La relation d'aide - L'Infirmière Magazine n° 178 du 01/01/2003 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 178 du 01/01/2003

 

Formation

Longtemps réservée aux psychologues ou aux infirmières spécialisées en psychiatrie, la relation d'aide, désormais, se démocratise parmi les soignants. Psychologie, sociologie, counseling... ses axes d'intervention sont variés.

Partie intégrante de la pratique soignante, inhérente à l'histoire de la profession infirmière, la relation d'aide s'est professionnalisée au cours des années 1980, sous l'influence des courants de pensée et des modèles nord-américains, pour s'affirmer définitivement dans le domaine de la clinique infirmière.

« Il est nécessaire de faire évoluer les mentalités et les comportements, de reconnaître le pouvoir de la dimension relationnelle. Il faut multiplier les expériences, promouvoir les formations à la relation d'aide, favoriser la communication à tous les niveaux et développer sa capacité d'écoute afin de répondre aux attentes et aux espérances du malade », écrivait déjà Jocelyne Maillet, surveillante générale à La Pitié-Salpêtrière, en 1992(1).

Depuis dix ans, les formations à la relation d'aide ont progressivement gagné en logique et en adaptabilité. Elles ont permis à de très nombreux professionnels d'approfondir leur pratique. Mais aussi d'analyser leurs propres émotions mobilisées dans le processus d'aide, exercices indispensables dans leur activité.

Méthodes interactives.

La formation insiste sur les principes de la démarche relationnelle construite au cours de l'apprentissage, dès le début de la vie professionnelle. Mais il faut aux infirmières de nombreuses années d'expériences et de formations pour structurer d'une manière réfléchie cette démarche, et la transférer avec efficience dans le quotidien du travail.

Aider un patient, accompagner une famille, gérer un groupe, faire accepter un handicap ou une maladie, nécessitent des capacités d'écoute et des facultés empathiques qui s'acquièrent progressivement lors de mises en situation.

Les sessions de formation ont généralement des objectifs précis, en lien direct avec la réalité, même si la démarche peut sembler complexe au regard du domaine traité. La gestion d'une situation douloureuse apprend à se distancier des faits observés, mais en même temps à travailler sur la posture de l'aidant. Les formations doivent être effectuées par des formateurs compétents, reconnus par leurs pairs et véritables cliniciens eux-mêmes. Elles sont organisées par petits groupes de stagiaires, de durée adaptée aux exigences du terrain, et utilisent des méthodes interactives.

Anticipation.

Selon Brigitte Bonin, spécialiste clinique chargée de formations à la relation d'aide dans les structures de soins à domicile et dans les établissements hospitaliers, il faut, au début des formations, véritablement positionner la relation d'aide dans le rôle infirmier autonome. En effet, la souffrance d'autrui impose une action d'anticipation par les infirmières. C'est l'objectif du travail mené au cours des sessions de formation. Ces sessions font prendre conscience aux stagiaires de leur propre système de perception, leur apprennent à se mettre à l'écoute de l'autre et développent leurs capacités à éprouver ou à se laisser éprouver par la souffrance d'autrui.

Ensuite, seulement, on peut travailler sur le corps et manifester à autrui une attention sans se laisser aller à des stéréotypes. Ces temps de formation sont gérés avec beaucoup de respect pour les participants, sans bouleverser leurs mécanismes de défense.

Accompagner la souffrance.

Les méthodes sont essentiellement interactives. Après des connaissances de base sur la communication, la formation est centrée sur les expériences vécues par les participants. En l'occurrence, des soignants dont la mission première est de prendre en charge des malades dans le cadre d'accompagnement en soins palliatifs ou dans des unités d'oncologie et, plus récemment, toute infirmière soucieuse d'améliorer sa pratique en matière d'interactions humaines.

La relation d'aide a longtemps été réservée au champ des psychologues ou des infirmières spécialisées en psychiatrie. Aujourd'hui, elle est intégrée comme un véritable savoir d'accompagnement individualisé. Faciliter la professionnalisation des soignants au moyen de formations adaptées constitue un enjeu important pour les établissements et les usagers, alors même que les structures de soins rencontrent des difficultés liées à la pénurie de personnel et aux restrictions budgétaires, freinant la prise en charge personnalisée. Ces contraintes conduisent à repenser les pratiques, à développer de nouvelles compétences en matière d'organisation du travail et de gestion des soins, à adapter les approches relationnelles. Elles remettent aussi en question le projet de soins, dont la finalité est souvent paradoxale dans un contexte où la durée de séjour est brève et le roulement de malades constant.

