « des prélèvements peuvent être effectués à des fins thérapeutiques ou scientifiques sur le cadavre d'une personne n'ayant pas fait connaître de son vivant son refus d'un tel prélèvement ». Depuis, la loi hospitalière du 31 juillet 1991 a permis la planification de l'activité de transplantation. Enfin, la loi bioéthique du 29 juillet 1994 a confirmé les principes de libre consentement, de gratuité et d'anonymat du don. Elle a aussi établi des règles strictes de sécurité sanitaire ainsi qu'un dispositif de biovigilance.

La mise en place de l'Établissement français des greffes (EFG) a également contribué à l'amélioration du prélèvement des greffons. L'EFG est un organisme public national d'État sous tutelle du ministre de la Santé, créé par l'article 56 de la loi du 18 janvier 1994. Il vient remplacer l'association France transplant. Ses missions sont d'optimiser les conditions de prélèvements et d'attributions des greffons dans le respect des principes éthiques et des règles juridiques.

Évolution chiffrée

Environ 3 000 greffes d'organes sont effectuées en France chaque année, dont les deux tiers sont des greffes de reins (à peu près 2 000). Le nombre de donneurs a progressé en France depuis 1996 mais n'a cependant pas permis de compenser le nombre de demandeurs. On comptait 3 115 donneurs en 1998 contre 9 200 demandeurs. Le rapport est passé à 3 211 donneurs pour 10 020 demandeurs en 2000. Entre 1996 et 2001, le recensement des personnes en état de mort encéphalique - et donc potentiellement donneuses - a augmenté de 110 % (1 062 en 1996 et 2 238 en 2001). Il faut cependant corriger ces chiffres à la baisse car une part non négligeable des donneurs potentiels sont âgés (donc non prélevés) et le taux du refus de prélèvement par les familles reste élevé (près de 30 %). Le taux de donneurs prélevés en France est de 17,8 donneurs par million d'habitants. L'objectif fixé pour la fin 2003 est d'atteindre les 20 donneurs par million d'habitants.

Limites

Principale entrave au prélèvement : le refus des familles. Une autre limite se situe au niveau des pratiques hospitalières : certains établissements, bien qu'équipés techniquement, ne font pas de prélèvements d'organes. On relève des temps d'attente différents selon les régions et l'organe demandé. Ainsi, pour une greffe rénale, la médiane d'attente pour la région du Poitou-Charentes est de quatre mois tandis qu'elle atteint 33,7 mois en Languedoc-Roussillon. L'une des solutions pouvant remédier partiellement à la pénurie d'organes actuelle est la xénogreffe, c'est-à-dire l'utilisation d'organes animaux sur les humains. La Grande-Bretagne a ainsi recours aux organes de porc transgéniques. Actuellement, aux États-Unis, un organe humain prélevé coûte 18 000 $. D'un pays à l'autre, les situations sont très variables .

Comment les Français perçoivent la greffe

Selon une enquête nationale sur le don et le prélèvement d'organes(1) :

- 90 % des personnes interrogées acceptent le don du vivant ;

- 70 % disent que leurs organes pourraient un jour être prélevés pour greffer une autre personne ;

- Pour 78 % des personnes, l'anonymat donneur-receveur est une condition nécessaire ;

- 60 % sont en désaccord avec l'éventualité d'une appropriation des organes (prélèvement systématique) ;

- 94 % des personnes jugent que le prélèvement est un geste de solidarité ;

- Pour 80 % des personnes interrogées, le prélèvement n'est pas une atteinte à la dignité d'une personne décédée ;

- 42 % des personnes sont en faveur d'un prélèvement sur un proche et 50 % sont indécis.

1- Réalisée en 1997 à l'initiative de l'EFG sur un échantillon représentatif de 1 011 personnes.