Surveillance des antidépresseurs - L'Infirmière Magazine n° 181 du 01/04/2003 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 181 du 01/04/2003

 

Pharmacologie

Conduites a tenir

Les antidépresseurs nécessitent de la part de l'infirmière une surveillance rigoureuse et une implication importante. Elle doit évaluer l'efficacité du traitement et instaurer un véritable climat de confiance avec le patient dépressif, en proie à des ruminations morbides.

OBJECTIF

Le but des antidépresseurs est d'améliorer l'humeur et de lever l'inhibition psychomotrice. Ils doivent également permettre au patient de retrouver le goût du plaisir et faire disparaître ses troubles psychosomatiques.

ACTIONS

La mise en évidence par l'infirmière des éléments de la dépression et le dépistage des effets secondaires permettent au médecin de réactualiser son traitement.

Avant administration.

Les posologies peuvent être variables. Le traitement est débuté à faible dose jusqu'à l'obtention d'une dose optimale thérapeutique. Il faut s'assurer que le patient prend réellement ses médicaments. La prise régulière et continue de l'anti-dépresseur permet d'éviter les rechutes qui se produisent en cas d'arrêt du traitement. Le traitement de la dépression est instauré à long terme. Après amélioration d'un épisode dépressif, l'antidépresseur est maintenu plusieurs mois pour prévenir les rechutes et les récidives.

Constater l'efficacité du traitement.

Le traitement doit régulariser l'humeur et stimuler le psychisme et l'activité physique.

Normalisation de l'humeur. Les troubles de l'humeur (tristesse, larmes, auto-dépréciation, sentiment de culpabilité) doivent rapidement s'estomper. Si les troubles perdurent, il peut y avoir un risque de suicide. La perte d'espoir et la tristesse doivent être peu à peu maîtrisées. Le patient présentera de lui une meilleure image. Ses préoccupations psychiques vont diminuer.

Ralentissement psychomoteur. La fatigue du patient et son désintéressement à la vie de tous les jours (toilette, lecture, activités de groupe) doivent être moins marqués. La perte de l'élan vital qui le bloquait dans ses activités doit disparaître progressivement. On observe un retour à une concentration mentale normale. Néanmoins, il sera recherché un éventuel virage maniaque franc en cas de dépression bipolaire (cf. cours p. IX-XII).

Troubles du sommeil. Ce sont les principaux troubles somatiques qui accompagnent la dépression. Les troubles du sommeil s'expriment par une difficulté à l'endormissement et des réveils nocturnes, vers trois heures et six heures du matin. Ces troubles justifient la prise d'hypnotiques. Le patient doit être au calme, loin du bruit et de la lumière.

Troubles de l'appétit. Pour améliorer l'alimentation, plusieurs petits repas dans la journée pourraient compenser le manque d'appétit. On peut aussi lui proposer les aliments qu'il apprécie. Le poids sera mesuré régulièrement. On insistera sur l'hydratation en raison des effets secondaires du traitement.

Instaurer un climat de confiance.

Écouter le patient. Le dépressif communique peu et se replie sur lui-même (ruminations morbides). L'infirmière doit être disponible le plus souvent possible. En raison de l'anxiété associée à la dépression, l'infirmière sera vigilante pendant les moments de la journée où l'angoisse est maximale (risque de suicide en fin d'après-midi). Des activités récréatives lui seront proposées.

Rassurer le patient. Il faut expliquer les actes médicaux au patient. Il importe de renforcer de manière favorable les éléments revalorisant le patient. L'infirmière doit contribuer à lui donner un aspect extérieur favorable pour qu'il retrouve l'estime de soi.

Dépister les effets secondaires.

Il faut expliquer au patient les effets secondaires qu'il va devoir supporter, afin qu'il ne stoppe pas prématurément son traitement.

Levée de l'inhibition. Un risque suicidaire existe après huit à quinze jours de traitement. Le dépressif possède une perte de l'élan vital, et son humeur est effondrée.

- L'antidépresseur lève l'inhibition psychomotrice plus vite qu'il n'améliore l'humeur ;

- Le patient est toujours très angoissé et conserve une appréciation négative de sa personne ;

- Le patient n'est plus inhibé et retrouve les capacités de passer à l'acte suicidaire. Il faut pendant cette période accroître l'observation de son comportement.

Les objets dangereux seront supprimés lors d'un examen attentif de sa situation (hospitalisation en étage, fenêtre ouvrable...) et de ses effets personnels (médicaments stockés, objets tranchants, rasoirs...).

Troubles neuropsychiques. On observe souvent une agitation avec sensation ébrieuse, nervosité et insomnie. Une somnolence diurne, de la sédation et de l'hypotension (fatigabilité) sont le résultat de l'insomnie non traitée. Il peut y avoir survenue et aggravation de manifestations de l'angoisse. Un anxiolytique et un hypnotique (traitement correctif) sont alors prescrits par le médecin. De plus, il y a des risques de réactivation d'un délire en cas de psychose associée à la dépression. L'alcool est déconseillé.

Troubles atropiniques. Ils sont plus fréquents pour les dérivés imipraminiques (Anafranil®, etc.) et tricycliques (Laroxyl®, etc.) que pour les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (Deroxat®, Prozac®, Zoloft®, Effexor®, etc.).

- Sécheresse de la bouche : l'hydrater, surveiller le risque de mycose ;

- Constipation : surveillance de la constipation et de l'alimentation ;

- Troubles de l'accommodation visuelle (mydriase) ;

- Troubles de la miction et la rétention d'urine : surveiller la diurèse ;

- Tachycardie : prise du pouls et de la tension artérielle (TA).

CONSEILS AU PATIENT

Le traitement d'une dépression par un anti-dépresseur est long. Si le traitement est arrêté trop tôt, il y a risque de rechute. Il faut consulter régulièrement le médecin ou le psychiatre. Le patient rejeté par son entourage a besoin de se sentir écouté et compris.

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