Un avenir mal assuré - L'Infirmière Magazine n° 178 du 01/01/2003 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 178 du 01/01/2003

 

MATERNITÉS

Actualités

La pénurie de personnel, le manque de moyens, la hausse des assurances dans le privé, rendent chaque jour plus aléatoire le fonctionnement des maternités. Une réorganisation suivant le modèle anglo-saxon se met en place.

Guy-Marie Cousin, secrétaire général du Syngof, avoue être préoccupé. Pour plusieurs raisons. Premier motif de mécontentement, la perversité du système mis en place avec les décrets de périnatalité de 1998, sans cesse contourné par surestimation des risques. Les maternités sont classées selon trois niveaux de soin allant du moins technique (niveau 1 : unité obstétrique simple) au plus technique (niveau 3 : unité d'obstétrique, de néonatologie et de réanimation). Or, les femmes s'adressent quasi systématiquement au niveau 3, même lors d'une grossesse normale, ce qui a pour effet de saturer ce niveau et de faire chuter dangereusement l'activité des maternités de niveau 1. De plus, cette réorganisation nécessitait des moyens prévus dans les décrets. « Cela fait maintenant quatre ans que nous attendons ces moyens », déplore Guy-Marie Cousin.

À cela s'ajoute la pénurie de personnel soignant sévissant cruellement dans ce secteur : il manquerait 3 000 gynécologues obstétriciens selon le ministère de la Santé, des pédiatres, des sages-femmes et des infirmières... 350 chefs de service de maternités publiques somment le ministre de la Santé de prendre de toute urgence des mesures indispensables au bon fonctionnement de leurs services. 120 menacent de démissionner dans les jours à venir. L'application des 35 heures, du repos de sécurité (repos de 12 heures minimum après une garde de 24 heures), et de la directive européenne selon laquelle le médecin ne peut travailler plus de 48 heures par semaine, se sont ajoutées à une situation déjà périlleuse.

Vers une réorganisation ?

Et c'est pire pour les cliniques privées qui assument environ 45 % des 770 000 naissances annuelles. Celles-ci sont victimes du « racket » des assureurs. La prise en charge de la responsabilité civile médicale des professionnels de santé et des établissements privés, résiliée pour beaucoup d'entre eux au 31 décembre dernier, est couverte temporairement pour l'année 2003 par le Groupement temporaire d'assurance médicale (GTAM)... qui affiche des taux de deux à cinq fois supérieurs aux taux en vigueur l'année dernière. Guy-Marie Cousin dénonce cette augmentation résultant de leur situation de monopole. « Car en 2002, il n'y a pas eu de grave erreur médicale. Nous avons donc demandé aux assureurs de justifier l'augmentation des primes. Jusqu'à ce jour, nous n'avons eu aucune explication. » Que faire ? Jean-François Mattei a préconisé le 14 décembre dernier la réorganisation du système, dans le sens des propositions déjà émises par les décrets de périnatalité de 1998 : les accouchements n'auraient lieu que dans des grands centres disposant des plateaux techniques, des équipements et du personnel soignant nécessaires. Sauf complications, le suivi pré- et post-natal aurait lieu dans des centres de « périnatalité ». De plus, toute maternité n'effectuant pas plus de 300 à 400 accouchements par an devrait fermer. Coût économique oblige. Tant pis si dans certaines contrées, le trajet parcouru pour se rendre à l'hôpital le plus proche peut parfois dépasser une heure de voiture. La sécurité du patient est-elle toujours garantie dans ces conditions ?

ILS ONT DIT

« Le GTAM ne règle pas le problème. Il faut trouver un compromis avec les assureurs car c'est la Sécurité sociale qui assumera la hausse des primes. »

« Les assureurs ont pris la loi du 4 mars comme prétexte pour augmenter les primes, compensant ainsi les difficultés que connaît ce marché à un niveau international. »

Claude Evin, rapporteur de la loi du 4 mars 2002.

« Nous avons décidé de lever le mouvement d'arrêt d'activité dans les maternités privées puisque les médecins sont de toute façon réquisitionnés. »

Guy-Marie Cousin, secrétaire général du Syngof.