Les infirmières plus efficaces et moins chères - L'Infirmière Magazine n° 180 du 01/03/2003 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 180 du 01/03/2003

 

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Selon une série d'études publiées par le Credes, des infirmières spécifiquement formées peuvent réaliser certains actes attribués aux médecins avec au moins autant d'efficacité (et à moindre coût). Leurs compétences en termes de conseil et d'information sont particulièrement appréciées par les patients.

En cette période de sinistrose hospitalière, la lecture du rapport publié le 6 mars par le Centre de recherche, d'étude et de documentation en économie de la santé (Credes) fera souffler un vent d'optimisme sur toute la profession infirmière. Cette revue(1) détaille une série d'expériences étrangères, qui ont débuté essentiellement dans les pays anglo-saxons dès les années 1960-70 pour tester l'efficacité de la délégation de certaines tâches, traditionnellement réalisées par des médecins généralistes, à des infirmières.

Ces expériences s'inscrivent dans des situations spécifiques, telles que des réseaux de soins ou une organisation pluridisciplinaire de la prise en charge médicale, et ne peuvent être transposées directement à la situation française, précise d'emblée Fabienne Midy du Credes. Cette analyse fournit plutôt « une réflexion générale sur l'organisation des soins primaires en France », dans un contexte actuel de pénurie dans le secteur infirmier, mais qui doit évoluer vers un accroissement de la densité infirmière de 24 %, selon les projections démographiques de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) pour 2020, sur la base de quotas maintenus à leur niveau actuel. En outre, ces estimations indiquent qu'en même temps, la densité des médecins tendrait à se réduire de 19 % avec un numerus clausus de 6 000 médecins par an(2), ajoute Fabienne Midy.

Meilleures conseillères

La revue publiée par le Credes permet de répondre à la question du partage des tâches et des compétences entre médecins généralistes et infirmières à compétence élargie. Elle confirme en outre que « la qualité des soins est assurée » et que « les patients sont satisfaits par les services des infirmières ».

Les principaux domaines où les infirmières ont étendu leurs compétences, sous réserve d'une formation complémentaire, sont la promotion de la santé (bilan de santé, éducation du patient, dépistage), le suivi de pathologie chronique stabilisée (asthme, diabète, maladie cardiovasculaire) et les consultations de première ligne (bilan initial, prise en charge autonome).

Différentes études sur les expériences anglo-saxonnes montrent que les infirmières réalisent certains actes, comme le bilan de santé ou les prélèvements, aussi efficacement que les médecins généralistes, voire mieux, notamment pour le conseil ou l'information, auprès de certaines populations à risque, telles que les personnes âgées.

Aucune étude ne fait mention d'un événement grave attribuable à la délégation entre médecin et infirmière. L'efficacité de la prise en charge est équivalente entre les deux professionnels, les infirmières obtenant même une meilleure observance aux recommandations thérapeutiques.

Une solution « rentable »

Cette délégation des tâches présente également un intérêt sur le plan financier. En effet, le transfert d'une partie de la charge de travail des médecins généralistes aux infirmières permet d'offrir des soins à un moindre coût en raison de salaires moins élevés. Selon plusieurs études, la délégation de certains actes peut entraîner un taux de consultations sans recours au médecin de 67 % à 95 %.

Plusieurs travaux ont également calculé le taux de délégation pour que celle-ci soit coût-efficace en tenant compte des coûts de formation, du salaire ou encore de la productivité des deux types de professionnels. Selon certaines hypothèses, 10 % des coûts médicaux totaux et 16 % des seuls soins ambulatoires pourraient être économisés.

Selon Fabienne Midy, il convient toutefois de se méfier des généralisations hâtives, car ces modèles économiques ont été publiés il y a déjà une vingtaine d'années et les paramètres ont changé depuis.

1- « Efficacité et efficience de la délégation d'actes des médecins généralistes aux infirmières », revue de la littérature 1970-2000. Renseignements : http://www.credes.fr. 2- Il a été fixé à 5 100 pour 2003.