La sclérose latérale amyotrophique - L'Infirmière Magazine n° 175 du 01/10/2002 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 175 du 01/10/2002

 

Cours

La sclérose latérale amyotrophique (SLA) est une maladie neurologique invalidante, qui évolue en s'aggravant sur une durée moyenne de trois années et pour laquelle il n'existe aucun traitement curatif. Sa prise en charge nécessite une équipe pluridisciplinaire.

Appelée aussi maladie de Charcot(1) ou maladie de Lou Gehrig (joueur de base-ball américain emblématique, mort de cette maladie en 1941, peu avant son trente-huitième anniversaire) aux États-Unis, la SLA est une maladie dégénérative qui affecte les neurones moteurs. C'est la maladie dégénérative la plus grave après celle de Creutzfeldt-Jakob et la plus fréquente après la maladie d'Alzheimer. C'est de cette maladie qu'est décédée, en juin dernier, Diane Pretty, une Britannique de 44 ans, venue en mars à Strasbourg réclamer le droit de mourir dans la dignité, avec l'aide de son mari, lors d'une audience de la Cour européenne des droits de l'homme (voir encadré p. VII). Un nouveau médicament, le riluzole (Rilutek®), administré précocement, permet de ralentir l'évolution de la SLA et prolonge la survie du patient.

POPULATION MASCULINE DEUX FOIS PLUS TOUCHÉE

Cette maladie touche les adultes habituellement entre 45 et 70 ans, mais il arrive que des adultes plus jeunes soient aussi affectés. Elle atteint deux fois plus les hommes que les femmes, souvent plus précocement d'ailleurs. Elle se caractérise par la dégénérescence progressive des motoneurones (responsables de la motricité volontaire) périphériques de la corne antérieure de la moelle, des nerfs crâniens à l'exception de ceux de l'oculomotricité extrinsèque, et des zones motrices corticales. Les motoneurones donnent naissance à des fibres qui constituent la voie pyramidale qui chemine dans tout le système nerveux et notamment dans le faisceau latéral de la moelle épinière avant de se terminer sur les motoneurones de la corne antérieure de la moelle épinière. Charcot ayant noté une lésion anormale de la voie pyramidale dans les cordons latéraux de la moelle épinière a dénommé cette affection « sclérose latérale ». À cette atteinte s'ajoute une fonte musculaire, d'où le terme « amyotrophique ».

Les conséquences de la dégénérescence de la voie pyramidale sont donc multiples : troubles moteurs des membres supérieurs et inférieurs, troubles de la déglutition, de la phonation, problèmes respiratoires qui vont entraîner la mort dans 80 % des cas. C'est une maladie « humainement dramatique » pour le Pr Jean Pouget (chef de service de neurologie, La Timone, Marseille) car « elle entraîne peu à peu une perte d'autonomie totale des membres et d'autres fonctions, sans pour autant altérer les fonctions cérébrales ». Maladie lourde pour l'entourage, à l'évolution inexorable, qui frappe de plein fouet un adulte jeune et sa famille, la SLA reste pour le Dr Gilbert Danowski, à l'origine du Livre noir de la SLA(2), « une maladie méconnue de tous les acteurs de santé, entraînant souvent des conduites thérapeutiques à contresens, en ville comme à l'hôpital ». Son incidence est de deux cas pour 100 000 habitants (comme pour la sclérose en plaques) mais elle augmente actuellement, sans qu'on en connaisse vraiment la raison. Selon l'Association pour la recherche sur la sclérose latérale amyotrophique, elle affecte 8 000 malades et son issue est le plus souvent fatale : un malade est diagnostiqué toutes les sept heures en France et un malade décède toutes les douze heures. La maladie est généralement sporadique, mais il existe de rares formes familiales dans 8 à 10 % des cas.

CAUSES

Les causes demeurent à ce jour inconnues. Plusieurs hypothèses ont toutefois été avancées pour expliquer les déficiences du motoneurone : atteinte virale, mais sans pouvoir isoler l'agent responsable, déficit du système immunitaire, mais cette voie semble aujourd'hui abandonnée.

