L'oedème aigu du poumon - L'Infirmière Magazine n° 178 du 01/01/2003 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 178 du 01/01/2003

 

Pneumologie

Conduites a tenir

Il existe deux types d'oedèmes pulmonaires : l'oedème pulmonaire cardiogénique et l'oedème par altération de la membrane alvéolocapillaire. L'oedème cardiogénique est une urgence médicale nécessitant un diagnostic et une thérapeutique rapidement effectués.

DÉFINITION

L'oedème aigu du poumon (OAP) est un état de détresse respiratoire aiguë, fréquent chez le sujet âgé (forme aiguë de l'insuffisance cardiaque) survenant lorsque du liquide d'origine plasmatique se diffuse dans les espaces extravasculaires du poumon.

MANIFESTATIONS

Le début est souvent brutal, souvent nocturne, précédé de grésillements laryngés et de toux irritative. C'est un tableau de polypnée contraignant le malade à s'asseoir. La dyspnée est très intense, angoissante, amenant au bout de quelques minutes une expectoration mousseuse blanche, parfois teintée de sang.

La cyanose est importante et les sueurs abondantes. La tension artérielle est normale ou basse, parfois très élevée à la faveur d'une poussée hypertensive chez un sujet hypertendu.

Certains signes sont de mauvais pronostics : refroidissement des extrémités, marbrures et lividités des membres, tension artérielle basse ou réduite de 40 mm Hg par rapport à la tension habituelle, pouvant s'intégrer dans un tableau de choc cardiogénique avec débit cardiaque très réduit.

FACTEURS ÉTIOLOGIQUES

Les principales étiologies de l'OAP cardiogénique sont : les affections ventriculaires gauches (cardiopathies hypertensives, ischémiques, valvulaires, rétrécissement aortique ou mitral, troubles du rythme, etc.), les affections des veines pulmonaires, les hypervolémies, l'hyperhydratation, l'insuffisance rénale...

OBJECTIFS

Il faut assurer une hématose correcte, réduire l'oedème pulmonaire, diminuer la précharge du ventricule gauche en diminuant le retour veineux, renforcer la contractilité myocardique, diminuer les résistances artérielles systémiques, rechercher la cause.

ACTIONS

Comme toujours en situation d'urgence, la prise en charge du patient repose sur :

- l'évaluation rapide et systématique de ses fonctions vitales : état de conscience, fonction ventilatoire (appréciée sur la fréquence respiratoire, importance de la dyspnée - cyanose, signes de lutte, épuisement, tableau asphyxique -, valeur de la SpO2, fonction circulatoire estimée à partir de la fréquence cardiaque - pouls - et par la mesure des chiffres tensionnels). La prise de tension initiale est un geste d'importance capitale car c'est autour de cette donnée que va s'articuler toute la stratégie thérapeutique ;

- la réalisation des gestes de conditionnement minimal : installation du patient au repos strict, en position demi-assise (elle permet de diminuer le travail cardiaque en favorisant la baisse du retour veineux), les jambes pendantes, mise en place d'un abord veineux périphérique (on utilise de préférence un soluté glucosé à 5 % à perfuser avec le plus petit débit possible, surveillé avec attention afin de ne pas effectuer un remplissage vasculaire trop important (ce qui aggraverait l'état clinique du patient), surveillance électrocardioscopique, recours systématique à l'oxygénothérapie nasale à un débit d'environ 6 à 8 l/mn, pour restaurer les échanges gazeux ;

- la définition des objectifs thérapeutiques et la mise en oeuvre des moyens thérapeutiques nécessaires pour atteindre ces objectifs.

TRAITEMENT

Le traitement toujours médicalisé est initié au domicile du patient ou pendant le transport à l'unité de soins intensifs cardiologiques.

Le traitement médicamenteux repose, lorsque la tension artérielle initiale est élevée ou « normale », sur l'administration d'un diurétique d'action rapide type furosémide (40 mg en IV lente à renouveler deux ou trois fois), d'un dérivé nitré par voie sublinguale (Natispray® à pulvériser, Risordan® cp à laisser fondre sous la langue).

Une tension artérielle initiale basse constitue une forme à haute gravité pour laquelle il est impératif d'éviter tout médicament vasodilatateur (dérivés nitrés) ou diurétiques et de privilégier les amines vasopressives (type Dobutrex®, dopamine).

Le traitement médical doit apporter une amélioration spectaculaire dans la demi- heure qui suit son institution.

SOINS INTENSIFS

Les soins en unités de soins intensifs comprennent le monitoring électrocardiographique, le maintien de l'oxygénothérapie, la poursuite des diurétiques en IV, le contrôle des électrolytes sanguins, gazométrie et chimie sanguine), l'apport éventuel de potassium, la perfusion de dérivés nitrés en IV si la tension artérielle demeure supérieure à 100 mm Hg pour la pression systolique.

Dans les formes graves avec bas débit et acidose, le recours sous monitorage hémodynamique aux inotropes positifs par voie veineuse peut être nécessaire (dobutamine : 5 à 20 mg/kg/mn).

La feuille de surveillance comprend : le pouls, la tension artérielle, la diurèse, la conscience, la coloration, les sueurs.

ARRÊT CARDIAQUE

La persistance de signes cliniques de gravité doit faire craindre l'épuisement du patient et l'arrêt cardiaque anoxique et imposer l'intubation trachéale et la ventilation assistée dans les formes asphyxiques.