Validation des acquis : balbutiements et enjeux - L'Infirmière Magazine n° 179 du 01/02/2003 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 179 du 01/02/2003

 

Dossier

- Après l'Éducation nationale, la validation des acquis de l'expérience devrait être effective pour les professions de santé - Les candidats à la VAE bénéficieront d'un accompagnement dans leur démarche - Certaines infirmières s'inquiètent d'une dévalorisation de leur diplôme.

C'est dans une ambiance de bouleversements fondamentaux liés aux nouvelles lois européennes et à la perspective d'une première année commune aux professions de santé que se profile l'application de la validation des acquis de l'expérience (VAE) pour les professions de santé. La VAE est un processus nouveau permettant d'obtenir tout ou partie d'un diplôme sans avoir suivi pour autant l'enseignement académique habituellement nécessaire à son obtention. Déjà appliquée à tous les diplômes décernés par l'Éducation nationale, la validation des acquis est riche de promesses, mais également génératrice de nombreuses craintes dans les milieux enseignants. En effet, cette procédure, qui pourrait permettre aux infirmières d'obtenir enfin les passerelles vers d'autres métiers qu'elles réclament depuis des années, risque également d'être réduite à sa plus simple expression. Des instances surtout préoccupées de colmater les brèches causées par la pénurie sont mises en cause. Si cette nécessité est incontestable, il convient de veiller attentivement à ce que la mise en place de mesures trop radicales ne ramène pas la formation infirmière à un niveau qu'elle a largement dépassé depuis les programmes de 1972.

COMMENT ÇA MARCHE ?

Pour faire valoir ses droits à la VAE, il suffira de justifier d'au moins trois ans d'expérience professionnelle ou bénévole dans l'un (ou plusieurs) des domaines concernés par le diplôme visé. Accessible à n'importe quel âge, quels que soient le niveau d'études initial et la situation professionnelle du demandeur, cette procédure promet de bouleverser le panorama de l'enseignement, et même, de l'exercice infirmier. Mais, alors qu'une vaste réflexion sur le sujet est en cours depuis juillet 1992 au sein de l'Éducation nationale, l'annonce de l'application des mesures au domaine médical met les instituts de formation infirmiers au pied du mur. Un obstacle qu'il faudra franchir au plus vite, puisque la rumeur annonce la promulgation de premiers décrets d'application dès le premier semestre 2004. Or, la mise en place de la VAE nécessite l'élaboration de procédures complexes.

Heureusement, la loi étant la même pour tous, il y a fort à parier que le chemin parcouru par l'Éducation nationale servira de guide aux responsables du secteur de la santé. Parmi les spécialistes du sujet, Paul Olry est - comme il le définit lui- même -, « un pur produit de l'Éducation nationale ». Ancien instituteur de classe unique puis professeur d'histoire-géographie, il est passé par le Greta pendant huit ans pour finalement aboutir au ministère de l'Éducation de 1991 à 1996. C'est dire si l'évolution de carrière est un sujet qui le préoccupe ! Depuis 15 mois, il effectue pour le Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) une mission d'ingénierie destinée à coordonner la mise en place égalitaire de la VAE à l'université Paris XIII, dans le cadre d'un projet commun aux universités Paris XII, Paris XIII et Marne-la-Vallée. « De nombreuses personnes nous appellent sans même savoir vers quel diplôme elles souhaitent se diriger », observe-t-il. C'est là qu'intervient un élément clef de la procédure : l'accompagnement. « Nous les aidons d'abord à déterminer les voies ouvertes par leurs compétences », explique Paul Olry.

ACCOMPAGNEMENT ATTENTIF

Une fois les choix clarifiés, le dossier de pré-orientation est constitué, puis envoyé à l'organisme formateur pour l'inscription définitive au processus. La seconde étape demandant un accompagnement attentif est la constitution du dossier de VAE spécifique. Beaucoup plus complexe et volumineux, c'est ce document qui sera étudié par les jurys. De sa pertinence dépendra donc l'avenir des postulants. Cependant, il s'avère que nombre d'entre eux ont tendance à confondre actes et compétences. « Les gens sont plus souvent tentés d'égrener des tâches accomplies que d'en formuler les compétences afférentes », confirme Paul Olry. Selon lui, le passage de l'oral à l'écrit constitue également une barrière pour certains d'entre eux.

