Réagir face à la violence - L'Infirmière Magazine n° 177 du 01/12/2002 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 177 du 01/12/2002

 

Juridique

La violence, physique ou verbale, est devenue un acte courant, notamment dans le cadre de l'accueil des urgences à l'hôpital. Pour y faire face, les infirmières doivent connaître leurs droits et les moyens de défense dont elles disposent.

La violence peut prendre la forme d'agressions verbales (injures, menaces...) ou physiques (coups, crachats...), sans oublier les actes d'incivilité (comportements indécents, présence de chiens dangereux, etc.). À l'instar de toute infraction, ces violences peuvent être, selon leur gravité, classées comme crimes, délits, ou contraventions et faire l'objet de poursuites pénales.

DÉPOSER PLAINTE

Lorsque la personne à l'origine de l'agression est clairement identifiée, que les faits ne prêtent à aucune confusion possible, c'est-à-dire que l'agression n'est pas la réponse à une provocation, l'infirmière, comme tout citoyen, dispose de la faculté de déposer plainte afin de voir sanctionnée la personne coupable par une peine de prison et/ou d'amende. Aucun devoir de réserve ni de discrétion professionnelle ne saurait l'en empêcher.

Le but de la constitution de partie civile est d'obtenir personnellement réparation du préjudice subi par le versement de dommages et intérêts. La plainte avec constitution de partie civile ne peut par contre être déposée au commissariat. Elle doit être adressée au « doyen des juges d'instruction » près du tribunal de grande instance de son lieu de résidence par voie recommandée AR. La plainte devra alors être la plus précise possible en détaillant les faits, en y joignant les pièces justificatives (ITT, factures de soins, etc.), les éventuels témoignages de ses collègues et si possible le montant des dommages-intérêts réclamés.

PROTECTION PAR L'ÉTABLISSEMENT

Toute administration, hôpital inclus, est tenue d'organiser une protection spécifique de ses agents contre les menaces, violences, injures, etc. Cette obligation légale concerne tout type d'agression, qu'elle soit physique ou morale. Cette protection peut prendre la forme d'un soutien actif en assurant matériellement la prévention des faits et la protection des personnes. L'établissement peut ainsi recourir à une société de gardiennage ou à la force publique ; saisir le parquet ; diligenter une enquête administrative, à l'intérieur de l'établissement lorsque la ou les agressions ont été commises par un patient hospitalisé et prononcer la sortie du malade (avec autorisation médicale) à titre disciplinaire par exemple ; enfin, prendre symboliquement la défense publique et solennelle de son agent. La protection par l'établissement peut aussi prendre la forme d'une assistance judiciaire de l'agent attaqué. L'hôpital assiste l'agent dans les procédures judiciaires qu'il engage en payant les honoraires de l'avocat de l'agent ou en lui attribuant son propre avocat.

Enfin, l'hôpital peut décider d'octroyer à son agent agressé une réparation directe en argent afin de réparer au plus vite le préjudice subi sans attendre les résultats du procès. Bien souvent, dans ce cas, l'établissement se porte lui-même partie civile afin de se faire rembourser, ou agit seul si l'agent ne s'est pas constitué partie civile en exerçant une « action subrogatoire » (au titre des droits de la victime) à l'encontre de l'auteur du dommage. Si l'établissement manque à ses obligations en n'accordant pas la protection nécessaire, l'agent peut saisir le tribunal administratif afin d'obtenir l'annulation du refus de protection et l'exécution de son obligation de garantie, ainsi qu'une compensation financière en réparation du préjudice subi.

Si un patient, après m'avoir menacée à l'hôpital, m'agresse physiquement dans la rue alors que je rentre chez moi, puis-je demander à mon établissement le bénéfice de la protection instituée par la loi du 13 juillet 1983 ? Je précise que je suis infirmière contractuelle en cours de stagiarisation.

Outre les situations d'agression sur les lieux du travail protégées par la loi, l'article 11 s'applique aussi lors du trajet entre le domicile et le travail. D'autre part, la protection instituée par la loi s'applique tant aux contractuels, qu'aux stagiaires et agents titulaires. Attention : l'article 11 ne s'applique pas pendant une grève, ni en cas de faute personnelle détachable du service de l'agent. Enfin, le dommage doit être lié aux fonctions, c'est-à-dire que la protection ne saurait jouer lorsque l'agression d'un agent est le fait d'un problème purement personnel, c'est-à-dire détachable de tout lien avec le service.

La responsabilité de l'agent est dans ce cas personnelle.

Ce que prévoit la loi

Article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

« Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le Code pénal et les lois spéciales [...].

La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, outrages, injures ou diffamations dont ils peuvent être victimes à l'occasion de leurs fonctions et de protéger et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. »

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