Comprendre la conférence de consensus - L'Infirmière Magazine n° 176 du 01/11/2002 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 176 du 01/11/2002

 

Escarres

Cours

Souci quotidien de l'ensemble des soignants, la lutte contre les escarres souffre de pratiques multiples et divergentes. Un consensus formalisé doit permettre d'optimiser la prise en charge de ces lésions, particulièrement handicapantes pour le patient.

Les 15 et 16 novembre 2001 s'est tenue à l'Hôpital européen Georges-Pompidou la première conférence de consensus sur la prévention et le traitement des escarres de l'adulte et du sujet âgé. À l'issue de cette réunion, un texte de consensus a été publié (deux versions, une courte, une longue). Ce texte a pour ambition « la diffusion large de recommandations de bonne pratique clinique fondées sur l'état actuel des connaissances et sur l'expérience professionnelle » et ainsi « d'aider les acteurs de santé [...] à améliorer la prévention, le traitement et le pronostic des escarres de l'adulte et du sujet âgé ».

Nous avons sélectionné les principaux éléments du texte court que nous illustrerons à travers cet article. Nous avons particulièrement insisté sur :

- la description et l'évaluation des différents stades de l'escarre ;

- l'évaluation du risque d'escarre (facteurs de risque et échelles de risque) ;

- les mesures de prévention ;

- les traitements de l'escarre ;

- les supports d'aide à la prévention et au traitement des escarres.

DESCRIPTION ET ÉVALUATION DES STADES DE L'ESCARRE

Cette phase est « indispensable dès le début de la prise en soins et au cours du suivi et doit être réalisé[e] conjointement par l'infirmière et le médecin, dans le cadre d'une prise en compte globale du patient ».

La « description et l'évaluation initiales » permettent de « préciser le nombre d'escarres et pour chacune d'elles la localisation, le stade, les mesures de la surface et de la profondeur de la plaie, l'aspect de la peau périlésionnelle, une évaluation de l'intensité de la douleur et de son caractère permanent ou lié aux soins ».

Pour permettre cette phase, la classification anatomoclinique du National Pressure Ulcer Advisory Panel (NPUAP) en quatre stades (cf. tableau p. IV) a été retenue.

Cette classification a cependant été reconnue comme « insuffisamment validée » et, de plus, il conviendrait :

- « de l'enrichir d'un stade 0 (peau intacte mais risque d'escarre) » : érythème qui blanchit à la pression et disparaît en moins de 24 heures sans laisser de séquelles (cf. tableau p. IV) ;

- « de préciser le type de nécrose, sèche ou humide, au stade III » ;

- « d'y adjoindre les facteurs péjoratifs au stade IV (décollement, contact osseux, fistule et infection) ». « L'évaluation de suivi » permet de suivre l'évolution de l'escarre et d'adapter les soins si besoin.

Elle doit donc comporter :

- « une appréciation de la couleur de la plaie et du pourcentage respectif des tissus selon leur couleur, après nettoyage de la plaie, au moyen d'une échelle colorielle » (cf. encadré p. IV) ;

- « la mesure de la surface de la perte de substance avec une réglette millimétrée ou un calque » ;

- « la mesure de la profondeur avec un stylet et une réglette millimétrée » ;

- « la topographie de la plaie en utilisant un schéma ».

Elle sera complétée par la recherche de « facteurs péjoratifs » : « infection, décollement périphérique, contact osseux, fistule, et évaluation de l'intensité de la douleur et de son caractère permanent ou lié aux soins ».

FACTEURS DE RISQUE ET ÉCHELLES DE RISQUE

Les principaux facteurs de risque d'escarre peuvent être classés en « facteurs extrinsèques ou mécaniques et facteurs intrinsèques ou cliniques : pression, friction, cisaillement, macération, immobilité, état nutritionnel, incontinence urinaire et fécale, état de la peau, baisse du débit circulatoire, neuropathie, état psychologique, âge, antécédent d'escarres, déshydratation, maladies aiguës, pathologies chroniques graves et leur phase terminale. Seules l'immobilisation et la dénutrition sont réellement des facteurs prédictifs du risque d'escarre. »

Dans quelques situations cliniques, certains facteurs sont plus spécifiques :

