Soigner sans juger - L'Infirmière Magazine n° 182 du 01/05/2003 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 182 du 01/05/2003

 

MÉDICOJUDICIAIRE

Actualités

À raison d'un patient tous les quarts d'heure, le service des urgences médicojudiciaires de l'Hôtel-Dieu accueille victimes et gardés à vue sur demande de la police ou de la justice. Créée en 1996, cette structure a fait des «petits» : on compte désormais plusieurs UMJ en région parisienne.

« Nous sommes l'interface entre la justice et la médecine. » C'est ainsi que deux infirmières du service des urgences médicojudiciaires (UMJ) de l'Hôtel-Dieu à Paris, Nadira Souames et Laurence Minvielle, décrivent leur poste.

Cette consultation a été ouverte en novembre 1985 à la demande du parquet de la ville de Paris. L'Hôtel-Dieu a été choisi pour sa proximité avec le Palais de justice de la capitale. C'était la première fois que la médecine légale clinique s'intégrait dans les hôpitaux de l'AP-HP. Jusqu'en 1996, cet hôpital était le seul accueil pour les gardés à vue. Depuis, des unités d'UMJ départementales ont vu le jour à Bondy, Garches, Évry et Créteil.

Activité accrue

À l'Hôtel-Dieu, le personnel se compose d'un responsable hospitalo-universitaire, d'un praticien hospitalier, de médecins vacataires spécialisés et d'un interne. Le personnel paramédical comprend six IDE et quatre aides-soignantes, accompagnées de deux secrétaires et d'une psychologue. En dix-huit ans, l'activité a été multipliée par trois. En 1996, 14 000 personnes ont été examinées contre 42 308 en 2001. Ces urgences sont ouvertes 24 heures sur 24 et sept jours sur sept.

« Nous avons un patient tous les quarts d'heure », explique Laurence Minvielle. Pour être accueilli dans ces urgences, il faut une réquisition obtenue par la police. Deux types de classifications sont faites pour les consultations : les patients (victimes) et les gardés à vue. Parmi les victimes, on dénombre 16 200 coups et blessures et 900 cas d'agressions sexuelles par an. Le rôle de l'infirmière dans cette prise en charge est d'accueillir le patient. Celui-ci sera ensuite vu par le médecin afin d'établir le certificat médical destiné à l'autorité judiciaire qui a délivré la réquisition. Tous les examens sont réalisés avec l'accord de la victime. L'accueil et le dialogue sont donc primordiaux.

Trait d'union

Les infirmières doivent faciliter l'acceptation de l'examen clinique par les patientes victimes d'agressions sexuelles. Les gardés à vue font l'objet d'examens liés à leur situation (troubles du comportement, alcoolisme...) Il peut y avoir prise en charge de patients porteurs de drogues « in corpore » (intégrées dans les cavités naturelles). « Ce sont de véritables bombes à retardement. Certains transportent jusqu'à 90 boulettes dans leur corps, précise Laurence Minvielle. Nous recevons aussi beaucoup de mineurs d'Europe de l'Est. Il faut déterminer leur âge en leur radiographiant le poignet. Il y a aussi le problème énorme des sans-papiers. »

« L'infirmière est une personne à qui le patient peut se confier. Nous sommes un trait d'union avec la liberté pour les gardés à vue mais nous ne devons porter aucun jugement sur les faits qui leur sont reprochés », ont conclu les deux infirmières.