« Nous ne sommes pas seulement une somme de tuyaux, d'organes et de neurones, mais aussi des personnes, souligne Michel Hautecouverture, chef de service de diabétologie, endocrinologie et maladies métaboliques de l'hôpital Saint-Joseph à Paris(2). La technicité est essentielle aux soins de nos organes. Elle coûte cher. Les moyens humains, essentiels aux soins de la personne, coûtent encore plus cher, un robot informatisé pourra un jour peut-être remplacer une de mes articulations ou m'extraire une cataracte, mais il y a peu de chances qu'il accompagne mes souffrances. » Dans ce contexte, la ténacité des professionnels pour conserver une qualité égale en matière de prestations prend véritablement un sens nouveau, et les projets de départ en formation deviennent des critères de motivation et d'amélioration non dérisoires. En dénonçant les recettes toutes faites, en instaurant les bases d'un modèle relationnel permettant au patient de trouver en lui-même la solution à ses difficultés, modèle fondé sur les connaissances structurées issues de leur propre expérience et rationalisé par le processus de la formation, les infirmières ont définitivement acquis un savoir unique et occupent une place reconnue dans le champ des professionnels de la relation humaine.

1- Qualité des soins et de la relation, communication entre partenaires de soins. Éditions Lamarre. 1992. P. 179. 2- Médecine, on brade ! Le Pommier-Fayard. 2000. P. 7.

TÉMOIGNAGE

« Cette formation est partie d'un mal-être infirmier »

Line Wilson, diplômée d'État depuis 1990, à Créteil (Val-de-Marne), a suivi une formation en enrichissement des soins. Elle a participé à la création de l'association Idées (infirmière diplômée d'État enrichie en soins), créée en 2000-2001, qui compte actuellement 140 membres.

« La demande est venue du fait que nous étions de jeunes infirmières, insuffisamment armées pour ne plus être en souffrance face aux malades, très démunies face à la prise en charge des patients sidéens. La responsable de formation continue de l'hôpital m'a proposé une formation en enrichissement des soins. Cette formation est organisée sous forme de six modules étalés sur un an et demi. On a le temps de faire le point entre les modules, de s'approprier la formation. Elle nous apporte des trousseaux de clef, on a les mains et cette formation vous permet d'utiliser différentes façons d'ouvrir les portes que vous choisissez en fonction de vos méthodes, et en s'appropriant des outils qui vous ressemblent ! Après cette formation, j'ai effectué un approfondissement en supervision, pendant deux ans, un jour par mois. On sort changé de ces formations, avec une autre conscience, conscience d'être soignant. Cette formation est partie d'un mal-être infirmier, j'avais envie d'être infirmière mais je ne trouvais pas de moyens de répondre aux patients et je n'ai pas voulu abandonner.

La création de l'association s'est inscrite dans ce projet, nous voulions, mes collègues de formation et moi-même, avancer en groupe et continuer à faire "pousser" la clinique infirmière. »

Formations(1)

-> Université René-Descartes

Paris V

Faculté de médecine Cochin Port-Royal

45, rue des Saints-Pères

75270 Paris

Tél. : 01 42 86 22 93

-> Formation évolution et synergie

Résidence Bonaventure

3, avenue de la Synagogue

84000 Avignon

Tél. : 04 90 16 04 16

-> Cefras, centre de formation et de recherche à la relation d'aide et de soins

Allée Phytolia - BP 23

49120 Chemille

Tél. : 02 41 30 57 09

-> Grieps

13, avenue Philippe- Auguste

75011 Paris

Tél. : 01 40 09 87 99

-> UFR de santé médecine et biologie humaine

74, rue Marcel-Cachin

93017 Bobigny cedex

Tél. : 01 48 38 76 80

- DESS Formations en santé

- Stratégies et développements de formation en santé

-> Conservatoire national des arts et métiers

292, rue Saint-Martin

75003 Paris

Tél. : 01 40 27 29 16

- Psychologie du travail

- Sociologie du travail

- Organisation du travail et de l'entreprise

- Ergonomie

- Formation des adultes

- Hygiène et sécurité du travail

-> Formation au counseling

Contacts et organisations des sessions

Catherine Tourette-Turgis

Tél. : 01 42 85 34 54

http://www.commentdire.com/ counseling/cadrecounseling.htm

commentdire@compuserve.com

1- Cette liste n'est pas exhaustive.