Lors de la seconde phase d'accompagnement, les postulants sont ainsi aidés à mettre en forme leur expérience et à définir des situations significatives, parmi lesquelles on extraira des dénominateurs communs permettant d'isoler les expériences fondatrices. Pour simplifier cette tâche ardue, l'université a créé un outil d'extraction du travail. Joliment nommé « Trace », ce questionnaire est très utile pour obtenir un descriptif du « travail réel ». Il se base sur les aspects techniques, relationnels à l'environnement, liés à l'activité spécifique du postulant. « En phase de développement, Trace n'est pas encore disponible au grand public. Nous l'utilisons pour l'instant dans le cadre de l'accompagnement. Mais à terme, il sera consultable via Internet », souligne Paul Olry.

Parallèlement à cela, des ateliers d'écriture organisés au Cnam permettent aux candidats, par groupes de six, d'apprendre à construire une argumentation efficace. Prévus par la loi, ces entretiens d'accompagnement donnent droit à un congé spécifique qui ne peut pas excéder 24 heures de temps de travail, soit environ trois jours. Pour l'obtenir, le salarié devra faire parvenir à son employeur une demande d'autorisation d'absence au moins soixante jours avant la date prévue. Ce dernier sera dans l'incapacité d'en refuser le principe mais pourra demander un report dûment justifié.

Cependant, ce report sera limité à six mois à compter de la date de demande. Le dossier du candidat enfin constitué, l'étape suivante consiste au passage devant un jury : un entretien obligatoire pour la VAE, ce qui la différencie, entre autres, de la procédure classique de certification. Cet examen oral est parfois suivi d'une mise en situation, ce qui sera certainement le cas de manière systématique dans le domaine de la santé. Il est d'ailleurs prévu de procéder à la formation spécifique d'experts et de correspondants spécialisés en VAE.

BAISSE DE NIVEAU ?

Selon l'esprit de la loi, lorsque les décrets d'application concernant les métiers de la santé seront promulgués par le ministère, la procédure sera globalement identique à celle de l'Éducation nationale. À ceci près qu'il ne sera pas question de validations totales de DE sur la base de la seule expérience. En effet, tout au long de l'histoire de l'enseignement des soins infirmiers, la place dévolue à la pratique par rapport à celle de la théorie n'a cessé d'augmenter. Ce n'est qu'après 1972 que le temps de formation et celui de la pratique en stages sont devenus équivalents. « Il s'est avéré en effet indispensable que les infirmières développent des capacités d'analyse et sachent se mettre plus en retrait par rapport aux situations afin de s'éloigner de leur ancienne position "d'exécutantes" », remarque Mercedes Chaboissier, directrice de l'unité de formation des cadres de santé à l'École supérieure Montsouris. Dorénavant titulaires du baccalauréat dans environ 85 % des cas, c'est grâce à une solide formation théorique qu'elles ont vu reconnaître leur rôle propre d'éducatrice de santé depuis peu. « Il convient donc d'être particulièrement attentif à ne pas laisser la situation de pénurie tirer le niveau des formations vers le bas », insiste-t-elle.

AIDES-SOIGNANTES

Il est probable que les premières personnes concernées par le décret annoncé seront les aides-soignantes, encouragées à venir repeupler les rangs clairsemés des infirmières. À l'appui de cette supposition, les déclarations de Jean-François Mattei : le ministre affirmait très récemment vouloir donner un sérieux coup de pouce à la promotion professionnelle de ces personnels, qui ne seraient à l'heure actuelle que 10 % à franchir le pas chaque année. Selon Anne Larinier, présidente de Promofaf Île-de-France, 200 aides-soignantes seraient en attente d'un financement pour un congé individuel de formation, ne serait-ce que dans le secteur privé en Île-de-France. Parallèlement à cela, elle évalue à plus de 5 % la proportion de postes vacants d'infirmières, sachant que les prévisions situent ces chiffres aux alentours de 9 à 12 % dans les années à venir. Entre l'un et l'autre de ces phénomènes, le raccourci est vite fait.