- « en neurologie, orthopédie et traumatologie, on peut retenir trois facteurs de risque fondamentaux : la pression, la perte de mobilité et le déficit neurologique auxquels s'ajoutent la spasticité, l'incontinence, le risque peropératoire et le manque de coopération du patient. En cas de chirurgie reconstructrice, l'âge, le tabagisme, la corticothérapie, le diabète, les troubles de la microcirculation et de la coagulation sont péjoratifs pour la cicatrisation ;

- en gériatrie, la fragilité particulière de la peau et du tissu sous-cutané et l'insuffisance d'apports protidocaloriques augmentent le risque d'escarre en cas de maladies cardiovasculaires, d'hypotension artérielle ou d'hyperthermie ;

- en soins intensifs, la fréquence des collapsus, la gravité de l'état initial, l'incontinence fécale, l'anémie et la longueur du séjour sont des facteurs prédictifs du risque d'escarre ».

L'utilisation d'échelles de risque associée à une évaluation clinique initiale permet une prévention adaptée au niveau du risque. Les échelles les plus utilisées sont celles de Norton, Waterloo et Braden. Leur valeur prédictive est très variable d'une population à l'autre et « l'échelle de Braden a été particulièrement bien validée (cf. tableau pp. VI et VII). L'utilisation d'une échelle permet de former, sensibiliser et mobiliser l'équipe soignante autour d'un projet de soins. »

MESURES DE PRÉVENTION

La mise en place des mesures générales de prévention commence dès l'identification des facteurs de risque et s'applique à tout patient dont l'état cutané est intact mais estimé à risque. Elle vise à éviter la survenue de nouvelles escarres chez les patients qui en sont déjà porteurs. Elle concerne l'ensemble des professionnels de santé en contact avec le patient. Elle fait partie du rôle propre de l'infirmière.

Les mesures de prévention sont les suivantes :

1) « Diminuer la pression en évitant les appuis prolongés par la mobilisation, la mise au fauteuil, la verticalisation et la reprise de la marche précoce. Des changements de position doivent être planifiés toutes les deux à trois heures, voire à une fréquence plus élevée, et les phénomènes de cisaillement et de frottement doivent être évités par une installation et une manutention adéquate du patient. Le décubitus latéral oblique à 30° par rapport au plan du lit est à privilégier car il réduit le risque d'escarre trochantérienne. » (cf. encadré p. VII) ;

2) « Utiliser des supports (matelas, surmatelas, coussins de siège) adaptés au patient et à son environnement, y compris sur les tables de blocs opératoires, les lits de salles de surveillance postinterventionnelle et en postopératoire. » Il faut se rappeler qu'aucun support ne dispense de changer le malade de position régulièrement, mais sur un matelas ou surmatelas performant, les changements de position peuvent être espacés.

3) « Observer de manière régulière l'état cutané et les zones à risque (au moins quotidiennement, à chaque changement de position et lors des soins d'hygiène) afin de détecter précocement une altération cutanée. Elle doit être associée à une palpation de la peau à la recherche d'une induration ou d'une chaleur, en particulier pour les peaux pigmentées. » Il s'agit d'une étape importante qu'il convient d'enseigner régulièrement aux aides-soignants. Habituellement, ce sont eux qui, lors des changes chez les patients incontinents notamment, peuvent regarder les zones d'appui et détecter une escarre débutante (stade 0) ou déjà constituée mais à un stade précoce (stade 1 et 2).

4) « Maintenir l'hygiène de la peau et éviter la macération par une toilette quotidienne et renouvelée si nécessaire. » Ces éléments sont très importants dans la prise en charge du malade. Pour prévenir le problème de la macération, il existe des supports sophistiqués avec perte d'air pour la prévention des malades à haut risque d'escarre.

5) « Massage et friction des zones à risque sont à proscrire puisqu'ils diminuent le débit microcirculatoire moyen. Les applications de glaçons et d'air chaud sont interdites. » Il s'agit d'un élément particulièrement important et qui, dans certains hôpitaux, doit conduire à une actualisation des connaissances. Ces gestes, parfois encore enseignés dans les Ifsi et les écoles d'aides-soignants, sont dangereux en cas d'escarre constituée au stade 1 et ne sont pas utiles à la prévention des escarres. Les massages de confort effectués par les soignants ou les massages réalisés par les kinésithérapeutes ne font pas partie de la prévention des escarres et conservent toutes leurs indications.