Parmi les hypothèses explorées, on s'oriente vers :

- une piste génétique. Dans 8 à 10 % des cas, la SLA affecte plusieurs membres d'une même famille. Dans 15 % de la forme familiale, l'équipe du Dr Guy Rouleau (Centre universitaire de santé McGill, Canada) a pu mettre en évidence la mutation d'un gène situé sur le chromosome 21 : le gène de la superoxyde dismutase cuivre/zinc, une enzyme qui intervient dans le contrôle du métabolisme de l'oxygène ;

- le rôle du stress oxydatif. On décrit sous ce terme le rôle potentiellement nocif que peut jouer l'oxygène dans la cellule. Suite aux découvertes génétiques précédentes, les chercheurs ont évoqué la possibilité d'une altération du métabolisme de l'oxygène dans le développement de la maladie. Depuis cette découverte, de nombreux travaux ont été consacrés à cette mutation. Un modèle animal a été mis au point avec des souches de souris porteuses de cette mutation et qui présentent une maladie proche de la forme humaine. Ce qui pourrait évoluer vers le développement d'une thérapie génique ;

- le rôle de certains acides aminés. On a pu montrer chez des malades atteints de SLA, des anomalies du glutamate, un acide aminé qui intervient dans la transmission de l'influx nerveux. Ce neurotransmetteur permet en effet d'augmenter le seuil d'excitabilité de la cellule nerveuse pour la préparer à la transmission de l'influx nerveux. Le glutamate est libéré dans la fente synaptique, pour se fixer sur une région particulière du neurone à stimuler, le récepteur du glutamate. Ce récepteur ouvre des pores de la membrane de la cellule qui permettent l'entrée d'ions calcium dans la cellule dite cible. C'est cette entrée de calcium qui élève le seuil d'excitation de la cellule cible et permet la transmission de l'influx nerveux. Or, il semble que dans les maladies neurodégénératives dont la SLA, l'action du glutamate soit trop prolongée, ce qui conduit à une entrée anormale de calcium dans la cellule et favorise la mort neuronale. De plus, selon certains chercheurs, s'il y a trop de neurotransmetteur excitateur, il se produit une « excito-toxicité » qui serait à l'origine d'un épuisement cellulaire ;

- les facteurs environnementaux. Dans deux régions (île de Guam dans le Pacifique et presqu'île de Kii au Japon), on note une forte prévalence de trois pathologies dégénératives : la SLA, la maladie de Parkinson et la maladie d'Alzheimer. Il a été prouvé que cette fréquence est liée à l'ingestion de farine contenant un acide aminé excitateur spécifique.

FORMES CLINIQUES ET SYMPTÔMES

Il existe deux formes de SLA :

- la forme spinale (ou périphérique) : elle correspond à l'atteinte des motoneurones de la moelle épinière et provoque des troubles de la motricité des membres supérieurs et/ou inférieurs. L'atrophie musculaire est progressive, parfois unilatérale, mais se bilatéralise rapidement. Cette forme est plus communément observée chez les hommes. L'atteinte bulbaire n'est pas systématique;

- la forme bulbaire : elle correspond à l'atteinte des motoneurones du tronc cérébral et réalise une paralysie labioglossopharyngée, avec troubles de la phonation et de la déglutition. L'atteinte des membres y est constante. Cette forme affecte plus souvent les femmes.

En pratique, la maladie à son début offre des tableaux variés. Elle peut être insidieuse avec des signes cliniques légers à type de crampes, de spasmes, de fatigue anormale, ce qui peut entraîner des retards dans le diagnostic et donc dans la prise en charge.

Le début peut aussi être brutal, et se révéler lors d'un exercice musculaire par une diminution importante, voire une perte totale de la force musculaire.

Toutefois, deux symptômes sont très évocateurs de la maladie : les crampes (brèves et douloureuses, surtout aux mains et aux pieds) et les fasciculations (contraction en salves de faible amplitude de fibres musculaires isolées qui donnent l'impression de « vers courant sous la peau »), particulièrement observables au niveau de la langue.