Cependant, la perspective de la promotion massive et rapide des aides-soignantes n'est pas sans poser certaines questions épineuses aux formateurs. Si cette population est motivée et connaît déjà bien le terrain, on décèle parfois chez certaines une réticence à la conceptualisation. « Il faut absolument mettre en évidence les compétences de réflexion théorique et d'accompagnement des patients », estime Béatrice Bouchaillou, responsable du groupe de travail VAE du Cefiec (Comité d'entente des formations infirmières et cadres) qui craint une dérive technicienne du métier. « Un professionnel opérationnel techniquement doit aussi être opérationnel dans sa tête », ajoute-t-elle. « L'aptitude des candidats à conceptualiser les soins, à accepter leurs limites, à savoir argumenter leurs décisions, etc. devra donc être au centre des préoccupations des jurys », souligne également Mercedes Chaboissier. C'est pourquoi elle préconise, en parallèle avec les mesures de VAE, l'instauration d'un processus régulier de formation tout au long de la vie professionnelle.

DISPARITÉS

Parmi les organismes concernés par la mise en place de cette réforme, on constate d'importantes disparités dans la rapidité de réaction. Si, à l'Unaibode, on assure avoir déjà pris toutes les dispositions pour adapter la formation des infirmières de bloc opératoire à la VAE, et si le référentiel proposé par les puéricultrices a déjà été communiqué au ministère, rien n'est aussi avancé pour les Ifsi ou les formations cadres. C'est la raison pour laquelle Béatrice Bouchaillou, directrice d'institut de formation au CH d'Avranches-Granville, a été chargée par le Cefiec d'animer un groupe de réflexion sur la VAE. Depuis novembre dernier, les huit personnes qui composent ce groupe pluridisciplinaire (formateurs et directeurs représentant les infirmières puéricultrices, les aides-soignantes, les auxiliaires de puériculture, les IDE et les cadres) planchent activement sur les tenants et aboutissants de cette réforme. Il faut dire que la tâche est considérable.

Avant d'envisager de valider quoi que ce soit, il est indispensable de définir de nouveaux modules de formation correspondant aux acquis susceptibles d'être mis en avant par les postulants. Et si la formation par modules est déjà largement généralisée dans les Ifsi, c'est vers une véritable refonte de ceux-ci que l'évolution VAE engage les formateurs. « Il serait temps de sortir de la nomenclature des disciplines médicales pour s'approcher plus de la notion de compétence infirmière », explique Béatrice Bouchaillou, suivie en cela par la directrice de l'UFCS de l'École supérieure Montsouris. Cette dernière estime que les réformes actuellement engagées sont d'autant plus importantes qu'elles constitueront le fondement de l'enseignement pour de nombreuses années à venir.

Chez Promofaf Île-de-France, Anna Larinier craint que l'étroitesse des budgets des instituts de formation ne leur permette pas de diligenter les études d'ingénierie nécessaires à la nouvelle organisation. C'est une question qui devrait néanmoins être réglée de manière plus générale, puisque l'essence même de la validation des acquis présuppose une harmonisation du fonctionnement des différents établissements de formation. « Ce qui nous amène à un projet de programme commun auquel les autorités ministérielles successives nous poussent depuis longtemps », soupire Béatrice Bouchaillou, qui craint une mainmise des administratifs sur la profession. Cela dit, elle admet sans difficulté que la disparité des projets pédagogiques et des modes d'organisation des Ifsi complique l'application de la loi. « Le risque, c'est que même l'ordre des modules soit dicté par le ministère », observe-t-elle. Mais comment normaliser l'ordre d'enseignement sans perdre de vue, pour autant, les impératifs locaux liés notamment aux emplois du temps des formateurs et aux possibilités de stages ? C'est l'une des nombreuses questions complexes auxquelles les différents groupes de travail vont devoir répondre le plus rapidement possible.

