Doit-on révéler un diagnostic grave ? - L'Infirmière Magazine n° 175 du 01/10/2002 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 175 du 01/10/2002

 

Juridique

L'obligation d'éclairer le malade sur son état s'avère souvent délicate. Si la révélation du diagnostic grave incombe en pratique au médecin, l'infirmière doit informer le patient sur les moyens ou techniques mis en oeuvre pour prodiguer les soins.

Si le malade a le droit d'être informé, tant pour des raisons juridiques qu'éthiques, est-il apte, pour autant, à tout entendre, notamment en cas de pronostic grave, voire inéluctable ? Le Code de déontologie médicale autorise le médecin à laisser un malade « dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic grave ». L'objet d'un Code de déontologie est de dicter des devoirs professionnels et non, normalement, d'accorder des droits à un corps. La faculté accordée à un médecin de laisser un malade dans l'ignorance peut-elle vraiment trouver sa place dans un tel texte ?

En outre, le Code de déontologie fixe une exception à cette faculté, en prévoyant une information obligatoire, en cas de risque de contamination. Il s'agit là d'une référence aux maladies contagieuses, et plus particulièrement aux maladies sexuellement transmissibles comme le sida ou l'hépatite B. Néanmoins, quelle attitude va adopter le malade, informé des risques de contagion de sa maladie, vis-à-vis des tiers ? Comment savoir s'il aura informé son entourage, son ou ses partenaires sexuels des risques de contamination dont il est porteur ?

Le rôle de persuasion du médecin occupe en ce domaine une place primordiale. En pratique, il lui incombe de révéler un pronostic grave à un malade ou à ses proches. S'il est légitime de revendiquer un droit à l'information, le problème majeur reste que tout individu n'est pas apte à assumer un tel droit. Pourquoi alors lui imposer une vérité qui risquerait de lui être préjudiciable et qui le serait par conséquent pour le médecin ? Une attitude univoque face au malade s'avère impossible. Il convient de lui préférer un comportement fondé sur la connaissance de nombreuses variables relatives à la maladie et au malade lui-même comme son âge, son équilibre émotionnel, sa foi religieuse, ou encore son niveau culturel.

OBLIGATIONS DE L'INFIRMIÈRE

Si l'information sur le diagnostic, le traitement et le pronostic relève de la compétence exclusive du médecin, l'infirmière est plus que souvent sollicitée par le patient insatisfait de l'information médicale reçue, ou souhaitant des explications supplémentaires. Selon l'article 32 du décret du 16 février 1993 relatif aux règles professionnelles des infirmier(e)s, « l'infirmier ou l'infirmière informe le patient ou son représentant légal, à leur demande, et de façon adaptée, intelligible et loyale, des moyens ou des techniques mis en oeuvre. Il en est de même des soins à propos desquels il donne tous les conseils utiles à leur bon déroulement ». L'obligation d'informer le patient ou son représentant légal par l'infirmière porte ainsi sur les moyens ou les techniques mis en oeuvre pour donner les soins infirmiers, ainsi que sur les soins infirmiers eux-mêmes. L'infirmière, lorsqu'elle donne ces explications relatives aux soins et plus généralement au traitement, doit s'efforcer de le faire dans des termes simples et appropriés au niveau socioculturel du malade, en tenant compte aussi de l'état émotif du malade et de ses capacités de réception et de compréhension.

DROITS DU MALADE

La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé modifie profondément les droits des malades dans le sens d'une affirmation du droit à l'information. Conformément au nouvel article L. 1111-2 du Code de la santé publique, « toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé ». Outre l'urgence et l'impossibilité d'informer, la loi ajoute une nouvelle exception à l'obligation d'information, prévoyant que « la volonté d'une personne d'être tenue dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic doit être respectée, sauf lorsque des tiers sont exposés à des risques de contamination ». Ce nouveau principe d'information systématique, sauf volonté contraire du malade, signifie-t-il la fin de l'autorisation déontologique faite au médecin de laisser le malade dans l'ignorance d'un pronostic grave ? Il convient d'espérer que non, car si le mensonge n'a pas sa place dans l'éthique médicale, la vérité n'est pas univoque. Elle varie avec le temps, le cheminement du malade et l'évolution de la maladie.

Le secret médical est-il opposable à la famille du malade ?

Oui, en principe. Néanmoins, la famille, les proches du malade ou la personne désignée à ce titre par le malade lui-même, peuvent bénéficier d'informations dans deux hypothèses :

- en cas de pronostic grave ou fatal ;

- en cas de décès du malade, afin de leur permettre de connaître les causes de la mort.

Dans ces deux cas, le malade peut préalablement s'opposer à la communication de toute information à sa famille.

Que faire en cas de refus de soins du malade dont la vie est en danger ?

Conformément à la loi, si le refus ou l'interruption d'un traitement met en danger la vie du malade, le professionnel de santé devra le convaincre d'accepter les soins indispensables. Le compromis entre la liberté individuelle du malade d'une part, et d'autre part, l'obligation de tenter de convaincre d'assistance à personne en danger, reste particulièrement délicat.

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