AGGRAVATION GRADUELLE

Rien ne permet de prévoir l'évolution d'une SLA. Mais quelle que soit la forme initiale, la maladie évolue généralement vers une forme complète, rarement de manière régulièrement progressive. Avec l'évolution de la maladie, les symptômes sont de plus en plus manifestes : crampes, faiblesse des bras et des jambes, atrophie musculaire d'intensité et de répartition variables, difficultés à parler. Au début, le malade peut trébucher, être incapable de soulever un objet, laisser tomber ce qu'il tient dans la main, être pris de rires et de pleurs spasmodiques (syndrome pseudo-bulbaire)... Ces symptômes varient d'une personne à l'autre en fonction de la forme clinique de la maladie. Lorsque la voie pyramidale est atteinte, outre les troubles de la parole, on observe une sensation d'enraidissement articulaire qui définit la spasticité. Cette raideur est accentuée par le froid, l'effort intense, le stress. À l'examen, les réflexes ostéotendineux sont vifs, exagérés. Le signe de Babinski n'est retrouvé que dans la moitié des cas.

Puis, la paralysie va peu à peu immobiliser le patient et d'autres symptômes vont apparaître : amaigrissement, constipation, troubles du sommeil, anxiété, douleurs articulaires liées à la fonte musculaire, oedèmes liés à l'immobilité, fragilité émotionnelle, hypersialorrhée (dans les formes bulbaires). Les gestes de la vie quotidienne deviennent impossibles. Au stade avancé, la personne est presque totalement paralysée. La sensibilité (les cinq sens), les fonctions sexuelles et intellectuelles du patient ne sont pas atteintes par la progression de la maladie. De même, la motricité oculaire et le contrôle volontaire des sphincters sont préservés. La mort survient dans 50 % des cas au terme de trois ans, dans la majorité des cas suite à un problème respiratoire aggravé par une surinfection bronchique. Le facteur pronostic le plus important est l'atteinte bulbaire et celle des muscles respiratoires. La forme bulbaire est celle qui évolue le plus rapidement vers la mort.

Selon le Dr Vincent Meininger (Fédération de neurologie Mazarin, La Salpêtrière, Paris), « le processus de dégradation musculaire est variable selon les individus. Actuellement, il est impossible de prédire la progression de la maladie dans le temps et l'espace. Il semble probable, compte tenu des récentes données issues des observations thérapeutiques, de classer les malades :

- à très hauts risques avec une médiane de survie (définissant le décès de 50 % des patients) de neuf mois après la première visite (il est préférable de prendre ce repère plutôt que le premier symptôme souvent difficile à clairement identifier dans le temps) ;

- à hauts risques avec une médiane de survie de 18 mois après la première visite ;

- à bas risques pour lesquels la médiane de survie est difficilement calculable après 30 mois après la première visite ».

DIAGNOSTIC

« L'enjeu du diagnostic précoce est évident dans le cas de la SLA », a rappelé Michelle Fusselier lors des 2es états généraux de la SLA. « C'est une nécessité absolue pour que le patient puisse bénéficier d'une prise en charge thérapeutique précoce et pour qu'il puisse recevoir rapidement l'information qui lui permettra la meilleure adaptation possible à son handicap. Or, il faut savoir que moins de 10 % des patients sont diagnostiqués dans les six mois suivant l'apparition des symptômes, 22 % des patients sont diagnostiqués après plus d'un an et 18 % après plus de 18 mois. Ces délais sont inacceptables alors que l'on sait que la maladie évolue pour la moitié des patients en moins de trois ans. Ainsi, beaucoup de malades suivent un parcours anormalement long. Ils errent d'un praticien à l'autre avant de connaître le nom de leur maladie et de rencontrer enfin des équipes compétentes. De ce fait, beaucoup ne bénéficient pas du seul médicament actif qui permet de ralentir le processus de la maladie et ce de façon d'autant plus active qu'il est pris tôt. » Le diagnostic précoce reste en pratique difficile au début. Selon le Pr William Camu (service de neurologie, hôpital Guy-de-Chauliac, Montpellier), « le côté lentement progressif initial avec des signes cliniques trompeurs fait intervenir de nombreux spécialistes autres que les neurologues : les ORL ou les dentistes voient les troubles de la déglutition, les rhumatologues les entorses et les psychiatres les troubles de l'élocution ».