PREMIÈRE EXPÉRIMENTATION

Hormis la possibilité pour les aspirantes étudiantes en Ifsi de se faire dispenser dans certains cas du baccalauréat, il n'existait jusqu'à récemment aucune procédure de validation dans le domaine médical. Ce n'est que l'année dernière, et dans l'optique de la nouvelle loi, qu'une expérimentation a été lancée pour les aides à domicile. Le diplôme d'État d'auxiliaire de vie sociale (DEAVS) créé en mars 2002, a été conçu directement pour correspondre à l'ensemble des critères mis en place par la VAE. Remplaçant l'ancien Cafad (Certificat d'aptitude à la fonction d'aide à domicile), il a été constitué directement sur la base de modules à valider. Cette expérience de validation, copilotée par la DGAS et les partenaires sociaux, et conduite dans sept régions (Bretagne, Languedoc-Rousillon, Limousin, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais, Poitou-Charentes, et Rhône-Alpes), semble satisfaire la majorité des protagonistes.

Selon Hélène Archambault, chargée de mission développement des formations par l'association Notre-Dame-de-Bon-Secours, cette expérimentation terminée en juin dernier peut en effet être considérée comme un succès : sur les 112 salariés postulants, on a abouti à 110 validations, dont 28 validations complètes (une exception dans le secteur), du DEAVS ; des résultats qui lancent sa mise en place nationale prévue en janvier. Les jurys présidant à la partie orale et pratique du processus de VAE ont été constitués exclusivement de membres du jury de DE, ce qui garantissait leur capacité à juger de la compétence des candidats.

Dans l'introduction du rapport d'évaluation de cette première expérimentation, les organisateurs se félicitent d'ailleurs du « réel travail d'évaluation des compétences par rapport aux déclarations des salariés » exécuté par les jurys. Peut-on, pour autant, estimer que l'exemple du DEAVS est suffisant pour servir d'exemple aux autres professions, sans prendre en compte la sélection préalable des candidats, la création récente du programme et le niveau modeste du diplôme décerné ? Autant d'éléments qui en font un modèle tout à fait particulier.

On ne peut donc pas extrapoler outre mesure à partir de la réussite de ces premiers pas de la VAE. La multiplicité de formations et d'expériences des futurs candidats transforme parfois le travail des groupes de réflexion en véritable casse-tête. Car il ne faut pas imaginer non plus que les aides-soignantes sont les seules à voir les portes de l'évolution professionnelle s'ouvrir devant elles. On peut parfaitement imaginer par exemple que des professionnels de l'aide sociale qui quittent rarement leur bureau puissent accéder à la validation en vue d'exercer un jour comme infirmières. La notion d'accompagnement, si elle existe bel et bien dans ces métiers, est assez éloignée de ce qu'elle suppose chez les IDE.

C'est la raison pour laquelle Béatrice Bouchaillou estime que tout doit être étudié, clarifié et formalisé, même certaines précisions en apparence évidentes, comme l'obligation d'un minimum de temps de stage auprès du patient. Tout le monde s'accorde, en effet, pour éviter les validations hâtives, dont celles qui seraient liées à des glissements de fonctions. À cet égard, bien que distinct de la VAE, l'épisode récent du scandale des aides opératoires fournit un exemple inquiétant. La procédure d'autorisation d'exercice qui leur a été appliquée ne dépend que de la réussite à un simple examen à base de QCM que l'Unaibode (Union nationale des associations d'infirmières de bloc opératoire DE) qualifie de simulacre. De plus, d'après Chantal Levasseur (présidente de l'Unaibode), ces postes, une fois indûment légitimés, envahissent le champ professionnel d'aides-soignantes ou d'infirmières spécifiquement formées ou qui pourraient justement bénéficier de la VAE. Sans parler du danger pour les patients !