6) « Assurer un équilibre nutritionnel en évaluant quantitativement les prises alimentaires. L'utilité d'une prise en charge nutritionnelle spécifique a été insuffisamment évaluée. »

Une fois l'escarre constituée, il est nécessaire d'augmenter les apports. Dans le cadre de la prévention, il n'est pas clairement évalué que la lutte contre la dénutrition permette la prévention des escarres.

« Une transcription des facteurs de risque, des mesures de prévention mises en oeuvre et de l'observation de l'état cutané dans le dossier du patient est utile à la continuité des soins. »

Il est important d'insister sur la nécessité de consigner par écrit ce qui souvent ne faisait l'objet que de transmissions orales. Les consignes et leur planification pour la prévention de l'escarre doivent figurer dans le dossier du malade.

LES TRAITEMENTS DE L'ESCARRE

« Le traitement de l'escarre est à la fois local et général, prenant en compte la personne et la plaie. »

Trois grands principes doivent être retenus :

- « les modalités de traitement des plaies (nettoyage, détersion, choix du pansement) doivent être définies sous forme de protocoles de soins. » Les protocoles de soins sont rédigés par une équipe multidisciplinaire. La méthodologie de ces protocoles est bien établie. Il est possible d'adjoindre des fiches techniques au protocole de soins, mais ces dernières ne peuvent en aucun cas remplacer le protocole ;

- « la douleur, lors de la réalisation des soins, doit être prise en compte et soulagée. » Pour l'évaluation de la douleur, il existe de nombreux outils qu'il convient de connaître. Trois échelles se proposent d'analyser la douleur de façon globale : échelle visuelle analogique (réglette graduée), échelle verbale simple, échelle numérique. Ces échelles sont fiables et ne constituent pas une charge de travail supplémentaire pour le soignant. Elles sont sensibles au changement de situation et permettent ainsi de juger de l'efficacité d'un traitement antalgique mis en place. Ces échelles seront régulièrement répétées.

Des pictogrammes (visages) peuvent également être réalisés pour évaluer simplement la douleur.

Les échelles comportementales sont plus longues à réaliser mais ce sont les seules à utiliser chez les patients présentant des troubles des fonctions supérieures et des troubles de la conscience (ECPA et Doloplus™) ;

- « les principes d'hygiène du pansement et de la prévention de la transmission croisée doivent être appliqués. » Le lavage des mains entre chaque patient est un geste fondamental à respecter. Les plaies sont en effet fréquemment colonisées par plusieurs germes. Près d'une fois sur deux, le patient hospitalisé présentant des escarres est porteur à un moment ou un autre d'un germe multirésistant (en général un Staphylococcus aureus métirésistant : SARM). Il ne faut pas oublier également de décontaminer le matériel (housse de coussin et matelas) entre chaque malade, et pour un même malade régulièrement au cours de son hospitalisation. Pour cette raison, les supports sont souvent commercialisés avec deux housses, ce qui permet de les laver alternativement.

Le traitement de l'escarre aux différents stades.

- « Le traitement de la rougeur (stade 1) : supprimer la pression en changeant de position toutes les deux à trois heures ; utiliser si besoin (urines, macération) un film semi-perméable ou un hydrocolloïde transparent. » Le massage n'est pas le traitement de la rougeur. Les changements de position (en évitant l'appui sur la zone rouge) et l'installation sur un support performant sont le traitement de l'escarre de stade 1.

- « Le traitement de la phlyctène (stade 2) : évacuer le contenu et maintenir le toit de la phlyctène, recouvrir avec un pansement hydrocolloïde ou un pansement gras. » Le maintien du toit constitue un pansement naturel protecteur du lit de l'escarre. Il faut noter que les phlyctènes s'observent essentiellement aux endroits où la peau est kératinisée (talon). Si la phlyctène n'est pas tendue, il n'est pas nécessaire de la percer. Lorsque la phlyctène est hémorragique, elle a plus de risque de s'infecter (le sang est un excellent milieu de culture). Dans ce cas, le découpage du capot de la phlyctène, le lavage de la plaie pour éliminer le sang et l'utilisation ensuite d'un pansement occlusif sont indiqués.