En l'absence de marqueur spécifique, le diagnostic repose uniquement sur les éléments cliniques et les symptômes précités. La découverte d'un trouble de la sensibilité suffit à éliminer le diagnostic de SLA. L'examen du LCR est le plus souvent normal.

L'aggravation de la maladie permet d'établir le diagnostic dans les formes évolutives. Mais il existe des formes bénignes pouvant rester stables pendant 30 ans qui ne sont pas toujours identifiées.

L'électromyogramme confirme l'atteinte neurogène périphérique et permet d'objectiver l'étendue de l'affection. D'autres examens (IRM, spectro IRM, stimulation magnétique) peuvent aussi être demandés afin d'éliminer une autre pathologie (tumeur) pouvant atteindre les motoneurones.

PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE

La prise en charge thérapeutique est le point le plus important pour les patients. Les conséquences des lésions étant multiples et évolutives, les patients doivent être évalués en permanence et pris en charge par une équipe pluridisciplinaire en fonction de leurs problèmes. Le patient doit d'abord être informé. L'annonce du diagnostic tombe comme un couperet : on n'en connaît ni la cause, ni le remède et l'issue est fatale ! En tant que soignants, on connaît la détresse d'une personne confrontée à l'annonce d'une maladie mortelle. C'est une épreuve traumatique pour le malade mais aussi pour l'entourage. Non seulement la vie familiale est bouleversée, mais aussi la vie sociale, professionnelle, les projets... Les malades ont besoin d'être soutenus et accompagnés par des professionnels compétents et formés. Les médecins préfèrent actuellement dire la vérité au malade, sans se prononcer sur l'évolution qui reste imprévisible, sauf dans les formes bulbaires.

L'évolution de la maladie va remettre en question le lieu de vie (logement adapté, structures de soins particulières), les perspectives professionnelles de la personne et son autonomie, tant sociale que financière. Les familles doivent prévoir les équipements (canne, fauteuil roulant, lit médicalisé, respirateur...), l'aménagement du domicile qui ne fait qu'évoluer en fonction de l'aggravation, le recours à des aides ménagères, l'organisation des soins. Ceci représente des coûts énormes tant en énergie qu'en moyens financiers. « Il existe actuellement une aberration concernant cette prise en charge permanente imposée aux familles et qui doivent faire face à l'incurie de services ignorant toutes les spécificités de cette maladie », observe Michelle Fusselier. L'urgence actuelle tient donc dans la mise en place de structures spécialisées avec un suivi des malades par une équipe pluridisciplinaire formée : neurologue, psychologue, infirmières, kinésithérapeute, ergothérapeute, diététicienne, gastro- entérologue. « La mise en place de centres spécialisés dans la SLA et les maladies du motoneurone permettrait de mettre un terme aux dysfonctionnements de la prise en charge », conclut Michelle Fusselier.

TRAITEMENT MÉDICAMENTEUX

Il n'y a, actuellement, aucun traitement permettant de guérir la maladie. Les traitements actuels ne visent qu'à ralentir son évolution, prévenir les complications et maintenir la qualité de vie du patient à un niveau acceptable. La seule molécule ayant démontré une relative activité contre la SLA est le riluzole, commercialisé sous le nom de Rilutek® et prescrit à la dose d'un comprimé de 50 mg toutes les 12 heures. Mais ce médicament est contre-indiqué en cas de maladie hépatique.

PRÉVENTION DES DYSFONCTIONS MOTRICES

Il faut insister sur le rôle fondamental du kinésithérapeute. La prévention des dysfonctions motrices tient une place importante dans la vie des patients atteints de SLA. Le type et le moment de la rééducation sont liés au projet thérapeutique dans son ensemble, en fonction du stade évolutif. Ce projet thérapeutique est défini par les différents acteurs de la prise en charge, en coopération avec le patient et son entourage.