L'ATOUT DES RÉFÉRENTIELS

Véritable pierre angulaire de la révolution VAE, seule l'élaboration de référentiels de métier et de formation pertinents pourra garantir la qualité de notre système de soins. Si, du côté du Cefiec, on s'étonne de ne pas être invité à participer à ce processus initié en décembre par le ministère, cela n'empêche pas pour autant l'organisme fédérateur des formateurs de mener sa propre réflexion : un référentiel comprenant toutes les professions est en cours de préparation à l'antenne Cefiec de la région Midi-Pyrénées. Il sera présenté aux adhérents (avec le rapport du groupe de travail VAE) lors de l'assemblée générale qui aura lieu à Paris au printemps prochain. « Nous voulons disposer d'éléments précis pour être à même de défendre nos positions face au travail du ministère », signale Béatrice Bouchaillou.

Reste à savoir avec quelle instance précise ces discussions auront lieu. Pour l'instant, la dispersion des équipes ministérielles chargées de rédiger ces documents ne favorise pas la communication. Il est étonnant, en effet, de constater que c'est la DGS (Direction générale des soins) qui a pris en charge l'écriture du référentiel formation, alors que celle du référentiel métiers a été confiée à la DHOS (Direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins). Sans parler du fait que cette dichotomie est en contradiction avec la logique de la VAE qui voudrait que l'on s'appuie sur l'exercice du métier pour en référencer les compétences.

En effet, la vocation de la VAE à s'adresser à des publics plus variés que l'on ne l'imagine (pourquoi pas des bénévoles en soins palliatifs, des manipulateurs radio, ou même certains patients atteints de maladies chroniques habitués à une importante prise en charge individuelle ?) multiplie le nombre de situations à prendre en compte.

C'est donc de la précision de ces documents et de l'engagement des professionnels dans leur rédaction que découlera la validité des mesures mises en place. Interrogé sur ce sujet, Guy Boudet, responsable du groupe travaillant sur le référentiel métiers à la DHOS, assure que le respect du niveau de formation constitue une des préoccupations majeures du ministère. « Et si le référentiel des métiers hospitaliers est au centre de ce premier travail, affirme-t-il, c'est parce qu'il participe d'un projet plus vaste de remise à jour de la nomenclature des métiers hospitaliers et non pour juguler la pénurie. » Une assertion qui laisse les professionnels pour le moins dubitatifs.

ÉVOLUTIONS DE CARRIÈRE

Quant aux infirmières en exercice, si le bénéfice qu'elle pourront tirer de cette procédure dans le domaine de l'accession à de nouvelles formations semble indéniable à première vue, il nécessite d'être défini plus précisément. Dans cette ambiance de crise, on imagine assez mal les dirigeants d'établissements médicaux voir d'un bon oeil leurs éventuelles velléités d'évolution professionnelle, surtout si elles souhaitent abandonner le milieu hospitalier. Il leur faudra donc batailler ferme pour se tenir au courant des nouvelles possibilités offertes. On peut, du reste, se surprendre à espérer que ce vaste remaniement encouragera les responsables d'établissements, inquiets de voir leur personnel les quitter, à créer enfin les postes spécialisés (en recherche infirmière ou en clinique par exemple) réclamés depuis longtemps par les professionnelles. Peut-être moins problématiques, les passerelles vers les spécialisations classiques (Ibode, Iade et puéricultrices) ou vers les postes de cadres, seront fondées sur des modalités qui restent encore à définir et qui découleront en grande partie des futurs référentiels de métiers et de formation. Selon Mercedes Chaboissier, participant à l'écriture d'un rapport encore confidentiel pour l'ARH, la situation est un peu plus complexe pour le passage des IDE à la formation d'Iade (infirmier anesthésiste), étant donné la technicité particulière du métier.

LES DRASS AU CENTRE DU DISPOSITIF

En attendant la promulgation du décret par Jean-François Mattei, les professionnelles souhaitant bénéficier d'une formation complémentaire via la validation peuvent déjà commencer par s'exercer à la formulation de leurs compétences, et prendre contact avec les organismes de formation pour adultes engagés dans le processus. En revanche, il n'est pas nécessaire de se lancer actuellement dans la demande d'un bilan de compétences, puisque dans le cadre du droit au congé VAE, un nouveau dispositif spécifique, beaucoup plus adapté, va être créé, qui intégrera l'accompagnement dont il était question plus haut.

