La consultation, une réalité virtuelle - L'Infirmière Magazine n° 176 du 01/11/2002 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 176 du 01/11/2002

 

SUIVI DU PATIENT

Actualités

Pour prendre en charge, après prostatectomie, un nombre important de patients habitant loin du centre hospitalier, l'équipe du département urologie de l'Institut mutualiste Montsouris (Paris) a testé un suivi par dossier médical Internet de certains de ces malades. Expérience relatée par le Pr Vallancien.

Les transmissions d'informations médicales sur le réseau Internet voient leur fréquence augmenter, comme le prouvent l'éclosion des sites professionnels et grand public, ainsi que le développement de transferts d'informations médicales par méls. Dès lors, pourquoi ne pas utiliser cet outil informatique pour le suivi régulier à domicile de patients en postopératoire ? Quels types de patients ? Pour quelles affections ? L'expérience de l'Institut mutualiste Montsouris (IMM) nous permet d'entrevoir l'avenir...

Malades « avertis »

Une étude préalable chez les patients consultant en urologie, ayant ou non accès à l'informatique, fut d'abord réalisée. Les malades devaient répondre à un questionnaire concernant leurs moyens d'information médicale, leurs habitudes de connexion à Internet et leur intérêt pour un dossier médical sécurisé avec communication en ligne par Internet. Les réponses ont montré que 31 % des patients, toutes affections urologiques confondues, adhéreraient à ce principe. Ce pourcentage est de 63 % pour les affections prostatiques : 31 % des patients consultant pour ce type d'affection possédaient Internet et 48 % acceptaient de recevoir leur dossier en ligne. 95 % des patients présentant un cancer de la prostate localisé et équipés d'Internet étaient favorables à la mise en place de leur dossier informatisé. Sur un an, c'est ainsi 100 malades sur 373 ayant subi une prostatectomie radicale et possédant un ordinateur à domicile qui ont accepté d'être inclus dans l'étude. L'âge moyen était de 63 ans ; 12 % des patients venaient de Paris, 36 % de la région Île-de-France, 34 % de province et 18 % de l'étranger. 58 % étaient des cadres supérieurs et professions libérales et 15 % des artisans ou commerçants.

Sécurité et efficacité

La mise en place des dossiers a débuté après autorisation de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil). Grâce à un identifiant et à un mot de passe, les patients ont pu accéder à un site sécurisé comportant des informations médicales et une communication en ligne avec l'équipe soignante. Le site était hébergé sur une machine serveur dévolue spécifiquement à ce projet et présentant toutes les sécurités informatiques.

Le site est fait de pages comprenant les comptes rendus d'hospitalisation. Un questionnaire de qualité de vie, fondé sur l'évaluation de la continence urinaire et de la vie sexuelle ainsi qu'une fiche de dosage biologique de PSA sont inclus. Concrètement, les malades sont revus en consultation entre un et deux mois après l'intervention chirurgicale. Ensuite, s'il n'existe plus de difficultés postopératoires, ils inscrivent de chez eux leur taux de PSA et remplissent le questionnaire. Ces données sont envoyées au médecin qui les a traités dans le service. Un dosage de PSA surprenant, saisi par erreur par le patient, génère de la part du médecin un message de vérification et éventuellement un nouveau contrôle de PSA. Le rendez-vous est donné par Internet. Une page de courrier libre permet au patient d'exprimer pleinement ses demandes, inquiétudes ou satisfactions et d'échanger avec l'équipe soignante des informations. Une réponse médicale rapide (en moyenne 48 heures) participe largement à la satisfaction du patient.

Sur les 100 patients, 92 se sont connectés régulièrement. 98 % d'entre eux étaient satisfaits des rubriques du site et 95 % de leur dossier médical. 11 % ont rencontré des difficultés de connexion et 14 % des difficultés techniques (mauvaise saisie du taux de PSA, non-fonctionnement des messages vidéos par manque de logiciel adapté...). Aucune intrusion sur le site n'a été déplorée.

Droit à l'information

La mise au point de ce service a permis de garder un contact régulier avec les patients sans qu'ils aient nécessairement à se déplacer, de limiter les échanges téléphoniques et la manipulation de dossiers médicaux les concernant, de fournir au médecin généraliste un accès au domicile du malade. Enfin, l'utilisation par le malade d'un dossier virtuel le concernant, renforce le principe du droit d'accès des patients à l'ensemble des informations concernant leur propre santé. Mais ce type de suivi n'est sans doute possible que pour certaines maladies (cancers localisés par exemple) et s'adresse à une population de malades avertis et privilégiés socialement.