L'endocardite infectieuse - L'Infirmière Magazine n° 180 du 01/03/2003 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 180 du 01/03/2003

 

Cardiologie

Conduites a tenir

Rare et grave, l'endocardite infectieuse atteint environ 1 500 patients chaque année en France, avec une proportion croissante chez les plus de 65 ans, et les sujets non préalablement connus comme à risque. Le traitement préconisé est l'antibiothérapie.

DÉFINITION

L'endocardite correspond à une inflammation de l'endocarde, tissu situé sur la face interne du coeur, directement au contact du sang. La zone la plus atteinte est généralement celle des valves cardiaques, en particulier la valve mitrale. Principalement due à une immunodéficience, l'endocardite infectieuse aiguë survient lors d'un épisode septicémique grave sur les valves cardiaques saines.

L'endocardite infectieuse subaiguë (endocardite infectieuse d'Osler) survient sur un terrain cardiaque pathologique, avec des valves cardiaques abîmées.

MANIFESTATIONS

Les symptômes typiques sont : l'hyperthermie (clochers thermiques avec frissons dans les formes aiguës ou fébricule prolongée) associée à un souffle cardiaque (de régurgitation le plus souvent), l'altération de l'état général, l'hépatosplénomégalie, les lésions cutanées rougeâtres, les douleurs (articulaires, lombaires, musculaires). Les complications sont cardiaques, neurologiques et rénales.

Le diagnostic est confirmé par les examens biologiques mettant en évidence le syndrome inflammatoire et la présence de germes (hémoculture). L'échographie cardiaque montre la lésion anatomique.

ÉTIOLOGIE

Toutes les situations entraînant un flux sanguin turbulent autour de la valve favorisent l'endocardite infectieuse : valve cardiaque anormale, prothèse valvulaire, maladies de coeur congénitales. L'infection est développée à partir d'une septicémie provenant d'un foyer à distance.

Le germe vient se greffer sur l'endocarde et contribue à former des végétations (amas formé de fibrine, de plaquettes, de macrophages, de polynucléaires neutrophiles et de bactéries) qui gênent le jeu valvulaire et qui peuvent migrer (risque d'embolie).

L'infection est responsable de lésions destructrices susceptibles de provoquer une insuffisance valvulaire aiguë et massive (urgence chirurgicale).

Les streptocoques sont les agents infectieux le plus souvent responsables (plus de la moitié des cas), suivis des staphylocoques (Staphilococcus aureus).

Les portes d'entrée des germes sont surtout buccodentaires (lors de soins dentaires accompagnés de saignements : extractions dentaires, détartrage, etc.), mais aussi urinaires (chirurgie urétrale, prostatectomie), digestives, cutanées (furoncles, plaies), iatrogènes (cathéters, pacemakers, chirurgie cardiaque).

Les sujets le plus à risque sont les personnes âgées et les sujets jeunes séropositifs pour le VIH ou toxicomanes.

Les endocardites infectieuses surviennent aussi plus volontiers sur des terrains immunodéprimés (cancers, traitements immunosuppresseurs) et chez les patients porteurs de cathéters de perfusion à demeure (porte d'entrée).

OBJECTIFS

Le traitement curatif a pour but d'éradiquer le micro-organisme présent dans les végétations (antibiothérapie).

Il est volontiers associé à un traitement chirurgical qui prend en charge les lésions cardiaques.

Le traitement préventif revêt ici toute son importance. On procède à l'éradication de tous les foyers susceptibles d'être à l'origine d'une endocardite infectieuse. Il faut aussi s'assurer de la prévention d'une éventuelle bactériémie lors de tout acte chirurgical chez les patients à risque en particulier, c'est-à-dire ceux qui sont porteurs de prothèse valvulaire, présentent des antécédents d'endocardite, des cardiopathies congénitales, shunts chirurgicaux, valvulopathies acquises, cardiomyopathie hypertrophique.

ACTIONS

Traitement médical. L'antibiothérapie (bactéricide), fonction du germe en cause, est instaurée dès les premiers symptômes : posologies élevées (souvent deux antibiotiques associés) et traitement prolongé.

Prophylaxie. La prophylaxie repose sur des mesures d'hygiène prioritaires pour réduire le risque de survenue de bactériémies, en particulier pour les bactéries à tropisme cardiaque et la lutte contre tous les foyers infectieux de l'organisme : hygiène buccodentaire et cutanée, rigoureuse et continue, désinfection des plaies, antibiothérapie curative de tout foyer infectieux, suivi rigoureux des mesures d'asepsie lors de la réalisation de manoeuvres à risque infectieux, en particulier dilatation oesophagienne, sclérose de varices oesophagiennes, coloscopies avec biopsies, intubation nasotrachéale, intervention sur les voies urinaires, éradication ou diminution de la densité bactérienne en cas de portage chronique cutané (dialysé rénal), urinaire, surveillance systématique de l'état buccodentaire au moins deux fois par an chez les patients porteurs de cardiopathie.

L'antibioprophylaxie est de règle chez les patients à risque et pour les gestes à risque évoqués plus haut.

Tout geste entraînant une effraction des muqueuses et/ou de la peau doit être évité : pratique de piercing déconseillée chez les sujets porteurs de cardiopathies, et acupuncture à surveiller. L'utilisation de cathéters de transfusion doit être limitée aux situations où elle est indispensable, en particulier chez les sujets à risque : en cas de nécessité, remplacer systématiquement le cathéter périphérique tous les trois à quatre jours, préférer les cathéters périphériques aux centraux et surveiller rigoureusement la survenue d'inflammation au point de perfusion.

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