Les Drass, normalement tenues d'examiner toutes les candidatures, seront au centre du dispositif et normalement habilitées à répondre aux questions des candidats, mais leurs représentants évitent pour l'instant de s'engager sur un sujet dont ils ne connaissent pas encore les tenants et les aboutissants. D'autre part, il est possible de trouver de nombreux renseignements auprès de Promofaf Île-de-France qui vient d'ouvrir la première antenne d'information VAE. Des premiers éléments qui pourraient permettre, d'ici peu, à chacune de tracer sa propre trajectoire professionnelle idéale.

En savoir plus sur Internet

> La loi, validation des acquis et droits aux congés :

http://vosdroits.service -public.fr/ARBO/1102-NXENS306.html#DebutFXENS310

> Conservatoire national des arts et métiers :

http://www.cnam.fr/home/acquis/index. htm

> Promofaf : http://www.promofaf. fr

> Afpa (Association nationale pour la formation professionnelle des adultes) : http://www.afpa.fr

> La VAE expliquée par l'université Paris X Nanterre et Paris XIII

http://fit.u-paris10.fr

http://www.univ-paris13.fr/Popup/vaepopup.htm

HISTORIQUE

Genèse d'une révolution

Au commencement, il y avait la loi de 1984 sur les acquis académiques, assortie de son décret d'application publié l'année suivante, qui ouvrait les portes des universités à des personnes qui ne possédaient pas les titres normalement requis. Puis, ce fut la loi de validation des acquis professionnels en juillet 1992. Celle-ci, bien qu'offrant des possibilités plus vastes, était strictement réservée aux diplômes décernés par l'Éducation nationale. Ce n'est qu'avec la loi du 17 janvier 2002 que la procédure s'est étendue à l'ensemble des diplômes, dont ceux des formations médicales, paramédicales et pharmaceutiques.

Chez nos voisins

Appelée ailleurs « reconnaissance des apprentissages informels », la VAE participe d'un processus d'évolution de réflexion commun à la plupart des pays d'Europe. C'est en Norvège, en Finlande, en Suède et au Danemark que l'on en trouve les modèles les plus aboutis, suivis de près par le Royaume-Uni, l'Irlande et les Pays-Bas. Encore éloignées d'une quelconque formalisation, l'Allemagne et l'Autriche élaborent leur réflexion. Quant à nos voisins méditerranéens, c'est souvent l'absence de formations et de références professionnelles qui leur a fait prendre du retard.

La VAE en questions

> À qui s'adresse la VAE ?

À toute personne pouvant justifier de trois ans d'expérience professionnelle ou bénévole dans un domaine en rapport avec le diplôme visé, quel que soit son niveau de formation initiale.

> Pourra-t-on valider un DE en totalité ?

Non. Un complément de formation sera systématiquement demandé.

> Qui décidera de l'obtention des diplômes (ou modules validés) ?

Les jurys étudiant les demandes de validation seront composés de professionnels et de formateurs.

> Quand sera-t-elle mise en place ?

Dès la promulgation du décret nécessaire par le ministre de la Santé.

COMPÉTENCES

Une révélation personnelle

Comme on peut aisément l'imaginer, la reconnaissance de l'expérience comme moyen d'apprentissage équivalent (du moins en partie) à l'enseignement classique bouscule bien des idées reçues. À l'époque de la mise en place de la validation professionnelle par l'Éducation nationale, Hugues Lenoir, le directeur du centre d'éducation permanente (Criep) de l'université Paris X, se penchait sur les révélations personnelles induites par le processus. « Elle met le sujet en posture d'apprentissage pour le reste de son parcours », affirme Hugues Lenoir à propos de la validation. En clair, la prise de conscience des savoirs cachés dans son exercice quotidien place le demandeur dans une position de réflexion plus favorable à la conceptualisation. Et cela sur un long terme. Cette assertion, qui remettrait en question les craintes émises par certains professionnels quant à la baisse du niveau des compétences théoriques, se révélera-t-elle exacte dans le domaine de la santé ?

Source : Entreprise formation, avril 2001.