Handisup donne libre accès aux études - L'Infirmière Magazine n° 180 du 01/03/2003 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 180 du 01/03/2003

 

NANTES

Actualités

Cette année, proclamée « année européenne des personnes handicapées », l'accessibilité est à l'honneur. Pour l'association Handisup, elle doit être intégrée dans une approche globale. Explications à l'université de Nantes.

Véronique, étudiante en première année de droit, a tenté d'effectuer une seule fois le trajet qui sépare le bâtiment de la faculté de droit du restaurant universitaire, puis elle a accepté l'évidence : avec son fauteuil, la pente et les deux virages en épingle à cheveux qui concluent les 500 mètres du parcours ne sont pas praticables. Alors, depuis la rentrée universitaire, Véronique est accompagnée tous les midis par un des quinze bénévoles de Handisup. Une aide dont elle est heureuse de profiter mais qui la rend un peu amère car elle est très attachée à son autonomie.

Tous les handicaps.

Pourtant, l'université de Nantes a beaucoup amélioré l'accessibilité de ses bâtiments et la circulation au sein du campus. Stéphane Brunat, chargé d'intégration à l'association Handisup, le reconnaît : « L'environnement offert aux étudiants handicapés est très satisfaisant. »

Le temps où les premiers accompagnateurs de Handisup devaient porter les étudiants handicapés, les aider à entrer par les sous-sols, emprunter les ascenseurs de service, est bien révolu. Mais, même si Nantes peut être aujourd'hui considéré comme un site universitaire adapté à l'accueil des personnes handicapées, il existe toujours des aspects de la vie sur le campus à améliorer : il faudrait ainsi introduire une signalétique en braille, effectuer certains travaux d'aménagement des abords, remplacer les portes d'entrée trop lourdes pour certains, réserver des places de stationnement à proximité des locaux...

Ce niveau d'exigence défendu par Handisup depuis 14 ans à Nantes et peu à peu intégré par les autorités universitaires locales, dans les projets de réhabilitation entre autres, est déjà une réussite. Mais cet objectif de rendre réellement accessibles les halls des facultés, les amphithéâtres, les salles de cours, les restaurants universitaires, n'est en fait que la partie émergée d'un travail en profondeur pour élargir le concept assez réducteur de l'accessibilité.

« Lorsque l'on évoque le terme d'accessibilité, note Stéphane Brunat, nous pensons habituellement normes architecturales et fauteuil roulant. Mais pour une personne déficiente auditive, un ascenseur ne sera pas très utile ! À Handisup, nous prenons en compte tous les handicaps, et nous partons des besoins exprimés par l'étudiant lui-même puis cherchons les meilleures solutions pour lui permettre d'accéder aux études supérieures de son choix. » D'où une préparation de six mois en moyenne avant la rentrée universitaire avec le futur étudiant, pour identifier le type d'aide nécessaire en termes d'accessibilité, de matériel et d'accompagnement.

Cette préparation, idéale, est possible par le travail en partenariat avec l'Apajh (Association pour adultes et jeunes handicapés), et principalement la section de Loire-Atlantique. Cette dernière est d'ailleurs à l'origine de la création de Handisup avec l'université de Nantes, à la suite d'une mobilisation des parents d'élèves handicapés pour que ces derniers puissent poursuivre leur cursus de formation.

Les effectifs des étudiants handicapés suivis par l'équipe du service d'accueil et d'accompagnement de Handisup ont ainsi augmenté considérablement : un en 1992, 170 en 2001 ! Avec une grande diversité de situations : près de la moitié des étudiants accompagnés par un auxiliaire de vie scolaire ont une déficience motrice. Viennent ensuite ceux qui connaissent une déficience visuelle, auditive, ceux atteints d'une maladie invalidante et enfin ceux présentant des troubles de la personnalité et du comportement.

Viser l'intégration sociale.

Face à ces étudiants, dont les besoins peuvent être très différents, l'équipe de Handisup cherche la meilleure organisation... et doit saisir toutes les opportunités. Rentrée universitaire 1999, un étudiant autiste souhaite s'inscrire en faculté de sciences économiques. Vingt heures d'accompagnement hebdomadaires sont utiles. Handisup présente un dossier à la Fondation France télécom pour l'autisme, qui accepte de financer durant deux années le poste correspondant. L'intégration progressive de cet étudiant dans son environnement permet de diminuer le volume des heures d'accompagnement : dix heures par semaine sont encore nécessaires, puis, au bout de deux ans, l'étudiant doit devenir autonome. Seul un tuteur pédagogique continue de le suivre. Autre illustration du travail d'intégration de Handisup : l'inscription d'un étudiant en biologie alors que la faculté tente de le décourager sous prétexte qu'il serait incapable de dessiner. Une solution technique est trouvée, ses études se poursuivent jusqu'à son embauche dans un laboratoire du CNRS. Cet organisme finance aujourd'hui l'équivalent d'un temps plein et demi pour accompagner ce jeune chercheur dans son travail.

Médiation.

Pour Patrice Fondin, délégué général d'Handisup, « l'équipe intervient toujours à la demande de la personne handicapée. Nous mettons en place un processus d'intégration. Et notre travail s'arrête là. Au fur et à mesure que l'étudiant tisse des liens avec son entourage, nous nous désengageons. Nous sommes des médiateurs, mais le système institutionnel actuel a plutôt tendance à avoir une approche fonctionnaliste. L'annonce de Luc Ferry de créer des permanences d'accueil pour les étudiants handicapés dans toutes les universités à la rentrée prochaine l'illustre tout à fait : nous sommes toujours dans une logique d'accueil administratif. Mais si l'étudiant ne peut pas être aidé pour manger, il ne suivra pas d'étude. Nous avons réussi à faire prendre conscience de la nécessité d'avoir des auxiliaires de vie scolaire, nous allons maintenant militer pour que soit intégré le travail de médiation sociale, indispensable pour rendre concrètement accessibles les études supérieures. »

HANDISUP

Un accompagnement tous azimuts

Handisup, c'est une équipe composée de Patrice Fondin, le délégué général, Blandine Bertho, chargée de l'insertion professionnelle et Stéphane Brunat, chargé de l'intégration. Ce sont aussi 5,5 postes d'accompagnateurs salariés et 46 étudiants vacataires ou bénévoles. Selon les besoins recensés, l'étudiant est aidé pour s'installer en cours, prendre ses notes, se déplacer entre deux cours, mais aussi se restaurer, aller aux toilettes... Une aide pédagogique est également proposée.

Chaque étudiant a un référent salarié qui assure le lien entre l'étudiant et le responsable pédagogique, suit les questions d'accessibilité, la récupération des cours, l'aménagement des examens.

SOCIAL

Dévoiler son potentiel

Handisup, avec l'Agefiph(1), le Medef et la CGPME(2), agit aussi pour favoriser l'insertion professionnelle des personnes handicapées. Parmi les actions proposées aux 149 jeunes inscrits dans une telle démarche, des séances pour apprendre à « objectiver le handicap », avoir plutôt une approche « positive », « communiquer sur son potentiel et non sur son état de santé ».

1- Association générale du fonds d'insertion pour les personnes handicapées. 2- Confédération générale des petites et moyennes entreprises.