- « Les principes de nettoyage de la plaie et de son pourtour : utiliser du sérum physiologique ; il n'y a pas d'indication à l'utilisation d'antiseptiques. La plaie ne doit pas être asséchée. » En cas de plaie simple non surinfectée notamment, l'escarre est lavée avec du sérum physiologique ou de l'eau du robinet. L'eau et le savon (préférer si possible un savon surgras) sont indiqués sur les escarres du siège, en particulier si la plaie est souillée de matières fécales chez les malades incontinents. Les bains ne sont pas contre-indiqués : ils favorisent le ramollissement de la nécrose et facilitent la détersion.

- « La détersion est nécessaire sur les plaies nécrotiques et/ou fibrineuses, qu'elle soit mécanique (en évitant saignement et douleur) ou aidée par un pansement tel que alginate ou hydrogel. » La détersion est un acte très important pour prévenir l'infection. Sous la nécrose en général s'accumulent les bactéries, en particulier les germes gram négatifs qui prolifèrent dans les tissus morts.

- « Le recouvrement de la plaie par un pansement permet de maintenir un milieu local favorisant le processus de cicatrisation spontanée. » Le milieu humide favorise la migration des cellules et évite leur desséchement. La plupart des pansements modernes permettent d'obtenir au niveau de la plaie le maintien d'une humidité optimale. En revanche, l'excès d'humidité risque d'altérer la peau autour de l'escarre et sera combattu en utilisant des pansements absorbants (alginate, hydrofibre). Lorsqu'une plaie est sèche, elle peut être humidifiée avec un hydrogel qui contient 80 % d'eau dans un gel cohésif remplaçant avantageusement les compresses imprégnées de sérum physiologique, les émulsions ou les pansements gras que l'on utilisait autrefois.

- « Aucun élément dérivé de l'étude de la littérature ne permet de préconiser un pansement plutôt qu'un autre. Le choix du pansement (cf. tableau ci-dessus) est fonction de l'aspect de la plaie (sèche, exsudative, hémorragique, malodorante), de sa couleur (cf. classification colorielle, p. IV).

Le traitement de l'escarre infectée.

« L'infection d'escarre se caractérise comme suit :

- deux des symptômes doivent être présents : rougeur, sensibilité ou gonflement des bords de la plaie (cf. photo ci-contre) ;

- et une mise en évidence bactériologique après prélèvement (liquide de ponction, de biopsie et/ou hémocultures). »

« L'infection est à distinguer de la colonisation bactérienne. La colonisation bactérienne est quasi constante dans les plaies chroniques. Elle est utile à la cicatrisation et doit être contrôlée par un nettoyage et une détersion soigneuse des tissus nécrotiques. »

« L'intérêt des antibiotiques ou des antiseptiques locaux en l'absence de diagnostic d'infection d'escarre n'a pas été démontré. » En général, des antibiotiques généraux sont prescrits si le malade est fébrile, présente une hyperleucocytose ou un syndrome inflammatoire (élévation de la CRP). Les antiseptiques locaux (Bétadine® par exemple) sont choisis pour leur spectre d'action et leur tolérance.

Le traitement chirurgical : « La chirurgie est nécessaire en cas de nécrose tissulaire importante, d'exposition des axes vasculonerveux, des tendons ou des capsules articulaires, d'exposition de l'os et d'infection. » La nécrose tissulaire importante expose le malade à un risque infectieux important et doit impérativement être retirée rapidement. Ce geste peut être réalisé au bloc opératoire mais aussi en ambulatoire et au lit du malade par un chirurgien ou un médecin entraîné. En cas de contact osseux au fond d'une escarre, il existe un risque majeur de contamination de l'os par des germes. L'antibiothérapie est souvent prescrite. Il est classique de ne pas proposer de pansement occlusif au début, mais plutôt un pansement de type alginate ou hydrofibre absorbant si la plaie est suffisamment exsudative. En cas d'atteinte tendineuse, il faut retirer la nécrose, après l'avoir éventuellement ramollie avec un hydrogel. La résection d'un tendon est parfois nécessaire. Il se crée ensuite une zone fibreuse (néo-tendon) plus ou moins fonctionnelle.

