Responsabilités en psychiatrie - L'Infirmière Magazine n° 176 du 01/11/2002 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 176 du 01/11/2002

 

Juridique

L'hospitalisation en secteur psychiatrique ne peut se faire sans l'accord du patient ou de son représentant légal, hormis les cas prévus par la loi. De ce principe fondamental découlent de lourdes obligations à la charge des infirmières.

En fonction du risque de dangerosité des malades vis-à-vis des tiers, mais aussi vis-à-vis d'eux-mêmes, il existe, en secteur psychiatrique, des obligations particulières de surveillance impliquant de lourdes responsabilités pour les infirmières. Le caractère de ces obligations varie aussi en fonction du mode d'hospitalisation.

HOSPITALISATION SOUS CONTRAINTE

L'obligation de surveillance est renforcée dans tous les cas d'hospitalisation sous contrainte (hospitalisation d'office ou à la demande d'un tiers). En cas de dommage à un tiers ou au malade lui-même, il existe à la charge de l'établissement une présomption de faute de surveillance, fût-elle légère, imputable à une mauvaise organisation du service : libre accès à l'ouverture d'une fenêtre, absence de précaution pour interdire la sortie, etc. Cette présomption de faute n'est pas neutre sur le plan judiciaire : elle signifie, en cas de demande de dommages et intérêts en justice, que ce sera à l'établissement, devant les tribunaux, d'apporter la preuve de l'absence de faute.

La faute de surveillance de l'infirmière constitue par excellence le type même de faute de service, engageant alors la seule responsabilité de l'établissement de soins. Dans tous les cas de faute de service, la victime engagera son action en réparation du préjudice subi directement contre l'établissement. Néanmoins, l'originalité de ce système ne signifie pas pour autant, on le sait, l'impunité de l'agent : d'une part, l'infirmière peut toujours être poursuivie sur le plan pénal, voire disciplinaire (la sanction à son encontre pouvant aller du simple blâme à la révocation). D'autre part, l'hôpital peut engager à l'encontre de l'infirmière à l'origine d'une faute de surveillance, une action récursoire afin d'obtenir le remboursement des sommes versées en réparation du préjudice.

Ainsi, en cas de fugue d'un malade, seule la responsabilité de l'établissement pourra être retenue s'il y a dommage. Mais s'il est démontré que l'infirmière chargée de la surveillance du malade a facilité la fugue (en ayant laissé les clés sur une porte, oublié de fermer un service, etc.), l'établissement n'hésitera pas alors à engager la responsabilité disciplinaire de son agent. Dans tous les cas de fugue, l'infirmière avisera en premier lieu le médecin de service et la famille, voire le directeur de l'établissement ou l'administrateur de garde. Sa participation aux recherches se limitera à l'intérieur ou à proximité immédiate de l'établissement.

En règle générale, les tribunaux, saisis d'affaire mettant en cause le défaut de surveillance d'un service de psychiatrie, examinent un certain nombre de facteurs comme :

- le caractère prévisible de l'acte (comportement anormal du malade, libellé des certificats d'admission faisant état par exemple de tendances suicidaires, etc.) ;

- l'emploi de précautions préventives : aménagement des locaux, administration de calmants, visites de surveillance, isolement d'un malade dangereux, etc.

Ainsi, en ce qui concerne par exemple les actes d'agression commis à l'intérieur d'un établissement, les tribunaux n'hésitent pas à prononcer des condamnations à l'encontre des établissements au motif que « le personnel infirmier, bien qu'alerté par un patient des craintes que lui inspirait son voisin de chambre et remarquant son comportement anormal, n'a pas averti le médecin du service et n'a pris aucune précaution particulière ».

HOSPITALISATION LIBRE

L'obligation de surveillance est atténuée dans les cas d'hospitalisation libre. En effet, le malade (majeur et juridiquement capable) peut librement quitter l'établissement, même contre avis médical. Les tribunaux chercheront toutefois d'autres fautes que celle de surveillance pour engager la responsabilité de l'établissement en cas de dommage : omission d'informer la famille en cas de sortie, maintien dans un service d'urgence d'un malade prédisposé au suicide, etc.

Un malade en permission peut-il sortir avec ses médicaments ?

Non, sauf pour les permissions de 48 heures maximum. Dans tous les autres cas, seule une prescription peut être délivrée.

Une infirmière peut-elle signer une demande d'admission en hospitalisation à la demande d'un tiers ?

Non, la demande d'admission doit être présentée soit par un membre de la famille du malade, soit par une personne agissant dans son intérêt, à l'exclusion du personnel soignant de l'établissement d'accueil, mais aussi, selon la jurisprudence, du personnel administratif. Seule l'assistante sociale peut signer la demande de HDT. Évidemment, lorsque l'infirmière appartient à un établissement distinct de celui d'accueil, sa signature, dépourvue de toute intention de nuire, est recevable. La demande doit être manuscrite et signée par le demandeur. Elle doit comporter tous les éléments permettant d'identifier le demandeur et le malade, et de déterminer la nature de leurs relations.

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