Casse-tête démographique - L'Infirmière Magazine n° 179 du 01/02/2003 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 179 du 01/02/2003

 

RAPPORT BERLAND

Actualités

Le rapport Berland rend son verdict sur la démographie des professions de santé et les bouleversements à venir. Parmi les recommandations : la délégation de certaines tâches médicales aux paramédicaux...

La mission sur la démographie des professions de santé a pris le nom de son président, le Pr Yvon Berland, doyen de faculté de médecine à Marseille. Elle lui fut confiée par Jean-François Mattei le 25 juin 2002. Objectif : analyser la situation démographique actuelle des professions de santé, puis faire des propositions à court, moyen et long terme pour une optimisation maximale de ces ressources sur le territoire.

Population infirmière.

Au 1er janvier 2002, le nombre d'infirmières en activité (France entière)(1) est de 418 571, en progression de 3,5 % par rapport à 2001. En 20 ans, cette population a enregistré une hausse de 57,7 % (265 453 en 1982).

Les projections de la population infirmière ne sont pas encore établies car il faut intégrer plusieurs paramètres difficilement évaluables, comme la répercussion de l'application de la RTT, ainsi que l'augmentation et le vieillissement de la population. En cas de diminution des densités, il faut envisager une baisse du volume de la prise en charge des soins. Il faut aussi considérer l'interdépendance des professions de santé. Le manque évident de médecins pendant une dizaine d'années aura une répercussion directe sur l'organisation des soins, et sur le travail des infirmières.

Les propositions et recommandations du rapport.

Certaines recommandations concernent plus ou moins directement la profession infirmière.

Grand bouleversement en vue ? L'une des recommandations consiste à déléguer des tâches médicales aux paramédicaux. « Redéfinir le contour des métiers, mettre en place un partage des tâches, créer de nouveaux métiers, faciliter les passerelles entre les différentes professions de santé. » Les infirmières devraient ainsi voir évoluer le champ de leurs compétences. Dans la même logique, elles délégueraient certaines tâches aux aides-soignantes.

Il est aussi question « d'inciter au regroupement des professionnels de santé dans des maisons de soins, d'autoriser l'exercice en cabinet secondaire, et d'élaborer un statut de collaborateur salarié, aller vers un conventionnement adapté des zones démédicalisées ».

Le rapprochement du public et du privé y est suggéré : « Organiser dans un cadre administratif unique des pôles médicochirurgicaux référents permettant une collaboration public/privé pour répondre à des besoins de santé de manière non redondante et non concurrentielle dans un périmètre géographique défini. »

L'éducation sanitaire de la population et des malades deviendrait un objectif à intégrer à l'organisation des soins.

Enfin, un Observatoire national de la démographie des professions de santé (à un niveau national et régional) devrait voir le jour afin de pallier la diversité des sources et de garantir la fiabilité des chiffres.

1- Source : Drees.

Densité

La densité moyenne est de 692 infirmières pour 100 000 habitants, contre 678 en 2001. La répartition géographique des infirmières suit la même règle que pour l'ensemble du personnel de santé : certaines régions présentent une densité élevée (Languedoc-Roussillon avec 809/100 000 habitants, Bretagne avec 769 et Alsace avec 757), tandis que d'autres sont désertées (Le Centre avec 491/100 000, puis la Champagne-Ardenne avec 626 et l'Île-de-France avec 640).

Il est intéressant de comparer densité et répartition régionale. Cela montre bien que les régions présentant un grand nombre d'infirmières ne sont pas forcément les mieux loties, car il faut ramener ce nombre à la population. L'Île-de-France, avec une densité de 629 infirmières pour 100 000, est sous la densité moyenne nationale alors qu'elle dénombre le plus grand nombre d'infirmières.

Répartition régionale

Cette carte montre les disparités régionales de la population infirmière. Trois régions, (Île-de-France, Paca et Rhône-Alpes) polarisent à elles seules 37,25 % des infirmières sur le territoire français. D'autres régions, comme la Corse, le Limousin et la Franche-Comté ne décomptent à elles trois que 3,94 % des effectifs infirmiers.

Au 1er janvier 2002, source : Drees.

Et les médecins ?

Au 1er janvier 2001, 196 000 médecins en activité ont été recensés sur le territoire, soit une densité de 332 médecins pour 100 000 habitants, contre 130 en 1970 et 206 en 1979. Ils se répartissent ainsi : 53 % d'omnipraticiens contre 48 % de spécialistes.

Avec un numerus clausus s'élevant à 4 700 médecins formés en 2002, et à paramètres constants, le nombre de médecins devrait diminuer d'environ 20 % d'ici 2020. La mission Berland recommande un relèvement progressif sur quatre ans pour atteindre le chiffre de 8 000 en 2007. L'âge moyen des médecins en activité est de 46 ans. Le vieillissement de cette population est un des facteurs d'inquiétude car les classes en âge de prendre leur retraite seront très importantes dans dix ans seulement. La Drees estime l'âge moyen de cette profession à 50 ans en 2011.

Répartition de la population infirmière par tranche d'âge

L'âge moyen des infirmières est supérieur à 40 ans. Il est passé de 34 ans en 1981 à 41 ans en 2000.

Le schéma montre cependant que 60 % des infirmières ont moins de 45 ans au 1er janvier 2002. Le renouvellement de la profession devrait donc être assuré malgré une vague importante de départs à la retraite d'ici une dizaine d'années. En 2002, le quota d'entrée en Ifsi était de 26 436, et ce depuis 2000. M. Mattei a annoncé qu'il désirait le relever à 30 000 en 2003. Rien n'a été confirmé pour l'instant. Rappelons qu'en 1985, le quota d'entrée était de 15 257. Il a donc augmenté de 73 % en 18 ans.

D'après le rapport Berland, les effectifs infirmiers devraient progresser jusqu'en 2020, « d'abord très rapidement jusqu'en 2006 puis un peu plus lentement par la suite ».