« La chirurgie est contre-indiquée chez le sujet âgé porteur d'escarres plurifactorielles ainsi qu'en l'absence de mise en place ou d'efficacité des mesures de prévention des récidives. »

La situation est différente pour la personne âgée qui relève peu d'indications chirurgicales et le sujet jeune paraplégique par exemple qui a une escarre. Ce dernier doit pouvoir relever d'un traitement chirurgical sous réserve que sa prévention d'escarre sera ensuite la plus « idéale » possible : matériel d'aide à la prévention prescrit, éducation, autosurveillance. Un patient déprimé devra ainsi être traité au préalable pour éviter que son escarre ne récidive rapidement s'il ne participe pas à sa propre prévention. Les supports en particulier doivent être très performants après la chirurgie (coussin à air « à tétine » : Roho™, Kinéris™).

« Les mesures de prévention sont à intensifier au stade de l'escarre constituée afin de limiter la constitution de nouvelles escarres. » Le traitement de l'escarre comme sa prévention sont l'utilisation de support permettant de diminuer la pression sous les points d'appui et les changements de position. Le rôle des aides-soignants est fondamental dans le positionnement du malade qui a des escarres et dans le changement régulier de ces positions. Ce travail doit être coordonné par l'infirmière qui travaille en équipe avec les aides-soignants. Les ergothérapeutes et les kinésithérapeutes seront sollicités pour aider au positionnement des malades présentant des déformations rhumatologiques, neurologiques ou orthopédiques. Des coussins et des blocs de mousse peuvent aider au positionnement du malade et éviter que des contacts anormaux se produisent (barrières du lit, contact entre les genoux, malléoles...). Ce ne sont pas les pansements, même si leur utilisation est indispensable pour aider la cicatrisation et participer au confort du malade, qui suffisent à traiter l'escarre.

« La correction des déséquilibres métaboliques et hémodynamiques doit être entreprise de façon concomitante au traitement local. » Afin de ne pas compromettre la cicatrisation d'une escarre, le malade anémique, par exemple, avec un chiffre limité d'hémoglobine, devra être transfusé.

« Les soignants doivent être formés à la description et à l'évaluation des escarres, aux techniques de réalisation du pansement et au traitement de la douleur. » D'où l'intérêt des formations continues sur ce thème (congrès infirmier, conférence des plaies et cicatrisations).

Le traitement de la douleur de l'escarre.

« La douleur de l'escarre peut être spontanée ou non, brutale et inattendue, limitée aux soins, aux changements de position ou aux mobilisations, ou présente en continu. La douleur n'est pas corrélée à la taille de l'escarre. »

« Il est recommandé d'évaluer régulièrement la douleur pour mieux orienter la prise en charge. »

« Il est recommandé d'utiliser des antalgiques selon la stratégie en trois paliers recommandée par l'OMS. »

« L'utilisation de supports d'aide à la prévention et au traitement de l'escarre diminue le phénomène douloureux. »

Le traitement de l'escarre au stade de soins palliatifs.

« La prise en charge des escarres en soins palliatifs nécessite une évaluation la plus objective possible du pronostic vital du patient et du pronostic de l'escarre fréquemment réévaluée en équipe. L'apparition d'escarres, le plus souvent multiples, traduit une dégradation de l'état général du patient. » À ce stade, la prise en charge doit privilégier le confort du malade. L'objectif n'est plus la guérison de l'escarre. Dans les derniers jours de vie du malade, les mesures de prévention sont également allégées, notamment lorsque les changements de position deviennent douloureux.

SUPPORTS DE PRÉVENTION ET DE TRAITEMENT

« L'intérêt d'un support pour la diminution de la pression a été démontré en comparaison avec un matelas standard. Le support diminue le temps d'obtention de la guérison de l'escarre et les phénomènes douloureux. »

De nombreux dispositifs de support existent : lits, matelas, surmatelas, coussins de siège et accessoires de positionnement (cf. tableaux pp. XII-XIII). « La classification en concepts permet de rassembler selon un même mode d'action tous les supports (matelas et surmatelas) ayant les mêmes objectifs et globalement les mêmes performances » :

- concept 1 : support statique en matériau qui se conforme au patient ;

- concept 2 : support dynamique travaillant de façon discontinue ;

- concept 3 : support dynamique travaillant de façon continue.