Les indications sont variées dans leur nature. Elles doivent s'adapter, même à court terme, aux aléas et aux fluctuations de la maladie. Certaines sont d'ordre préventif : fonctions respiratoires, chutes, prévention de l'atrophie musculaire, etc. D'autres sont plus spécifiques selon la gêne fonctionnelle : dysphonie, aide à la marche, posture, etc. D'autres encore sont plus palliatives et globales : complication de décubitus, limitations articulaires, etc.

Dans tous les cas, les muscles doivent être stimulés afin de sauvegarder les fonctions musculaires restantes, mais ni trop, ni trop peu. En effet, une stimulation trop intense risquerait d'aggraver l'atteinte des motoneurones de la corne antérieure ainsi que la spasticité. Parallèlement, l'adaptation fonctionnelle, domaine d'intervention des ergothérapeutes, réduit la dépendance et intervient sur l'environnement et les activités de la vie quotidienne.

RÔLE INFIRMIER

Le rôle de l'infirmière, tant à domicile qu'en milieu hospitalier, s'intègre dans une prise en charge globale, avec toute l'équipe soignante amenée à intervenir auprès du patient et de sa famille. Le souhait actuel est de garder les malades à domicile le plus longtemps possible. À un moment de la maladie, et/ou pour certains patients qui ne peuvent rester chez eux, l'hospitalisation devient nécessaire. Elle est souvent vécue difficilement par ces patients très fragilisés mais lucides car elle représente un pas de plus vers la mort.

L'idéal serait que les conditions d'hospitalisation soient proches de celles du domicile. C'est ce vers quoi tendent les centres spécialisés en permettant au patient de garder le maximum d'objets personnels avec lui (photos, petits meubles...).

Outre les soins habituels à tout patient invalide (nursing, prévention des complications de décubitus, hygiène...), l'infirmière doit accorder une place particulière à la communication. Il faut se rappeler que la communication est atteinte à des degrés divers chez tous les patients atteints de SLA.

Chez les malades ayant des difficultés à articuler et dont le langage est difficile à comprendre, l'ensemble de l'équipe doit veiller à :

- éviter la précipitation dans les soins ;

- se placer face au malade ;

- formuler des questions qui demandent une réponse courte ou une réponse par oui ou par non, utiliser des systèmes informatiques de synthèse vocale.

Ces patients demandent beaucoup d'attention, de disponibilité et de compréhension. Chaque soin doit être, pour eux, un moment de réconfort où le contact est à la fois verbal et physique. L'infirmière doit aussi s'adapter aux handicaps.

Troubles moteurs. Pour le système d'appel, il peut être utile de doter les chambres de systèmes à touche sensible, car les patients atteints de troubles moteurs ne peuvent pas utiliser la sonnette habituelle. Il faut également retourner les patients dans leur lit, de jour comme de nuit et les aider à aller aux toilettes, une solution qu'ils préfèrent généralement à l'utilisation du bassin.

Constipation. La constipation étant quasiment toujours présente, prévoir des suppositoires à la glycérine ou des micro-lavements et proposer une alimentation riche en fibres.

Difficultés de déglutition. Dans les formes bulbaires, les patients présentent des difficultés de déglutition avec risque de fausses routes. Le risque qu'ils s'alimentent de moins en moins existe, provoquant ainsi une perte de poids progressive, qu'il importe de corriger dès qu'elle s'installe. C'est dans cet objectif qu'une sonde de gastrostomie est généralement mise en place assez tôt. De plus, elle permet de garder une alimentation orale.

Hypersialorrhée. Les troubles de la salivation sont habituels avec, le plus souvent, une hypersialorrhée et des glaires plus ou moins épaisses. Ce problème peut être amélioré par une prescription d'atropine à 1 %. Prévoir également des soins de bouche réguliers et aspirer les patients très fréquemment.

