Je travaille en maison de retraite médicalisée et l'une des résidentes, à qui je dispense des soins depuis près de dix ans, veut rédiger un testament à mon profit. Le directeur de l'établissement dit que ce n'est pas possible. Qu'en est-il vraiment ? - L'Infirmière Magazine n° 181 du 01/04/2003 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 181 du 01/04/2003

 

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Juridique

Le Code civil (article 909) a imposé « l'incapacité de recevoir » aux docteurs en médecine ou en chirurgie lorsqu'ils ont traité le défunt pendant la maladie qui lui a été fatale. Les tribunaux ont étendu cette incapacité à tous ceux qui apportent des soins aux testateurs : officiers de santé, pharmaciens, ou encore infirmiers. Pour que l'incapacité de recevoir prévue par le Code civil puisse s'appliquer, il faut néanmoins que ces soins aient été délivrés de manière suivie et régulière. Ainsi, l'interdiction de recevoir ne s'applique pas à celui qui aura délivré des soins de manière tout à fait ponctuelle ou occasionnelle. D'autre part et dans certains cas, les soignants peuvent être autorisés à recevoir. L'interdiction de recevoir s'applique aux médecins et de manière générale, à tous ceux qui apportent des soins au testateur, notamment aux « charlatans », c'est-à-dire ceux qui exercent illégalement la médecine, la profession d'infirmier ou encore de pharmacien. Une exception à l'interdiction de recevoir est prévue pour les dispositions universelles, en cas de parenté (jusqu'au quatrième degré inclus) avec le malade et à condition que celui-ci n'ait pas d'héritier en ligne directe.

Une autre exception au principe d'incapacité des soignants de recevoir est admise dans le cas de malades extrêmement fortunés n'ayant légué qu'une infime partie de leur fortune à un soignant ; lequel devra démontrer en outre qu'il a rendu au malade, avant son décès, de réels services.

Au contraire, lorsqu'une personne âgée est hébergée dans un établissement social ou médicosocial, il lui est tout à fait possible de rédiger un testament au profit de l'institution qui l'accueille, l'interdiction ne concernant que les personnes physiques : aucun testament ne peut être rédigé au profit des propriétaires, administrateurs et employés d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées ou infirmes. Ce principe est pourtant remis en cause aujourd'hui par les tribunaux qui considèrent que « le legs universel consenti au profit du directeur d'une clinique d'hospitalisation par une personne âgée, est tout à fait valable à condition que le testament ait été rédigé en dehors de la période d'hébergement », c'est-à-dire après le retour de la personne âgée à son domicile.