Le score d'Apgar - L'Infirmière Magazine n° 173 du 01/07/2002 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 173 du 01/07/2002

 

Néonatologie

Conduites à tenir

Le score d'Apgar a pour but d'apprécier l'état clinique du nouveau-né juste après l'accouchement, ainsi que son adaptation à la vie extra-utérine. Il reste, malgré les progrès de la technique, extrêmement pertinent, tout en étant simple et reproductible.

Née le 7 juin 1909, dans le New Jersey, Virginia Apgar devint médecin en 1933. Première femme américaine spécialisée en anesthésiologie, elle a dirigé son propre service dès 1938, et obtint le titre de professeur. Particulièrement impliquée dans la prise en charge en obstétrique, elle a cherché à développer un système simple d'évaluation du nouveau-né. Elle a présenté en 1952 son « Apgar score system », bientôt repris et utilisé dans de nombreux pays à travers le monde. Elle est décédée à New York en 1974.

Définition

L'idée du Pr Apgar était d'établir des critères d'appréciation du nouveau-né, faciles à coter, et reproductibles dans le temps. Outre l'aspect médical, la réalisation de ces cotations incitèrent le personnel médical à observer encore plus attentivement l'aspect clinique de l'enfant, et donc à en améliorer la surveillance et la prise en charge. Les critères retenus sont au nombre de cinq : la fréquence cardiaque, la respiration, le tonus, la réactivité et la coloration de l'enfant. Chacun de ces items est noté de zéro à deux, et la somme de ces cinq notes détermine le score total de l'enfant, évalué à un instant donné. En pratique, à la naissance, lors des tout premiers soins, alors qu'on le désobstrue, qu'on le sèche, qu'on l'observe, on détermine simultanément le score d'Apgar du nouveau-né. La cotation est généralement évaluée à une minute, puis à cinq et dix minutes de vie, et retranscrite tant dans le dossier médical que sur le carnet de santé de l'enfant.

Interpréter les résultats

Le score d'Apgar évalue l'état clinique de l'enfant à sa naissance, et la manière dont il a supporté l'accouchement. Il quantifie les conséquences de la présentation foetale, du mode d'accouchement, de l'éventuelle anesthésie maternelle. Il renseigne sur les fonctions vitales et circulatoires de l'enfant, ainsi que sur son état neurologique. Il a une valeur prédictive sur sa viabilité, et sur la nécessité de mettre en oeuvre une réanimation néonatale. La cotation minimum est de zéro, et correspond à l'appréciation d'un enfant né en état de mort apparente. Le score maximum est de 10, celui d'un enfant vigoureux et en pleine forme. Entre ces deux extrêmes, il existe bien sûr tout un éventail de possibilités. Elles oscillent entre la simple surveillance, le réchauffement de l'enfant, l'aspiration bucconasale, et les gestes plus lourds de réanimation, l'oxygénothérapie, la ventilation assistée... Généralement, la note la plus basse est la plus précoce, mais il est des cas où l'état du nouveau-né se détériore secondairement.

Haute valeur prédictive

Depuis quelques années, certains cherchaient des moyens plus fins, plus précis, d'évaluer l'état de l'enfant à la naissance, comme la mesure du pH dans le sang artériel ombilical. On mettait en doute, par exemple, le bien-fondé de la cotation de l'Apgar chez les grands prématurés, dont on sait que le tonus ou la réactivité sont d'emblée inférieurs à ce qu'ils seraient pour le même enfant à terme. De nombreuses études scientifiques ont été menées, notamment celle dirigée par Brian M. Casey(1), à Dallas, sur plus de 145 000 naissances. Cette équipe a montré la haute valeur prédictive du score d'Apgar, même chez les prématurés. Un Apgar à cinq minutes de vie compris entre zéro et trois correspond à un risque de décès élevé, alors qu'un score compris entre sept et dix est à faible risque. Cette même étude analyse les dosages de pH dans le sang ombilical à la naissance, et met en évidence la supériorité pronostique de l'Apgar en ce domaine. La pertinence de l'Apgar est donc toujours d'actualité, malgré ses 50 ans de bons et loyaux services. Il reste un moyen d'évaluation néonatale de choix, d'autant plus que ce score s'avère simple, bien moins onéreux que d'autres dosages ou techniques, et facilement réalisable dans chaque hôpital, partout dans le monde. Il ne nécessite ni investissement, ni machinerie lourde, juste, somme toute, la présence d'une personne qualifiée et attentive qui sache regarder et prendre soin du nouveau-né. Gageons que le Pr Virginia Apgar veillera encore pour quelques décennies sur nos tout-petits...

1- Étude publiée dans The New England Journal of Medecine, vol. 344, n° 7.