Problèmes respiratoires. Les patients pourront dans un premier temps être assistés à l'aide d'un masque nasal et d'un appareil de ventilation relié à ce masque, ce qui est une moindre contrainte quand la ventilation ne dure que quelques heures par jour. Mais à un moment, une trachéotomie s'avère indispensable. C'est un moment difficile à vivre pour les patients et leur famille qu'il convient de ne pas négliger.

ESSAIS THÉRAPEUTIQUES

À l'heure actuelle, on ne guérit pas la sclérose latérale amyotrophique. La prise en charge est essentiellement palliative. Elle suit les conséquences de la progression de la maladie. Les soins vont ainsi s'intensifier et devenir de plus en plus techniques. Parallèlement, il faut soutenir, calmer l'angoisse, rassurer les familles. Et continuer d'apporter de l'espoir ! De nouveaux médicaments sont en cours d'essais thérapeutiques. Rien de concret pour l'instant, mais les chercheurs estiment actuellement que la SLA est une maladie potentiellement curable.

1825, décédé en1893. Professeur à La Salpêtrière, il sera le premier en 1869 à décrire la sclérose latérale amyotrophique, après avoir montré l'origine motoneuronale de la maladie. 2- Le Livre noir et les actes des états généraux de la SLA sont disponibles sur le site de l'association (http://www.ars.asso.fr). 3- Michelle Fusselier est présidente de l'ARS.

Un second gène identifié

Deux équipes de chercheurs (Northwestern University Medical School, Chicago et Tai University, Japon) ont identifié un second gène responsable de sclérose latérale amyotrophique familiale(1). Le gène baptisé SLA2 code pour une pro-téine dénommée alsine. Il est muté dans une forme autosomique récessive de la maladie, la SLA juvénile, observée en Afrique du Nord et au Moyen-Orient.

1- Nature Genetics, 4 octobre 2001, p. 103.

La SLA, maladie prioritaire

Une circulaire de santé publique, publiée fin septembre, reconnaît la SLA comme maladie prioritaire. Cette circulaire devrait être accompagnée d'une enveloppe à l'intention des agences régionales d'hospitalisation qui seront en charge de la mise en place des centres sur le territoire national. Les acteurs de soins de proximité (médecins, infirmières, kinésithérapeutes) seront formés par le centre référent et leur intervention auprès des malades imputée sur ce budget. Un résultat que l'on doit notamment au travail réalisé par l'association pour sensibiliser les pouvoirs publics et faire reconnaître cette maladie gravissime.

Éthique et SLA

L'ARS, en liaison avec l'Espace éthique de l'AP-HP, dirigé par le Pr Emmanuel Hirsch, a mis en place une cellule « éthique et SLA » dans le service du Pr Vincent Meininger à La Pitié-Salpêtrière. En effet, la situation des malades atteints de SLA est plus que préoccupante quand ils arrivent en fin de vie. Totalement paralysés, prisonniers de leurs corps, avec des difficultés pour parler, avaler, respirer, (quand ils ne sont pas sous machine !), mais gardant entière et jusqu'au bout leur lucidité, les malades assistent en spectateurs impuissants à leur inexorable dégradation. Pour Michelle Fusselier, présidente de l'ARS(1), « ces particularités d'évolution de la SLA font que les questions éthiques soulevées par la prise en charge de cette maladie et l'accompagnement de la fin de vie, lui sont très spécifiques et que l'on ne peut pas se satisfaire de réponses binaires qui ne prendraient pas en compte le fait que toute situation est singulière et personnelle ». Cette cellule éthique a pour objectif, en relation avec la maison de l'ARS, d'aider et de former les soignants ainsi que les bénévoles chargés de visiter les malades à domicile et à l'hôpital. Cette démarche sera reproduite dans cinq des villes destinées, en principe cette année, à accueillir un centre SLA : Lille, Paris, Limoges, Clermont-Ferrand et Montpellier.

1- Association pour la Recherche sur la SLA, 75, avenue de la République, 75011 Paris. Tél. : 01 43 38 99 11. http://www.ars-asso.fr.