« Le choix d'un support relève de l'équipe soignante qui doit s'appuyer sur des critères de choix explicites. La stratégie de choix d'un support repose sur les facteurs de risque et les caractéristiques du patient, les ressources humaines et matérielles disponibles, les contraintes d'organisation. »

« Les critères de choix d'un matelas ou d'un surmatelas sont les suivants : niveau de risque, nombre d'heures passées au lit, degré de mobilité du patient, fréquence des changements de position, possibilité de les réaliser en particulier à domicile, transfert lit-fauteuil possible ou non. En cas d'utilisation d'un matériel dynamique, il est nécessaire de respecter les consignes d'utilisation (temps de gonflage du support, fonctionnement de l'alarme). »

« Les critères de choix d'un coussin de siège sont délicats, la pression d'interface est plus difficile à diminuer, le poids du corps étant réparti sur une surface restreinte.

Les matériaux et principes de fonctionnement sont identiques à ceux des matelas. Il faut tenir compte de leur épaisseur pour éviter l'écrasement du coussin. »

« Des critères complémentaires de sélection des supports peuvent être utilisés, en particulier chez les patients dont l'état requiert un usage prolongé ou permanent d'un support. »

Classification des stades de l'escarre(1)

- Stade I : érythème cutané sur une peau apparemment intacte ne disparaissant pas après la levée de la pression ; en cas de peau plus pigmentée : modification de couleur, oedème, induration.

- Stade II : perte de substance impliquant l'épiderme et en partie (mais pas sur toute son épaisseur) le derme, se présentant comme une phlyctène, une abrasion ou une ulcération superficielle.

- Stade III : perte de substance impliquant le tissu sous-cutané avec ou sans décollement périphérique.

- Stade IV : perte de substance atteignant et dépassant le fascia et pouvant impliquer os, articulations, muscles ou tendons.

1- Classification établie par le National Pressure Ulcer Advisory Panel (NPUAP, 1989).

Stade 0

Classification colorielle

Classification colorielle en trois couleurs : le noir représente la nécrose, le jaune la fibrine, le rouge le bourgeon charnu. Lorsque le soignant fait le pansement, il apprécie le pourcentage relatif de chaque tissu au fond de la plaie et le schématise de la façon suivante.

L'installation à 30°

Le malade est installé sur le côté de façon transitoire. Il est ensuite basculé en arrière sur un coussin, un triangle de positionnement ou une cale (voire ci-dessous). Sous le trochanter s'interpose alors la masse musculaire le protégeant. Le sacrum n'est pas en appui. Il faut faire attention aux malléoles, aux genoux et interposer des coussins si nécessaire pour éviter de créer de nouveaux appuis.

La détersion mécanique

La détersion est effectuée par une infirmière ou un médecin. Une expérience est requise. Il est classique de dire que l'infirmière effectue une détersion plus superficielle (jusqu'à un centimètre en profondeur) que le médecin ou le chirurgien. Une prémédication et/ou une anesthésie locale est parfois nécessaire avant la pratique de ce geste, sauf chez les patients ayant des troubles de la sensibilité (paraplégiques, tétraplégiques). Le découpage de la nécrose est habituellement indolore (tissu mort). En cas d'hémorragie (non habituelle), l'application d'un pansement hémostatique (alginate) et la compression suffisent en général. Il est exceptionnel d'avoir à suturer une petite artère pour assurer l'hémostase. Avec un bistouri, des ciseaux à bouts renforcés, des pinces à griffe, on commence par la partie centrale de l'escarre en prenant appui sur le tissu nécrosé et jamais sur les bords de la plaie, dont on se rapproche seulement progressivement sans les atteindre complètement pour éviter douleur et hémorragie. On retire progressivement les tissus nécrosés. Il n'est pas rare que sous la nécrose, il existe des poches de pus qui doivent être lavées, rincées et drainées soigneusement.

Traitement de la douleur Les trois paliers

Palier 1

- Aspirine

- Paracétamol

Palier 2

- Dextropropoxyphène

- Codéine

- Tramadol

Palier 3

- Morphine

- Sulfate de morphine

- Fentanyl