Des chiffrages délicats

Selon le Dr Claudine Berr (Inserm-U 360), la difficulté des critères diagnostiques rend les chiffrages délicats. Dans une étude irlandaise sur 15 ans, on note 2,5 nouveaux cas chez les hommes et 1,8 chez les femmes pour 100 000 habitants. La fréquence augmente avec l'âge alors que l'écart homme/femme tend à disparaître. Il semble également que la fréquence de la maladie ait augmenté durant les 30 dernières années, peut-être du fait de l'allongement de la vie. Des disparités géographiques existent, avec un cluster particulier dans le Pacifique Ouest.

Diane Pretty : l'ultime combat

Le décès de Diane Pretty, une mère de famille britannique de 44 ans atteinte de SLA, et à qui la justice avait refusé le droit de se faire aider par son mari pour mourir, a relancé le débat sur l'euthanasie. Cette femme avait souhaité mourir dans la dignité en demandant le droit pour son mari de l'aider à se suicider, ce qu'elle ne pouvait faire elle-même en raison de sa paralysie totale.

La justice britannique, puis la Cour européenne des droits de l'homme, ont rejeté cette demande. Diane est décédée en mai 2002 dans un établissement de soins palliatifs près de Luton (nord de Londres), après plusieurs jours d'extrêmes difficultés respiratoires, suivis d'un coma. « Diane a dû subir ce qu'elle avait prévu et redouté et je n'ai rien pu faire pour l'aider », a déclaré son époux, Brian Pretty. Par son caractère extrême, la rapidité et la violence de son évolutivité, « la SLA en appelle à un surcroît d'humanité et de solidarité », estime le Pr Emmanuel Hirsch avant d'ajouter : « La préoccupation de chaque instant ne saurait relever du seul débat relatif à l'euthanasie. » D'où l'urgence de mettre en place les centres de référence pluridisciplinaires et de débloquer les 1,5 MEuro(s) prévus à cette intention.

La Maison de l'ARS

La Maison de l'ARS(1) a ouvert ses portes en mars 2002 à Paris. Siège social de l'association éponyme, la maison de l'ARS a été créée dans le but d'assister les malades. Elle accueille aussi les familles des malades qui trouveront là des conseils et un service d'aide aux démarches administratives. Sur le site Internet sont disponibles des fiches pratiques destinées aux malades ou aux soignants : la gastrostomie, les aides sociales et les aides au maintien à domicile, les troubles de la déglutition...

1- http://www.ars.asso.fr.

Centres experts

Lors des 2es états généraux de la sclérose latérale amyotrophique, Michelle Fusselier estimait « urgente la mise en place de services spécialisés ». Un an après, il semble que les choses n'aient pas beaucoup changé... La prise en charge de ces malades incombe à leur entourage. À un certain stade de la maladie, elle doit être pluridisciplinaire et nécessite des services spécialisés. Actuellement, les problèmes demeurent : retards et erreurs de diagnostic, mauvaises conditions d'information et d'annonce de la maladie, prise en charge inadaptée ou insuffisante. S'y ajoutent les problèmes de la vie quotidienne (aménagement du domicile, soins paramédicaux et médicaux, remboursements dérisoires...) et les rigidités administratives. Or, pour ces malades, le temps est compté. Il est donc essentiel, au vu de la rapidité de l'évolution de la maladie à partir de l'apparition des premiers symptômes, que la coordination de la prise en charge médicosociale soit mise en place dès qu'un diagnostic est posé et que cette coordination fasse le lien entre les différents intervenants et oriente la famille dans ses démarches administratives. Ceci ne peut se faire sans la création de centres experts attachés à des structures hospitalières. La création de ces centres a été programmée par le précédent gouvernement et devrait se faire, espérons-le, avant la fin de cette année. À ce jour, les villes pressenties sont Paris, comme expert référent national et international, Angers, Lille, Limoges/Clermont-Ferrand, Nice et Saint-Étienne. Un projet à la mesure des enjeux humains propres à la SLA.